Du Livre au Théâtre
Notre Histoire
Sur un théâtre de fortune
Une modernité de tous les temps
"Qu’est-ce que ce monstre vient faire ici ?"
Epique, philosophique et poétique, L’Homme qui rit est, de toutes les oeuvres de Victor Hugo, la plus échevelée, la plus étrange, la plus baroque, et peut-être la plus surréaliste avant la lettre. Ce grand conte, interrogeant les vertiges et les mystères de l’esprit humain, ranime le flamboiement lumineux et noir de l’imagination.
Un roman passionnant bien sûr. Une histoire magnifique. Mais plus que cela encore. L’Homme qui rit est l’un de ces livres essentiels que les civilisations laissent sur le rivage en se retirant. Il y a peu de livres indispensables. L’Homme qui rit en est un. Livre de tous les questionnements et de toutes les consolations. Livre-monde, Livre-clé où l’on retrouve enfoui dans les images les plus simples, les plus primitives, tout ce qui fonde notre condition d’homme.
De ce texte inouï, universel et méconnu, Laurent Schuh, en grand acteur, donne fidèlement chaque rythme, chaque nuance, jouant avec légèreté de toutes les magies du théâtre. Avec un art consommé de la rupture, quasi musical, il nous tient en haleine durant une heure et demie. Sans tricher, à mains nues, à coeur nu, il prend Hugo à bras le corps et fait revivre devant nous Gwynplaine, Déa, Ursus, Homo, Josiane… Personnages qu’on dirait nés de la nuit et qui, longtemps après que la dernière lumière du théâtre se sera éteinte, continueront à nous hanter. François Bourgeat Après avoir sillonné les routes de France, du Maroc, de Roumanie, du Brésil, du Royaume-Uni, du Luxembourg…
Adaptation de François Bourgeat d'après le texte de Victor Hugo.
Nous sommes en Angleterre au début du XVIIIème siècle. Gwynplaine, en fait Lord Clancharlie, a été mutilé enfant à des fins politiques et abandonné à son destin. Les hommes lui ont gravé à la face un rire définitif et terrifiant. Devenu saltimbanque, il fait rire le bon peuple sur les foires en compagnie de Déa, une aveugle voyante, d’Ursus, un philosophe bateleur et guérisseur, et d’Homo, le loup. Leur spectacle s’intitule Chaos vaincu…
Dante, Shakespeare, et quasimodo dans le même pantalon, derrière le même masque hilaré, une seule trame. Grandiose.
Hugo dérange les uns au risque de plaire à d’autres. L’exil l’a formé. Son engagement pour l’homme s’affine et s’affirme. Il est vertigineusement libre, il se forge une pensée verticale et touffue où « le but de l’art est l’affirmation de l’âme humaine ».
Voilà que l’auteur, la mise en scène et son interprète nous emportent avec eux dans un univers dont l’étrangeté métaphorique nous renvoie paradoxalement à nous-mêmes, individu et société, au coeur d’une aventure épique et intime, celle de L’Homme qui rit, la nôtre.
Sur le devant d’une carriole s’avançaient Gwynplaine, Déa, Ursus et Homo, comme le bateleur d’aujourd’hui s’installe pour une représentation de L’Homme qui rit sur un théâtre de fortune. Un cercle d’ampoules rouges trace les contours d’une piste foraine. Au milieu de la piste, une estrade de bois descend en pente douce vers le lointain. C’est le rocher sur lequel Gwynplaine a été abandonné. C’est la jetée qui mène au bord du gouffre. C’est le pont de Londres jailli de l’ombre. C’est le promontoir du comédien. On découvre au fond de la piste un drap accroché à une sorte de portique. Le drap est la voile de la Matutina, le drap est un parterre de mer ou de neige, le drap est la toile d’un théâtre d’ombres, devient la robe de géant de Lord Gwynplaine-Clancharlie. Dans un coin de la piste, quelque chose comme une malle, à moins que ce ne soit une cabane. Elle s’ouvre, c’est la baraque d’Ursus. Elle s’enfile, c’est la prison du comédien. Il en sort deux jambes et ces jambes marchent, c’est le chariot d’Ursus qui fait son entrée dans Londres. Par trois miroirs suspendus dans les airs, on pénètre dans de l’inattendu, dans de la monstruosité, dans des merveilles de reflets qui ondoient, glue de lumières saisissant le comédien, le réfléchissant en être diforme, éblouissement épouvantable, apparition d’un Gwynplaine tellement terrible qu’il fait rire. Un pauvre saltimbanque fait son entrée, vêtu d’un costume mi-homme, mi-ours, ayant l’honneur de nous faire entendre le texte d’un nommé Hugo.
