L'histoire
Notes de mise en scène
La critique
La même année que Lorenzaccio, Alfred de Musset signe à 24 ans ce chef-d’œuvre de la littérature romantique.
Dans cette pièce, l’auteur décrit la découverte de l’amour par deux adolescents inexpérimentés. A travers leur soif de destruction et leur recherche d’identité, le mouvement même de la vie est décrit. Les thèmes abordés - adolescence, solitude, retour aux origines, doute, suicide - sont d’une grande actualité dans ce siècle où plus que jamais le paraître, la peur et la violence sont maîtres et où la pureté et la tendresse sont des tares.
Comédienne issue du Conservatoire National Supérieur d’Art Dramatique, Isabelle Ronayette a fait ses classes avec Philippe Adrien et Catherine Hiegel, puis a notamment travaillé sous la direction d’Hans-Peter Cloos, Jacques Nichet ou Laurent Laffargue. Sa première mise en scène, Les Muses Orphelines de Michel-Marc Bouchard, a été saluée par la presse.
Avec On ne badine pas avec l’amour, elle met en scène huit comédiens, pour dire qu’il est temps d’accepter de vivre pleinement l’amour, fut-il fragile, fugace et dévastateur…
Ce qui me plaît dans l’écriture de Musset, c’est sa manière passionnée d’aborder des sujets universels sans imposer aux lecteurs son jugement. De subtilité en subtilité, il nous entraîne en nous-mêmes et nous permet de nous positionner et de nous questionner sur des sentiments que l’on croyait souvent évidents et qui, tout simples qu’ils étaient, restent problématiques. "Aimer", "Etre aimé" sont devenus difficiles dans un monde où le paraître, la peur, et la violence sont maîtres. L’innocence et la pureté sont alors des tares, la douceur et la conviction ouvrent alors les portes sur l’opportunisme et l’amour a du mal à vaincre ses fantômes.
Cette pièce est pour moi ce constat douloureux. Ce constat de deux êtres amoureux et perdus qui jouent pour mieux pouvoir se détruire. Il me semble que de nos jours les mots tels qu’abandon et confiance sont bannis de notre vocabulaire et laissent place à l’errance, à la séduction et à l’image. Monter cette pièce est pour moi une façon de dire qu’il est temps de voir et d’accepter l’amour, avec tout ce que cela engendre, et que tous nos jeux de rôles sont souvent dangereux et nous poussent trop souvent vers la mort, et que la vie est peut être un choix plus douloureux, mais qu’il est doux de vivre et d'aimer.
Trois jours, un par acte, durant lesquels huit personnages vont s’affronter impatiemment, se déchirer sans raison afin de justifier leurs sentiments, pour aboutir à la mort de Rosette. Une soif à la fois de destruction et de recherche de soi-même, qui est le mouvement même de la vie. Alors que l’on donne des raisons politiques et sociales à tout ce qui nous entoure, je pense que le sens profond des choses ne se trouve qu’en nous-mêmes. Déchiffrer des individus, dessiner leurs contradictions, leur bonheur et leur souffrance, est pour moi la source du Théâtre. Musset me laisse une magnifique machine de vie que je désire mettre en scène.
Les fantoches ont l’automatisme et l’empattement de ceux qui ont vécu sans amour. Le chœur incapable de vivre pour lui s’obstine à relater et à conter ce qu’il voit. Rosette par envie ou par fascination se jette à cœur perdu dans l’amour. Camille se perd à trop écouter les douleurs des autres femmes et Perdican flirte avec le jeu. Dans cette pièce, un homme qui pleure de ne pas pouvoir manger à la meilleure place possède, à mon sens, une crédibilité et une douleur aussi importante qu’un homme qui aime sans être aimé. La faim de maître Blazius et de maître Bridaine n’est que la traduction d’une grande désolation. L’attente du Chœur et du Baron est le résultat d’une grande solitude. De cela découle le non opposition du comique des fantoches, à la pureté et au sérieux de nos héros. Chercher la faille de chaque personnage, les mettre à nu, pour que les acteurs puissent comprendre tout en restant en équilibre sur le fil de l’entre deux.
Musset peint des malaises existentiels d’hommes et de femmes, inquiets de leurs valeurs. Il nous parle d’un monde de malentendu où l’on ne peut s’avancer que masqué : d’où un monde d’apparences. Le but de mes répétitions est de donner à regarder aux spectateurs des êtres humains et non "des êtres factices créés par mon orgueil et mon ennui".
Isabelle Ronayette
Trois sœurs et un frère se retrouvent dans la maison de leur enfance à l’occasion d’un événement redouté : le retour de leur mère, parti vingt ans plus tôt au bras d’un bel Espagnol. La carapace que chacun s’était bâtie craquelle, la fratrie se déchire. Au théâtre des histoires familiales, l’écrivain Michel-Marc Bouchard est de ceux qui font tomber les masques et libèrent les angoisses. Se gardant d’une approche naturaliste que la pièce "Les Muses Orphelines" pourrait suggérer, Isabelle Ronayette signe une vraie première mise en scène et démontre qu’elle a l’intelligence du texte. Privilégiant le rythme plutôt que la psychologie, l’expression de la douleur passe par un jeu très formel. Chorégraphié dans un espace réduit comme une maison de poupées – avec passerelles, panneaux amovibles et interstices pour y glisser des secrets – entièrement investi par le corps des acteurs. Pour laisser le champ libre au jeu et couper court à toute « interférence folklorique », Ronayette a choisi la « traduction en français » de Noëlle Renaude. Avec Estelle Aubriot, Nathalie Lacroix, Odja Llorca et David Maisse – sorits du Conservatoire – la crétaion a étét remarquée lors de la présentation des maquettes du jeune théâtre national, en 1998. Libération, 25 janvier 2002
(...) La langue de Michel-Mars Bouchard fait mouche : en grossissant le trait des caractères de chacun, il distille un venin redoutable. Il les rend accessibles. C’est là que la mise en scène d’Isabelle Ronayette prend toute sa saveur. Parce qu’elle a troqué le particularisme géographique du texte en une gestuelle singulière, décalée, satirique et grotesque. Comme un trait souligné, un tic vu à la loupe, une image du corps déglinguée où les comédiens font merveille. Ce faisant, l’équipe d’Isabelle Ronayette fait écho au constat de Noëlle Renaude : « Aménager, c’est ruiner en douceur une langue. Traduire, c’est toucher violemment à ce qui la fonde, mais tenter de trouver, dit autrement, une même évidence. » le cocasse, il n’y a rien de tel pour ébranler les certitudes. Parce qu’il lui faut des faits, des personnages, des situations et le dérèglement de tout. L’insolent. Les Inrockuptibles, 1er au 7 février 2000
(...) Cette pièce (« Les Muses orphelines ») du Québécois Michel-Marc Bouchard est mise en scène par Isabelle Ronayette avec un humour corrosif. Tous pétulants et allègrement grotesques, ses quatre comédiens joignent systématiquement le geste à la parole : un sens consommé du burlesque qui nous vaut l’une des meilleures soirée de cette rentrée! L’Express, 27 janvier 2000
1, place du Maréchal Leclerc 86000 Poitiers