" Pourquoi est-ce si difficile dapparaître pour ce quon est ? Qui écoute ? Qui peut comprendre ? Qui écoute qui ? Qui comprend qui ? Les vies sétirent toujours en parallèle, plus ou moins éloignées, mais ne se croisent jamais. " Le Roi (de haut en bas)
Le Roi de haut en bas est écrite en 1986. Elle fait partie des pièces au caractère narratif de luvre de Guy Foissy. Les personnages se racontent dans une espèce de connivence avec le public et dans une atmosphère légère où certaines parties du texte sont traitées sous forme chantée. La musicalité, le rythme, jouent dailleurs le rôle essentiel dans le processus décriture chez Guy Foissy. Les choses viennent, lenchaînement des mots impose une musique intérieure à la pièce et on se laisse volontiers emporter par elle. Doù aussi la surprise, le suspens final fréquent dans ses pièces. " Pour quune pièce soit réussie, il faut trois conditions : un thème intéressant, une histoire plausible qui le raconte et les personnages qui la vivent ".
Cest bien là le canevas de la pièce Le Roi de haut en bas. Le thème : quel sens donner à sa vie ? Une histoire : celle dun homme qui ne vit que par son travail et pour son travail, délaissant les trois femmes qui habitent sous le même toit que lui. Des personnages : lui, le Roi, coléreux et capricieux, qui na pourtant rien dun roi, préoccupé par sa vie professionnelle, sa femme, amoureuse dun fantôme de mari, ne sépanouit quen dehors du cercle familial, la mère de sa femme, rendue aigrie par le départ de son mari et dont lhumour agit comme du fiel sur son gendre, enfin, la sur de sa femme, marginale délurée, résignée par les revers de la vie mais toujours à la recherche du bonheur. Ce quatuor vit au rythme des histoires de chacun sans pour autant sintéresser à son prochain. On sécoute mais on ne sentend pas. On se regarde mais on ne se voit pas.
Luvre de Guy Foissy dénonce les maux de la société moderne : la solitude de lindividu et les phénomènes de la vie quotidienne quil ne sait pas maîtriser et qui lagressent : la bureaucratie, le pouvoir, le chômage, lintégration, ou encore la communication. Tout engagé quil soit, son théâtre nest pas moralisateur et ne prétend pas délivrer des messages. Guy Foissy ne sest jamais pris pour un auteur intellectuel. Il montre les grands problèmes simplement à travers les gens qui les vivent.
Le Roi de haut en bas est une pièce qui ne laisse pas indifférent après sa lecture. Elle nous fait réfléchir sur notre existence, sur ce que lon en fait. Shakespeare faisait dire à son héros Hamlet : " To be or not to be, that is the question ". Quatre siècles plus tard, Guy Foissy reprend cette réplique universelle et intemporelle pour conclure sa pièce : " Être ou ne pas être, quelle drôle de question ". On se demande si cest utile et puis surtout si ça vaut le coup de vivre sa vie. Il y a du Ferré dans le texte de Guy Foissy, cest de la poésie à létat théâtral, qui passe par du rire, de la musique, du chant, des larmes. La condition humaine face à son image. Cest la vie, notre vie qui se joue sous nos yeux. A nous de faire vivre les personnages à notre façon, en laissant le réalisme au texte et en le dépassant dans le jeu. Pour ce huis clos, point dépoque, point de lieu ; juste un univers aquatique, une " prison ", des ombres, des clowns, des instruments de musique, des voix, du ridicule, du grotesque, en un mot : de lhumour, mais de lhumour qui grince. Car de lillusion aux désillusions, lhomme est comme un funambule. La moindre infortune et cest la chute vertigineuse. On cherche à être utile, à devenir indispensable, irremplaçable. Au fond, on cherche seulement à donner un sens à sa vie. Cest là lobjectif de tous ces personnages, celui de tout un chacun. Et lamour dans tout ça ? Cest léchappatoire, lissue de secours, lespoir de lâme au service des égarés, dans ce réquisitoire envers le pouvoir engendré par une société dans laquelle lhumanité se noie.
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