Il Combattimento

Strasbourg (67)
du 17 au 20 janvier 2001

Il Combattimento

CLASSIQUE Terminé

Théâtre musical, d’après les Madrigaux guerriers et amoureux, livre VIII de Claudio Monteverdi et Combattimento in liquido de Scott Gibbons

Présentation
Préface
"Fabula" du Combattimento
Notes pour la mise en scène
Elementa Par Romeo Castellucci
La Socìetas Raffaello Sanzio
Lu dans la presse

Présentation

Théâtre musical, d’après les Madrigaux guerriers et amoureux, livre VIII de Claudio Monteverdi et Combattimento in liquido de Scott Gibbons

L'imagination théâtrale de Romeo Castellucci est à la fois visionnaire et physique. Elle questionne les frontières, interroge sur le langage théâtral, sur les réactions entre les corps des acteurs et l'espace scénique. Les spectateurs du Maillon sont maintenant des intimes de la Societas Raffaello Sanzio (Orestea en 1997, Giulio Cesare et Genesi en 1999, Bucchettino en 2000 ). Les images bouleversantes des spectacles avec leurs tableaux vivants au plus près de l'architecture et de la sculpture, la pulsation orchestrée des voix et des sons, le sens exceptionnel de la mise en scène ont impressionné, dérouté, choqué, c'est selon... Roméo Castellucci aborde ici son premier travail sur le répertoire lyrique. En compagnie du talentueux directeur musical Roberto Gini, il plonge dans les madrigaux guerriers et amoureux de Monteverdi et alterne avec les paysages sonores du compositeur américain Scott Gibbons. Naissance et mort, amour et guerre, tous les mots et poèmes mis en musique par Monteverdi trouvent sur scène non des illustrations, mais des échos. Un Combattimento poignant, de chair et de sang.

Il Combattimento et Genesi sont présentés au Festival d’Automne (Théâtre National Odéon Europe) en octobre.

Préface

Le Combattimento est un épisode tiré du poème en vingt chants La Gerusalemme liberata écrit par Torquato Tasso à la fin du XVIe siècle.

L’histoire se déroule pendant la Première Croisade (1095-99), et plus précisément, durant les derniers mois où ont lieu le siège de Jérusalem et la conquête chrétienne du Saint Sépulcre. Alors qu’à Jérusalem le roi sarrasin Aladin menace les chrétiens qui sont en ville, l’archange Gabriel confie à Godefroy de Bouillon la sainte entreprise. Durant les premiers combats on distingue parmi les italiens Tancredi et Rinaldo, et parmi les païens, la vierge Clorinda et le féroce Argante.

Tancredi aime Clorinda d’un amour non partagé, et c’est pour elle qu’il renonce même à ses devoirs de guerrier, alors qu’il la sauve d’un chrétien qui voulait la tuer.

"Fabula" du Combattimento

Godefroy ordonne l’assaut de Jérusalem, assaut qui est suspendu à la tombé de la nuit. Avant le combat, Arsete, l’ancien tuteur de Clorinda, essaie de la décourager de cette entreprise risquée. Aussi, il lui révèle qu’elle est la fille de Senàpo, roi chrétien d’Ethiopie, et que sa mère, ayant souvent contemplé l’image d’une belle vierge blanche, avait accouché d’une enfant à la peau blanche. Craignant la jalousie de son mari, elle l’avait échangée avec une enfant noire et l’avait confiée à Arsete afin qu’il la sauve et la baptise. Ce qu’Arsete, païen, ne fit jamais. Clorinda est troublée par ce récit, cependant déguisée en guerrier, durant la nuit elle met le feu avec Argante à la grande tour mobile utilisée par les chrétiens comme char d’assaut. Le combat a lieu entre les dernières heures de la nuit et les premières lueurs du jour. Désormais seule à l’extérieur de la muraille, Clorinda est affrontée en un duel féroce et sanglant par Tancredi, qui la prend pour un homme: il la reconnaît seulement à la fin du combat, après l’avoir blessée. Commence alors la longue hémorragie de Clorinda, et cette hémorragie va la conduire à la mort. Avant de s'éteindre, l’héroïne musulmane se souvient de la révélation de son tuteur : elle se convertit à la foi chrétienne, demande pardon, et à son tour, pardonne Tancredi. Enfin, elle demande à être baptisée. Tancredi satisfait piteusement à cette dernière ,prière, pour s’écrouler évanoui à ses côtés.

