Les frustrations et turpitudes de la classe moyenne européenne. Il y a Papa et Maman. Et puis tous les autres, dont Henning qui adore exhiber son sexe dans les toilettes des dames. De comique, la pièce ne tarde pas à virer au cauchemar.
Dans Visage de feu une famille en décomposition évoluait dans un seul et même espace, dans Parasites ces mêmes enfants rescapés en perdition revivaient dans deux espaces distincts et dans L’Enfant froid ces mêmes adultes, à présent confrontés à leurs engagements et à la manière dont ils peuvent se dépêtrer de la vie évoluent dans plusieurs espaces géodramatiques. L’ailleurs est ici.
Comme si l’esprit, à l’image des grandes artères périphériques, se bouchait et hésitait entre implosion et explosion. On marchande, on bouge, on monnaye, on en oublie le bonheur et on oublie même d’être mort. Et c’est à ce moment là qu’interviennent des mondes intérieurs, des doubles, comme des soupapes de sûreté qui prennent le devant de la réalité, mais en restant bien parallèles comme pour éviter l’inévitable dans la vie : la confusion des genres.
L’Enfant froid parle d’enfants voulant devenir adultes et de couples qui vont devenir parents. La pièce s’offre en prisme des différents stades allant de la dépendance filiale à l’aliénation maritale. Marius von Mayenburg n’amène jamais ses personnages dans la tragédie, en général les préliminaires sont bannis et ils y sont déjà de plain-pied. L’Enfant froid est un magnifique creuset de vie.
L'Arche est éditeur et agent théâtral de la pièce représentée. Texte français de Laurent Muhleisen.
"Le théâtre ne doit pas se barricader, il doit s’ouvrir, faire face. Le fait par exemple d’extraire ou de recycler des objets et des situations appartenant à la réalité quotidienne constitue un moyen de faire entendre les notions de valeur et de signification. Fouiller dans le sédiment de la vie et dans ses retranchements obscurs, les mettre à jour sur scène dans un rapport frontal avec l’imagination pour révéler une réalité profonde, dénuée de toute mécanique, donne encore à l’homme la possibilité d’être insaisissable ".
Mikaël Serre
76, rue de la Roquette 75011 Paris