La fabuleuse machine à déclencher le rire de Pierre Dac adaptée par Jean Baptiste Plait dans sa version théâtrale, n'a pas pris une ride
Première partie
Présentation, plutôt houleuse ( interprétée par Vincent Mathieu ), pas vraiment
aidé par ses quatre acolytes, ou comment tout faire pour empêcher le spectacle de
commencer ( interprété par Carole Antoine, Didier Caruso, Alexandre Guilbaud et Frank
Berjot ).
Le Schmilblick ( de Pierre DAC ), une page d'anthologie jouée par Alexandre Guilbaud.
Pensées de Pierre DAC, un moment de philosophie extrait de l'Os à Moelle.
Le Golden DAC Quintet, interprète ses deux plus grands succès : " Rends-moi ma
brosse à dents " et " Qui, qui, qui, qui sommes-nous ? " (
chansons, paroles, et musiques de Jean Baptiste Plait
Naissance d'une compagnie scénario des Employés du mois, filmés par David Weil
Deuxième partie
Phèdre ( à repasser ), pastiche de Pierre Dac, une parodie délirante de la tragédie
classique de Racine. Adaptation de Jean Baptiste Plait et mise en scène de Philippe
Chauveau.
Cette Ré-création, écrite dans les années trente par le champion du non-sens et
réadaptée par Jean Baptiste Plait en 1979, a connu un succès phénoménal jusqu'en 1991
avec 2000 représentations... et 1.5 tonnes de talc.
A nous Paris
Quid novi sous la galaxie du rire ? Cette comédie, très habilement adaptée
dans sa version théâtrale par Jean-Baptiste Plait. Rien de tel pour vous épargner une
cure de vitamines après les agapes des deux réveillons. Saynètes croquignolettes
savamment construites, textes loufoques distillés avec une jubilation communicative, mise
en scène pêchue et interprétation ad hoc, le résultat est jouissif. Les accros de
Pierre Dac le savent : on s'ennuierait moins au lycée si l'on étudiait davantage cet
humoriste, pape du non-sens made in France et du burlesque. Un seul conseil : laissez vos
esprits cartésiens au vestiaire et abandonnez-vous durant une bonne heure infiltrée
d'insolence contagieuse. C'est vraiment merveille d'entendre la plume
"entourloupeuse" du "Schmiblick", les joyeuses pitreries du Golden Dac
Quintet, la parodie déjantée de Phèdre revisitée par le maître et menée avec
une suffisance toute patricienne et... des tonnes de talc ! On se bidonne de bout en bout.
Par les breloques d'Hercule, ces joyeux trublions sont à surveiller comme le lait sur le
feu.
Itinéraires wallons
Ils sont cinq comédiens, combien talentueux : Carole Antoine, Frank Berjot. Didier
Caruso, Alexandre Guilbaud, Vincent Mathieu. S'étant rencontrés aux Arènes de Lutèce,
ils décidèrent de se grouper sous le titre "Les Employés du mois". Un homme
de théâtre avisé les repéra pour reprendre la " Phèdre (à
repasser) " de l'illustre Pierre Dac, dans l'adaptation de Jean-Baptiste Plait.
Le spectacle comprend deux parties. La première est une succession de scènes destinées à ouvrir joyeusement les portes de l'Absurdie. Avec une présentation perturbée d'incidents délirants (signée Jean-Baptiste Plait) : le célèbre monologue de Pierre Dac, "Le Schmilblick", qui devrait être au programme des candidats au Premier Prix de Conservatoire ; de nombreuses pensées du Maître dont "Etre dur de la feuille n'empêche pas, pour autant, d'être mou de la branche" ; et l'interprétation de deux grands succès du Golden Dac Quintet, "rends-moi ma brosse à dents" et "Qui, qui, qui, qui sommes-nous". Leur auteur J-B Plait a probablement été inspiré par Pierre Dac lequel, se posant la même question en y ajoutant d'où venons-nous et où allons-nous, trouva comme réponse "En ce qui me concerne personnellement, je suis moi, je viens de chez moi, et j'y retourne".
Après un interlude en clin d'il cinématographique, filmé par David Weil, montrant l'envers du décor des "Employés du mois", la seconde partie reprend l'adaptation par J-B Plait de l'immense "Phèdre" de Racine qui fit, il y a quelques années, les beaux soirs du Tintamarre aujourd'hui disparu. On y voit Phèdre entreprendre activement le déniaisement de son beau-fils Hyppolite (on entend Racine se retourner dans sa tombe) lequel est follement déboussolé par Aricie (la sortie). Par contre, on échappe au fameux tunnel de Théramène (ta fraise), et on assiste à la mort d'Hyppolite (et de Phèdre) non pas provoquée par le monstre marin de Poséidon mais par l'absorption d'une boisson létale annoncée mine de rien avec des allusions au Beaujolais nouveau par les deux confidents (de sagesse) Sinusite et Pet de nonne.
Rien n'est plus difficile que de faire passer justement le burlesque. On tombe vite dans la platitude, comme on peut le voir, dans certaines émissions de télé très audimétriques. Les cinq comédiens, "Employés du mois", dirigés par Philippe Chauveau, nous emmènent dans un registre nettement supérieur avec des clins d'il qui ne sont pas là pour gonfler l'interprète mais pour faire vivre le personnage. Tout est parfaitement dans le ton, placements, expressions, voix (superbes !). Costumes... Tout, y compris le célèbre aphorisme de Pierre Dac qui termine (pouvait-on trouver mieux ?) cet énorme spectacle ; "Si, comme l'a dit un jour le Général de Gaulle, la France n'était pas ce qu'elle est, c'est-à-dire la France, tous les Français seraient des étrangers".
Raymond Finet
20, rue Théodore Deck 75015 Paris