Notes pour la mise en scène

Ce qui nous a amené à Monteverdi c’était l’exercice de la transformation continuelle et la culture de l’emblème. Cet auteur - suffisamment ancien pour prendre part à la musique des astronefs du futur - représente à notre avis une prolongation de la technique rhétorique dans le théâtre de la passion.

Comme chacun sait, l’élément archaïque du Combattimento s’appuie, pour ce qui est du plan musical, sur sa propre historicité exemplaire et, sur un autre plan, sur la poésie de Tasso. C’est bien là, dans la "fabula", que je trouverai la clef de pénétration de la carapace de ce "représentatif à quatre violes". Les octaves tassiennes expriment toute la grammaire de l’emblème et de la tension antinomique selon le schéma du drame classique. Seul le texte fournit la clef de pénétration émotive, et, à mon avis, c’est dans cette fonction qu’il représente la valence causale dont la musique, dans le contexte d’une œuvre, ne peut faire abstraction. La guerre et l’amour, le féminin et le masculin, la foi et le désenchantement, la mort et éros, le vrai et le présumé chaque élément du drame est divisé en deux âmes opposées par la lame du contraire.

Le Combattimento nous reconduit à l’élément historique de l’expérience des croisades. Cette remarque est fondamentale pour saisir la portée spirituelle - mais aussi corporelle - de ce morceau. Cependant, ici, la donnée objective de cette croisade invertit sa signification par le signe même qui la caractérise : la croix. Le symbole croisé "latin", sur la poitrine des soldats, se réorganise pour réapparaître transformé en croix "grecque", qui devient alors le symbole moderne de la "croix rouge". A présent les soldats, et l’idée d’offense et de blessures qui leur appartient, deviennent des apporteurs de soins. La danse odieuse du massacre croisé est aujourd’hui le travail de l’infirmier. La blessure est observée du point de vue d’un "après", d’une remontée vers le bien.

Jérusalem comme pharmacie chimique de l’âme. Seul grâce à ce renversement sémantique - mais non pas formel - il est possible de voir dans ce Il Combattimento monteverdien les personnages plongés dans une intériorité biologique, universelle et épique que seul les gamètes peuvent représenter. Il sera alors possible d’apercevoir, à travers la projection d’un microscope biologique, un vrai combat de spermatozoïdes vivants à l’assaut de la vie, afin que le frémissement de ces petits êtres puisse signifier sur un plan universel - un plan qui appartienne à nous tous - l’armée mystique des croisades à l’assaut de Jérusalem : et là, Jérusalem est condensée dans la présence, pareillement céleste, du gamète féminin, qui mérite lui aussi, comme la Ville Sacrée, que l’on s’immole en une grande hécatombe suicide. Cette tentative de fécondation, toujours frustrée, met en acte toute tragédie humaine possible, jusqu’à la plus petite. Elle représente le théâtre et la dramaturgie humaine au minimum du concevable possible. Sans doute tout est déjà là. Il y a quelque chose de grandiose, d’épique et de pitoyable en cela. Avec Monteverdi et Tasso et leur Combattimento tout cela devient évident et se joue sur la dernière ligne de défense de l’esprit (et donc du corps ?) .

J’ai l’intention de respecter, avec la plus grande déférence, chaque note et chaque virgule de l’œuvre originale. Seul en maintenant scrupuleusement la forme archaïque de Il Combattimento il sera possible de jouir complètement de l’étrange émotion rhétorique qui, à l’époque de la première exécution, fit gittar lacrime (verser des pleurs) au public : Monteverdi a toujours un nombre de fréquences capable d’atteindre le cœur de notre imagination esthétique, de nos sentiments, et aujourd’hui à plus forte raison, là-bas, dans l’attente de la transformation, dans l’attente de quelque chose qui revienne pour donner forme à la passion. Entre un madrigal et l’autre, et entre les madrigaux et la cantate de Il Combattimento, je pense exploiter des sons contemporains et la musique "granulaire" du compositeur américain Scott Gibbons. Ces morceaux auront une fonction contrapuntique : ils créeront un effet de dilatation analytique et sensorielle entre une cantate et la suivante. De là, ce distique réactif où Monteverdi apparaîtra dans une douceur calculée inconcevable.

Je prévois une réaction chimique des sentiments, une amplification de "l’effet Monteverdi" qui rayonne à travers des sphères concentriques : et ces sphères envoûtent inexorablement, comme un courant d’amour, le corps désarmé du spectateur.

