Alors trouve-toi la carte pour sortir de cet enfer, pauvre chose arrogante, sans pitié, sans émotion, invalide, ratée.
Une tectonique familiale
Un puzzle d'histoires
Processus
La compagnie
La presse
C’est l’histoire d’une famille : Morag, cartographe talentueuse et exaltée, la mère ; Henry, séducteur plein d’humour et spécialiste du sommeil, le père ; et Jason, enfant unique qui nourrit l’espoir d’être un grand cuisinier, le fils.
La passion de Morag vire à l’obsession, Henry s’alcoolise et Jason déprime. Henry, seul et ruiné, s’improvise “technicien polysomnographe free lance”. Lucien, député insomniaque, vient le consulter : c’est le début d’une quête loufoque où les deux hommes vont traquer désespérément le sommeil. Jason, le fils à la vocation contrariée, quitte la maison, rencontre Jess, ex-prostituée bouddhiste, ne trouve aucune raison suffisamment convaincante pour continuer à vivre et se tue. Jess croise alors la route de Morag. Les deux femmes partagent leur expérience de l’utopie et du cognac.
Tous tentent, à tâtons et sans larme, de donner du sens à leurs échecs, un sens à leur vie. On y croise aussi La Mort, “une charmante jeune femme”, à la fois spectatrice et narratrice de cette histoire. C’est une tectonique familiale, la dérive du noyau initial jusqu’à son implosion. L'histoire de la difficile adaptation de l'Homme à sa nouvelle condition, ou comment jongler avec une espérance de vie qui s'allonge et la mort du désir.
Traduction d’Isabelle Famchon.
La douleur de la cartographe nous parle de ratages ; d'une scientifique qui croit œuvrer pour l'humanité et ne voit pas, toute proche, sa propre famille dépérir ; d’un alcoolique truculent qui ensevelit son mal de vivre dans la petite arnaque ; d'un député qui perd le sommeil en trouvant le succès - et trouve la mort en cherchant le sommeil.
La douleur de la cartographe nous parle de la mort - le grand accident des sociétés occidentales - et de la vie artificielle, comme on parlerait de la respiration artificielle, un mécanisme imposé. La douleur de la cartographe raconte l’amour oublié, l’amour sacrifié, l’amour malade - pièce lucide et non pas dénonciatrice, qui relève les symptômes d'une société en perte de sens. C’est un conte moderne, un sitcom radical, une saga de l’hiver.
Il nous faut raconter ce puzzle d'histoires pour son humour gorgé d'amertume - une façon de parler de l'échec avec panache, et surtout parce que la pièce, en parlant d'une poignée de destins déçus, radiographie avec justesse la grande désillusion des vingt dernières années. Que reste-t-il à l'idéaliste quand s'effondre son idéal ? Au politicien utopiste confronté au cynisme des réalités ? A la cartographe engagée quand s'effondre le canal du Radjahstan ?
"Pleurons. Commençons par ça."
Sept narrateurs racontent cette histoire. Les comédiens sont donc les passeurs d’un conte et non des personnages déterminés. Tous peuvent tour à tour prendre la parole ou relater un dialogue, mais tous sont en permanence investis, avec ou sans texte, de cette fonction de narrateurs. Musiques improvisées, lumières gérées en direct par les comédiens, création d’espaces éphémères, gestes jaillis d’une évidence du récit, expressions corporelles et sonores de toutes natures avec pour mission d’exprimer, jamais d’illustrer.
Tout est à vue, à disposition, et se raconte en prise direct avec chaque représentation . Il s’agit donc d’un travail sur une matière mouvante, mobile, un moyen radical de retrouver dans l’acte théâtral un médium collectif. S’approprier l’espace et le temps qui nous échoient, faire du lieu et du moment les données uniques d’une passation d’histoire. Nous faisons surgir la fable, avec pour seuls ingrédients ce que nous sommes, le texte et quelques éléments à disposition. Nous avons amorcé ce travail en août 2004 à l’occasion d’une résidence d’été à la Ferme de Cottainville à Fresnes. De cette session d’expérimentations a jailli avec évidence la profonde cohérence entre cette forme esquissée et la pièce.
La formation quasi instantanée d’images qui se refondent et se transforment, la vie simultanée de sept narrateurs qui s’oublient, se déconcentrent, sont de nouveau concernés, interviennent, avec pour mission permanente de servir cette histoire, impose une vérité et une simplicité de l’acte théâtral et décuple les possibilités de réception et d’interprétation de la pièce.
La compagnie L’Oeil du guetteur s'est créée autour d'un projet à long terme de découverte et de création d'auteurs de notre temps. Notre rôle est celui du témoin: témoins comme nous le sommes de la création contemporaine, mais aussi texte témoin, qu’on passe à ceux qui veulent bien nous suivre dans cet affût - nécessaire à établir un renouveau, un véritable répertoire d'aujourd'hui.
L’Oeil du guetteur n’est ni un laboratoire ni un outil de théâtre expérimental, mais une compagnie dynamique, partisane d'un théâtre moderne jouable, festif et alléchant, qui se veut aussi fédérateur que nos meilleurs classiques. Cela, pour promouvoir une écriture dramatique qui nous séduit autant par son propos que par son style. Notre but est donc de proposer des créations et une programmation qui adhèrent à ces critères, pour créer dans l'enthousiasme le théâtre, non de demain, mais plus simplement d'aujourd’hui.
« À l’origine comédienne, Camille Chamoux est également metteur en scène de talent en quête de textes rarement montés en France. Après La quatrième sœur, elle réunit à nouveau son noyau dur de comédiens et s’empare avec fougue et intelligence d’une pièce originale de Chris Lee La douleur de la cartographe. »20 minutes, 18 mai 2006
« Une belle pièce. Et intelligemment montée. Mais il faut se demander si un traitement résolument réaliste n’aurait pas été encore plus intéressant. Ici, les comédiens jouent tous les rôles les uns après les autres, ce qui est plaisant. Mais surtout ludique. Ils sont bons et l’on finit par accepter le procédé. Voici un spectacle vraiment original qui plaira particulièrement à tous ceux qui aiment une certaine recherche théâtrale. » Jean-Luc Jeener, Figaroscope, 10 mai 2006
« Sa mise en scène de La quatrième sœur de Glowacki était un travail remarquable. Sa nouvelle création prouve que ce n’était pas qu’un simple essai. Cette fois-ci, Camille Chamoux a été chercher un auteur irlandais, Chris Lee, dont l’écriture est en soi une découverte. (...) Les protagonistes de l’histoire, quelque soit leur sexe, sont interprétés par tous les comédiens, chacun à tour de rôle. Cela surprend, puis la ligne étant claire, c’est une très belle proposition de jeu. Quant à l’esthétisme largement présent, il n’étouffe jamais le spectacle. Un très beau travail collectif, qu’il est agréable de saluer bien bas. » Pariscope, 8 mai 2006
Cartoucherie - Route du Champ de Manœuvre 75012 Paris