Après un premier spectacle autobiographique, Lucie Hanoy a décidé de parler des autres. Un événement familial l’a conduite vers un sujet peu abordé : la maladie mentale et les clichés qui l’entourent
Bord de plateau « marionnette et thérapie » à l'issue de la représentation du 28 janvier 2023.
Après un premier spectacle autobiographique, Lucie Hanoy a décidé de parler des autres. Un événement familial l’a conduite vers un sujet peu abordé : la maladie mentale et les clichés qui l’entourent. À partir de ses recherches, la comédienne a élaboré un spectacle bien ficelé et parfaitement huilé – du moins, c’est ce qu’elle annonce dans son préambule, face au public... C’était oublier l'apparition de petits incidents techniques, des digressions à répétitions et l’ego de l’artiste qui revient au galop.
Dans cette pièce faussement fouillis, on croit se perdre, et l’artiste aussi ! Heureusement, il y a l’optimisme de l’ami Rémy et la variété des années 1980 pour nous ramener à l’essentiel. En racontant comment une comédienne tente de faire un spectacle, Lucie Hanoy réaffirme le style qui l’a révélée dans L’Imposture, un mélange de mise à distance par l’humour et l’autodérision, de poésie tonique et d’émotion partagée. Juste une mise au point – titre d’un tube de 1983 – offre un regard inattendu sur la marginalité psychiatrique et mentale. Un hommage à ceux qui ne rentrent pas dans les cases, et un hymne à la rencontre, le meilleur des antidotes pour neutraliser la peur de l’autre.
La maladie mentale est depuis longtemps pour moi un sujet de réflexion et de recherche artistique et pédagogique. Travaillant depuis 10 ans auprès de personnes handicapées mentales au cours de séjours-vacances adaptés et ayant un frère malade, je m’interroge sur le regard que porte la société sur ce qu’on appelle « la folie ». Et j’ai cette nette impression que la société regarde ailleurs faisant de la maladie mentale un sujet tabou ou un fantasme cinématographique. La maladie mentale fait peur.
Nous craignons ces maladies car nous ne les connaissons pas. Depuis des siècles les images des malades mentaux des films d’horreur prennent le pas sur une réelle connaissance des maladies et de ce que traversent les personnes touchées par ces pathologies. Mais les malades ne sont-ils pas les premiers à avoir peur ? Peur d’être perçus comme des personnes violentes, méchantes anormales ? Peur de perdre ces liens sociaux et affectifs ? Pourquoi sommes-nous gênés face à une personne qui présente un handicap mental ? Pourquoi détournons-nous le regard ?
C’est en ayant fait ce constat que j’ai eu le désir de créer un spectacle joyeux et poétique pour donner un autre point de vue sur les maladies mentales et l’univers de la psychiatrie. Nous voulons détourner la peur, la rendre drôle. Jouer avec les codes du genre.
Donner la parole aux fous. Interroger la marginalité dans une société qui tend à l’uniformité. En dressant le portrait de personnes atteintes de maladies mentales rencontrées dans ma vie je voudrais leur rendre hommage et réussir à transmettre au public ce que j’ai appris à leur côté. La psychiatrie est un sujet fascinant, poétique, littéraire, scientifique... Un terrain d’exploration et de recherche extraordinaire pour faire du théâtre et questionner notre existence.
Lucie Hanoy
73 rue Mouffetard 75005 Paris