Alors que le Monde n’est pas au mieux de sa forme ; alors que le pétrole s’épuise, que les villes s’enfument, et que la Terre tousse ; alors que les familles se décomposent… Bref, alors que les signes du déclin de notre Civilisation sont flagrants… Voilà que six universitaires bon teint font le point sur l’existence, tout en se préparant une bouffe mémorable. Bien conscients du péril qui pointe mais ayant décidé de l’oublier le temps d’un week-end. Un peu comme ces couples d’inconnus qui font compulsivement l’amour sous les bombardements… Sauf qu’au lieu de faire l’amour, nos héros, eux, en parlent sans complexe !
En cuisine, les hommes font la popote en parlant des femmes…qui, elles-mêmes, dans une salle de gym, parlent des hommes en tentant de perdre quelques rondeurs… Hommes et femmes partagent deux décors mitoyens qui s’ignorent… mais cohabitent. “Conversations avant un koulibiac de truite” pourrait ainsi être le titre de morceau d’anthologie.
Car Le Déclin de l’Empire Américain est avant tout une partie de ping-pong décapant, cruel et parfois cru tout court, où hommes et femmes confrontent leur point de vue sur “l’autre sexe” ! Mariage et mensonge, plaisir et fantasmes, orgasme et Père Noël, célibat et surdité, adultère et notes de portables… Et comme la société est paumée, pas surprenant que la civilisation décline !
Depuis le film de Denys Arcand, le texte n’a pas pris une seule ride. L’adaptation l’a replacé dans une modernité de début de millénaire. Comme Les Invasions barbares avait replacé les personnages dans un monde de l’après 11 septembre… La coexistence des deux décors sur scène ajoute à la cocasserie de la première partie. Et quand la seconde partie de la pièce voit se retrouver hommes et femmes pour partager le koulibiac tant désiré, les théories des uns se confrontent aux certitudes des autres et c’est l’apothéose !
Au service d’une comédie résolument actuelle et d’un rire décapant, coquin et lucide… Encore une petite tranche de koulibiac de truite ?
D'après le film de Denys Arcand, adaptation de Claude-Michel Rome.
7, rue Daunou 75002 Paris