Phénomène de société mondial dû aux conflits et aux crises économiques, on ne peut ignorer depuis quelques années l’appropriation sauvage des trottoirs et des rues. Il ne s’agit pas de décrire la réalité du monde, ni de dénoncer la dureté de la vie et la précarité sociale mais de mettre en avant la vitalité créative de chacun qui permet de trouver dans la ville, l’espace du mouvement, du vivant, un espace « entre », un espace riche. Les deux pièces parlent des espaces espérés, fantasmés, construits avec peu de choses, qui témoignent de beaucoup de dignité.
L’espace public devient espace privé ou, informellement et provisoirement, privatisé.
Cette nécessité d’exister dignement à travers une activité oblige chacun à réinventer un rapport à l’urbain hors des lieux balisés et officiels, une nouvelle sociabilité s’invente sur les trottoirs. Ce phénomène mondial met en lumière le manque d’espace et le besoin d’inventer sa survie et témoigne d’une nouvelle organisation sociale.
A partir du même point de départ se déploient deux écritures chorégraphiques, deux angles de vues. In-Paradise et Paradise is not enough sont deux pièces construites en miroir.
Dans un premier mouvement, In-Paradise met en jeu la danse dans un rapport à la quotidienneté, fabrique un regard sur l’espace, le monde, l’individu dans son rapport à l’espace urbain.
Dans un deuxième mouvement, Paradise is not enough met en jeu la danse, séparée de son contexte initial d’écriture, projetée dans un espace vierge, symbolique, intime, sur le plateau.
Pièce chorégraphique pour 8 danseurs, musique live
Extérieur 50’
Nos sociétés, à la recherche d’une uniformisation, d’une normalisation toujours plus «rassurantes », s’effraient du grain de sable dans le rouage, du mouvement qui fait désordre. C’est ce mouvement que nous mettons à l’honneur.
In-Paradise révèle la vacuité de notre vie en société où nous ne cessons de nous agiter, faire, défaire, refaire par réel goût de l’urgence, ou de l’occupation frénétique. L’espace scénique est envahi, contraint et réorganisé par des amoncellements d’objets. Peu à peu, une métamorphose s’opère par les actions des danseurs. Le spectateur se fait sa propre histoire à travers ce qui se construit, se modifie, se transforme sous ses yeux… sans évidence.
La musique rock, parfois lyrique crée une atmosphère cinématographique. Des voix off émergent de la bande son faisant montre d’un dialogue intérieur incessant. Nous jouons sur le nombre et la multitude en jouant sur l’entassement, l’emboîtement de piles de chaises en plastiques. Réécrire de manière inventive l’usage des objets et montrer une capacité d’adaptation et d’invention de notre propre environnement. L’objet devient scénographie. L’accumulation définit l’espace de jeu et le caractérise.
Dans In-Paradise se joue notre confiance dans le corps et dans le vivant, dans notre capacité à rester en mouvement, éveillé et réactif. Une invitation au déplacement. Une quête d’équilibre, de complémentarité là où tout est bancal, au bord de la rupture.
Pièce chorégraphique pour 8 danseurs et un musicien
Plateau 50’
Quand In-Paradise montre une certaine vacuité de notre vie en société, Paradise is not enough aborde la question de l’intériorité, de nos espaces intimes, fantasmés, rêvés. Nous recherchons une distorsion de la réalité, une métaphore de l’espace contraint par les murs.
Portée par l’imaginaire de chaque danseur, la manipulation des objets fait naître des images, apparitions : réalité ou fiction ? L’objet est utilisé tantôt comme accessoire, tantôt comme costume… les danseurs se transforment, personnages étranges, évocations d’hommes ou de femmes venus d’ailleurs, princes et princesses de petits territoires imaginaires. Une nouvelle pièce se construit où l’absence devient un motif de l’écriture. S’extraire, accompagner, convier, s’opposer, se construire dans et face au groupe, intervenir ou laisser faire. La danse laisse apparaître l’intimité des relations, l’empathie qui relie chacun de nous, le lien : nouer, dénouer.
Le plateau permet aux danseurs de ralentir… sortir de l’urgence provoquée par l’espace urbain. Des silences s’installent. Le temps se détend. Des focus permettent de passer du groupe à l’individu, s’attacher à la mise en valeur d’écritures plus intimes : solos, duos, trios. La scénographie, abstraite, épurée, privilégie la corde et le pneu, objets du rien réinventés comme costumes et comme décor. La musique est jouée live sur le plateau et utilise la spatialisation comme élément de composition, étirant le temps et offrant des respirations : accordant plus de place au silence, à la respiration.
30, rue du Chevaleret 75013 Paris