Nous sommes au cœur de la guerre de Trente Ans qui, de 1618 à 1648, a opposé protestants et catholiques. Anna Fierling, alias Mère Courage, refuse de consentir à la guerre, de la reconnaître et de lui payer son dû : mais elle refuse aussi de ne pas en profiter. Elle veut être à la fois mère et cantinière - Mère Courage, « la femme qui a peur de perdre son bien » - et tout conserver : enfants et affaires. S’il lui arrive de prendre conscience de cette contradiction, ce n’est que par éclairs ; entreprise insensée où sombreront à la fois ses enfants, ses biens et sa lucidité.
Dans la mise en scène du Théâtre des Osses, la carriole de Courage est un carrousel qui tourne sur lui-même révélant les mauvaises raisons de toute guerre. Animés par cette force centrifuge, scandés par le rideau brechtien et par la musique grinçante de Dessau se déploient les douze tableaux de l’épopée. Si la guerre n’en finit pas, suggère Brecht, c’est que certains, fût-ce pour leur malheur, ont intérêt à la voir durer.
Par le Théâtre des Osses (Suisse). Traduction de Geneviève Serreau et Benno Besson chez l’Arche éditeur.
Le critique allemand Willy Haas écrit : "C’est le chef-d’œuvre de Brecht. C’est vraiment dans le sens plein du terme, le drame « politique », comme le sont les pièces de Schillerou de Grillparzer. Au fond Mère Courage est dès aujourd’hui un drame classique. Certes, la pièce ne respecte pas les unités de temps, de lieu et de ton. Elle est plus proche du modèle Shakespearien et, avec ses changements continuels de lieu, ses scènes où se mêlent l’injure et le ricanement, l’ordure, la sagesse populaire, le blasphème et la poésie, elle relève évidemment du style baroque.
D’autre part, elle rappelle le drame romantique par sa prétention à être une chronique historique. Cependant, elle est classique par le caractère de lieu commun donné à la guerre. Bien qu’elle évoque une période précise de l’histoire d’Allemagne, la Guerre de Trente Ans, la pièce semble hors du temps en montrant les réactions des hommes devant la souffrance, la gloire ou la mort. La guerre est dépeinte comme une calamité naturelle, une des trois grandes plaies qui avec la peste et la famine, selon la mythologie scandinave accablent l’humanité.(…)
Enfin, la pièce est classique parce qu’elle groupe autour du personnage central tous les éléments du drame qui pourrait se résumer ainsi : comment Mère Courage perdit l’un après l’autre ses enfants en cherchant à ménager sa fortune. Le tragique de sa situation réside dans son éternelle illusion d’échapper à son terrible partenaire : en voulant préserver son gagne-pain, la roulotte, elle cause la perte de ses enfants. Comme Œdipe, artisan de son propre malheur, elle est le symbole de l’humanité souffrante qui croit toujours éviter la mort, mais se précipite d’elle-même vers son destin."
Texte extrait de Mère Courage, Brecht - De Henri Dumazeau
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