Prodigieux destin que celui du Chevalier de Saint-George. Né esclave en Guadeloupe en 1739, il va devenir l’une des stars de la société parisienne des Lumières. Formidable escrimeur, cavalier émérite, séducteur impénitent, il est surtout le violoniste le plus brillant de Paris, et sera sacré, en 1775, meilleur chef d’orchestre d’Europe.
Marie-Antoinette décide de nommer ce noir et rival parisien de Mozart directeur de l’Académie royale de musique. Inconsciemment, elle déclenche alors une polémique raciste d’une rare intensité et devra renoncer sous la pression de certains artistes et du lobby des planteurs.
Blessé, humilié, Saint-George va s’engager pour changer une société qui juge les gens selon leur apparence. Il fréquente la Société des Amis des Noirs, devient le premier franc-maçon puis, sous la Révolution, le premier colonel à la peau brune. Après sa première mort, en 1799 une seconde mort abattra son oeuvre en 1802 : elle sera écartée des répertoires dès le rétablissement de l’esclavage.
Le Nègre des Lumières fait du Chevalier de Saint-George le héros de son propre opéra. Seuls quelques airs isolés ont pu être conservés des six oeuvres lyriques qu’il a offertes au public (dont une avec pour librettiste Choderlos de Laclos). La réunion de ces airs qui, tantôt évoquent irrésistiblement Mozart, tantôt annoncent le romantisme a permis de constituer cet opéra. Celui-ci nous fait vivre le cheminement initiatique d’un personnage brisé par l’adversité et qui se reconstruit dans son combat pour la liberté. Tous les personnages qui l’entourent ont réellement existé et incarnent les espoirs et combats qui ont traversé ce siècle des Lumières.
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