Anton Tchekhov, médecin et écrivain russe, observateur hors pair de ses contemporains déclarera : "je ne souhaitais que dire honnêtement aux gens : regardez-vous, voyez quelle existence absurde et ennuyeuse vous menez ! Est-ce là-dessus qu'on pleure ?".
C'est bien ce Tchekhov-là qui nous propose trois pièces en un acte (des "plaisanteries" comme il les appelait lui-même) écrites, entre 1888 et 1889. Une demande en mariage, Tragédien malgré lui et L'Ours sont de vrais joyaux ciselés avec génie et un art consommé du vaudeville et des situations comiques. Trois histoires qui décortiquent ce qu'est ce merveilleux projet : le couple.
Le comédien qui joue le prétendant d'Une demande en mariage est celui que l'on retrouve malheureux en ménage dans Tragédien malgré lui. Il s'y confie alors à son ami peu enclin à la compassion que l'on retrouve piégé par l'amour dans L'Ours. Esquisse de "ronde" entraînée par une musique originale aux accents répétitifs.
La représentation de L'Ours est précédée d'Une demande en mariage et de Tragédien malgré lui. Distribution en alternance.
Ce synopsis raconte les trois histoires séparément. Les interrogations de Tchekhov sur le couple, sur les rapports entre les hommes et les femmes, à un moment où celles-ci commencent à s émanciper dans la société, les relient en filigrane.
Une demande en mariage
Lomov veut épouser Natalia, sa voisine. Endimanché, fébrile, il se présente chez Tchouboukov, le père de celle-ci. Tchouboukov, trop heureux de « caser » sa fille, la lui donne immédiatement et la fait venir pour qu’elle entende la demande de Lomov. Hélas, la discussion entre les deux promis tourne mal et dégénère rapidement en dispute à propos de terres en partage, de chiens de chasse, de vieilles histoires de familles… Il n’est nullement question du mariage, et le ton monte, monte…
Tragédien malgré lui
Tolkatchev, père de famille, se présente chez son ami Mourachkine les bras chargés de paquets, visiblement épuisé. Tolkatchev n’en peut plus, il demande à son ami de lui prêter un revolver ; pour en finir avec sa vie qui n’est qu’un calvaire ! Mourachkine refuse, mais accepte d’entendre les malheurs de son ami. Tolkatchev se met donc à raconter sa vie de mari martyr ! Toujours à faire des courses, à droite, à gauche, pour son épouse, pour ses voisines, contraint d’assister à d’ennuyeuses soirées… « Ce n’est pas un vaudeville, c’est une tragédie ! ».
L’Ours
Smirnov, homme misogyne, désagréable et grossier, vient réclamer à Elena, jeune veuve, l’argent que son mari lui devait. Elena refuse de payer Smirnov : « Je n’ai pas d’argent », dit-elle. Smirnov, furieux, décide d’occuper le salon jusqu’à ce qu’on le rembourse. Elena et son valet Louka essaient en vain de renvoyer Smirnov. La discussion s’envenime, les invectives pleuvent… Elena traite tout à coup Smirnov d’« Ours ». Celui-ci provoque alors la jeune femme en duel. Un duel ? Parfait. Elena veut bien se battre mais il faut d’abord lui expliquer comment fonctionne un pistolet. Smirnov n’en croit pas ses yeux. Quel caractère ! Quel regard ! Osera-t-il la tuer ?
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