En 1855 la découverte du " jeu boursier " qui, bien que dénigré car considéré comme immoral, attire et fascine. La pièce " La Question dArgent " a été créee au Théâtre du Gymnase le 31 janvier 1857.
LA QUESTION DARGENT, cest lhistoire dun rejet. Une caste, elle-même très composite ( bourgeois enrichis, aristocrates presque ou complètement ruinés), se soude et se replie sur elle-même pour rejeter un " intrus ", un enrichi de " lautre jour " comme ils disent, dont la fortune récente et insolente les choque par sa soudaineté et les rend pleins de convoitise par son importance.
Laction se situe sous le Second Empire, à Paris, chez les Durieu, couple bourgeois. Leurs biens sont essentiellement terriens. Cest une fortune issue de la Révolution et de lachat de biens nationaux. Malgré cela, Durieu est attiré par la Bourse, alors en pleine expansion et par les fortunes colossales qui sy construisent très rapidement. Les Durieu ont une fille de vingt ans (donc à marier).
Fréquentent chez eux :
- Les de Roncourt, père et fille. Lui, aristocrate ruiné pour avoir reconnu les dettes
de son frère suicidé, elle, sa fille Elisa, vingt-cinq ans,
" victime " dun mariage manqué, ne rêve plus davenir.
Ils vivent daumônes déguisées et dinvitations à dîner.
- René de Charzay, neveu de Durieu par les femmes, aristocrate célibataire sans fortune.
Il se place en retrait de ces " questions dargent " refusant
obstinément de participer aux surenchères.
- La comtesse Savelli, amie de la famille, jeune veuve encore en âge de se marier, vit
sur ce quelle croit être la fortune de son premier mari.
- Jean Giraud, fils du jardinier du père de René de Charzay, sest lancé dans la
spéculation boursière à grande échelle sans le moindre scrupule. Mais il veut plus. Se
faire admettre par cette bourgeoisie terrienne et par cette aristocratie qui, même
ruinée, le fascine, et pourquoi ne pas sceller cette acceptation par un mariage? Mais le
mariage ne se fera pas, le clan se resserrera et Jean Giraud sera chassé.
Aujourdhui la spéculation boursière est une activité tout à fait honorable, même les retraités la pratiquent sur une grande échelle. La bourse attire et fascine toujours autant et les fortunes qui sy font et sy défont sont planétaires, et ses hoquets et ses sautes dhumeur conditionnent chaque fois la vie de millions dêtres humains.
Régis Santon.
A propos du terme " version scénique " figurant au générique de la pièce.
Le mot " Adaptation " sous-entend réécriture et ce nétait pas mon propos. Il y a quatre ans, jai découvert cette pièce totalement oubliée dAlexandre Dumas fils. Jy ai retrouvé des thèmes qui me sont chers entre le Faiseur de Balzac et le théâtre dOctave Mirbeau.
Très vite, je me suis rendu compte que ce que jy voyais, qui était le fond de la pièce, le " discours substantiel " de lauteur, était affaibli par la construction typiquement XIXème siècle, alors que le spectateur daujourdhui habitué à lélipse, liée à la culture de limage, comprend, analyse, extrapole avant que le personnage ait fini de parler et en vient, par là, à trouver le " discours substantiel " trop bavard et digressif, naïf et suranné.
Faut-il donc monter des textes comme La question dargent ? Si on les monte, tels quils sont écrits, on fait de simples reconstitutions qui ne nous touchent pas et on trahit le " discours substantiel " qui est en eux. Sinon on doit accepter de faire oeuvre de dramaturge. Ce travail repose sur une symbiose avec le discours de la pièce, un total respect de lécriture et une réelle abnégation pour ne pas réécrire à la place de lauteur.
Lexpression " version scénique " me parait de loin la plus appropriée laissant la part belle à lexpression vraiment créatrice de : " Une pièce dAlexandre Dumas fils ".
Régis Santon
106, rue Brancion 75015 Paris