Epique, philosophique et poétique, L’Homme qui rit est, de toutes les oeuvres de Victor Hugo, la plus échevelée, la plus étrange, la plus baroque, et peut-etre la plus surréaliste avant la lettre. Ce grand conte, interrogeant les vertiges et les mystères de l’esprit humain, ranime le flamboiement lumineux et noir de l’imagination.
Grande parabole de la grimace humaine figurée par un héros défiguré à l’image des mondes qu’il traverse et de leurs habitants, L’Homme qui rit nous dévoile, aujourd’hui et au-delà des frontières, des thèmes aussi brûlants qu’il y a trois siècles dans le royaume d’Angleterre. Qu’il soit extérieur ou intérieur, l’Informe est toujours présent face à nous, assis dans le métro, au bureau, à la Une des journaux, ou dans le reflet du miroir.
Ici, Victor Hugo, monument historique, grand alibi momifié de certaines politiques culturelles, descend de son piedestal et nous renvoie au visage une oeuvre qui n’ayant jamais quitté l’actualité, appelle l’homme à se présenter seul face à la conscience de son humanité. L’enjeu essentiel est d’abord de faire voyager un verbe vivant à travers la puissance de son énergie, dans un partage sensible au service du plus grand nombre. Le royaume du théâtre devient donc ici celui d’un langage organique où la lumière de l’émotion préside seule à notre raison d’être ensemble.
C’est pourquoi, par son contenu troublant d’universalité, par la variété des multiples contrastes qu’il pourra éclairer en chacun, L’Homme qui rit, messager sans frontière, se présente, dans la grâce de sa nudité, à autant de publics qu’il recèle de visages et d’espaces en lui-même. J’ai conclu un « pacte » avec L’Homme qui rit, m’engageant à le porter par cycles de vie jusqu’à mon dernier souffle et à le propager sur les territoires du monde, partout où la nécessité de le rendre présent se fera entendre.
Laurent Schuh
Ce que je viens faire ici ? Je viens être terrible. Je suis un monstre, dites-vous ? Non, je suis le peuple. Je suis une exception ? Non, je suis tout le monde. L’exception, c’est vous. Vous êtes la chimère, et je suis la réalité. Je suis l’Homme. Je suis l’effrayant Homme qui rit. Qui rit de quoi? De vous. De lui. De tout. Je ris, cela veut dire : je pleure. Ce rire qui est sur mon front, c’est un roi qui l’y a mis. Ce rire exprime la désolation universelle. Ce rire veut dire haine, silence contraint, rage, désespoir. Ce rire est un produit des tortures. Ce rire est un rire de force. Si Satan avait ce rire, ce rire condamnerait Dieu.
O tout-puissants imbéciles que vous êtes, ouvrez les yeux! J’incarne tout. Je représente l’humanité telle que ses maîtres l’ont faite. L’Homme est un mutilé. Ce qu’on m’a fait, on l’a fait au genre humain. On lui a déformé le droit, la justice, la vérité, la raison, l’intelligence, comme à moi les yeux, les narines et les oreilles; comme à moi, on lui a mis au coeur un cloaque de colère et de douleur, et sur la face, un masque de contentement. Où s’était posé le doigt de Dieu, s’est appuyée la griffe du roi. Monstrueuse superposition... » L’Homme qui rit
Extrait du discours à la chambre des Lords
Excellente prestation!! Précipitez vs écouter un texte magnifique servi par un comédien de talent !! Du vrai théâtre .On reste suspendu pendant deux heures ds l'univers hugolien !Bravo !!
Excellente prestation!! Précipitez vs écouter un texte magnifique servi par un comédien de talent !! Du vrai théâtre .On reste suspendu pendant deux heures ds l'univers hugolien !Bravo !!
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