Romeo Castellucci
mars 2000

Elementa Par Romeo Castellucci

- Jérusalem comme Pharmacie.
- La croisade comme projet aporétique de l’homme face à la force et à la foi.
- Le Faune Barberini est sincère.
- St. Paul tombé est sincère.
- Une Eglise Episcopale revêtue de caoutchouc.
- Une vraie banque de sperme en azote.
- Spermatozoïdes bien vivants.
- Spermicide au chlore.
- Un microscope biologique de 5OO X à plan réchauffé
- Le besoin de pureté d’une " chambre aseptique ".
- Silicone, forex, méthacrylate, soie, moteurs électriques, fleurs, encre, animaux empaillés.
- Deux ténors
- Un soprano
- Une basse
- Un avaleur de sabres
- Un spéculum
- La reproduction d’une grenouille en bronze d’un sismographe chinois du IVe siècle
- Alginate de sodium pour empreintes buccales
- Un garde-robe en latex Armoiries épiscopales
- Trois pantographes hydrauliques pour "lire" les parois de la scène
- Une turbine électromagnétique de ‘80 HP Un cheval "marian"
- Vagins artificiels pour emploi vétérinaire
- Huile mécanique
- La Foi
- Une ligature hémostatique pour rêver
- Une genouillère hérissée de piquants en Nylon
- Une lumière circulaire à 80 Km/h
- La nécessité finale de perdre la pureté clinique
- Le visage d’un Christ hiérosolymitain qui tourne sur lui-même jusqu’à devenir, enfin, ce Dieu Invisible
- La découverte "chimique" de la vérité de la part de Tancredi comme l’accomplissement de l’oeuvre (l’oeuvre en tant qu’opéra, acte musical, alchimique ("opus"))
- Une conscience de la Forme Le besoin d’une Pharmacie de l’Amour

La Socìetas Raffaello Sanzio

La Socìetas Raffaello Sanzio est fondée en ‘98’ à Cesena par Claudia et Romeo Castellucci, Chiara et Paolo Guidi. Après une formation artistique et scientifique, ils se lancent avec fougue dans le théâtre, le film et la vidéo, la sculpture et l'environnement, l'écriture et la peinture. Les débuts de la compagnie sont placés sous le signe d'un "théâtre iconoclaste" qui prend ses distances avec la scène traditionnelle au profit de déclamations et d'invectives poétiques illustrées par des tableaux aussi violents que raffinés, associant iconographie sacrée et éléments naturels, meubles de jardin, uniformes militaires et jouets, animaux, vieux acteurs et handicapés, présentés autant que possible dans des lieux insolites. Santa Sofia, défini comme "théâtre khmer", constitue l'apogée de cette phase. Avec Gilgamesh, la compagnie recherche une "récupération mythique de la présence du corps" et avec Amleto, elle part en guerre contre la consommation usuelle des classiques. Masoch, par son néoplatonisme, révèle son attitude face au tout paraître théâtral. Avec Orestea, accueilli par Le-Maillon en 1997, l'expression corporelle des acteurs est poussée à l'extrême limite, dans une sorte de "technologie du rêve". Giulio Cesare, représenté au Maillon en 1999, était comme un précipité de l'Histoire réinterprétée par un poète qui donnait à penser sur l'âme du théâtre, qui est aussi l'art de ressusciter les morts. Depuis peu, la Socìetas Raffaello Sanzio accorde beaucoup de place aux enfants, avec des spectacles géants comme Le Favole di Esopo avec trois cents animaux, ou Bucchettino d'après Le Petit Poucet de Charles Perrault que l'on regarde allongé dans un lit. Son esthétique qui s'enrichit de la diversité des talents de ses membres, d'une profonde culture, son néoplatonisme et son manichéisme, alliés à un sentiment nostalgique qui la pousse à la fois vers la violence et le sacré, font de cette compagnie quelque chose d'unique sur la scène contemporaine.

d'après La Scène moderne

Lu dans la presse

" Pour mettre en scène ces madrigaux de Monteverdi, le metteur en scène Roméo Castellucci crée un univers proche d’un hôpital de campagne, où la croix rouge qui orne la blouse des infirmiers renvoie aux croisades. Naissance et mort, amour et guerre, tous les mots des poèmes mis en musique par Monteverdi trouvent sur scène non des illustrations mais des échos, souvent poignants. Un Combattimento de chair et de sang ! " René Solis - Libération

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Informations pratiques

Maillon

13, place André Maurois 67033 Strasbourg

Spectacle terminé depuis le samedi 20 janvier 2001

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