Sur Xavier Bergeret, tous les témoignages s’accordent. On ne peut que faire l’éloge de ce garçon : affectueux, droit, simple. Il aimait Sophie, elle le trompait, ne l’aimait pas, semble-t-il. À moins qu’elle ne se soit mise à l’aimer lorsqu’il a commencé à se détacher d’elle ?
Fait divers. Une étudiante en médecine tue son ex-amant et camarade de faculté. L’appareil de justice se met en marche. Pourquoi a-t-elle fait ça ? Qui est-elle ?
Entre l’accusée et la Cour d’assises, un jeu ne se joue pas. La machine théâtrale de la justice patine. Elle tourne, mais à vide. Tout se passe comme s’il y avait, chez Sophie Auzanneau, un refus, ou une incapacité, à se couler dans le rôle qu’on lui demande de tenir. Quelque chose de réfractaire au théâtre.
Michel Vinaver
J’avais dans un carton d’archives les numéros du « Monde » où figurent les comptes rendus de ce procès. Je les avais conservés, ficelés, avec l’idée que ce serait un rendez-vous pour plus tard. De 1953 à 1984, j’ai su que j’avais un rendez-vous avec Pauline Dubuisson. Rendez-vous que je tiendrais ou ne tiendrais pas.
Je me suis donné pour consigne, dans l’écriture de Portrait d’une femme, de ne pas chercher d’autres sources que les comptes-rendus parus dans « Le Monde ». Et l’autre consigne que je m’étais donnée était d’inclure et d’insérer dans la pièce tout propos cité par qui que ce soit. De ne pas choisir. De ne pas sélectionner.
Je crois qu’il y avait une opacité du procès et du personnage qui me fascinait. […] Donc ce n’était pas une enquête sur les modalités du meurtre mais sur la personne de Pauline Dubuisson et de ceux qui l’entouraient, l’avocat, le juge… De qui s’agissait-il ?
Michel Vinaver
Partir de la spirale, d'un mouvement permanent qui entraîne la pensée, les choses de la pensée, les choscs de la pensée.
Tisser les fragments de vie de Sophie comme les méandres du cerveau.
Nouer, enchevêtrer, mais aussi démêler les fils qui vont, comme une toile d'araignée, construire le spectacle.
Tous les acteurs en scène, mais jamais en attente de jeu, toujours présents et mouvants comme des pensées obsessionnelles.
Inscrire ces mouvements dans un espace précis (le quadrillage) mais ouvert puisque multiple.
Donner au spectacteur l'illusion que l'histoire se construit dans l'instant, sous ses yeux et qu'il est dans l'événement à la même minute que les autres personnages, Sophie, ou le tribunal, comme les jurés dans un procès.
Suivre au plus près la construction de l'écriture de MIchel Vinaver. C'est l'écriture elle même qui entraîne la machine.
Rendre lisible pour le spectacteur la complexité de cette écriture tout en lui faisant accepter que le spectacle ne se constitue pas dans la linéarité mais dans l'assemblage, le puzzle, les frottements, qui entraîne la machine.
Depuis qu’il a écrit Portrait d’une femme, Michel Vinaver n’a jamais autorisé que cette pièce soit représentée ni à Paris, ni en Île-de-France… et ses motivations restent silencieuses. Telle est donc notre principale contrainte, à la naissance de ce projet ; tel est le mystère qui entoure celle qui, aujourd’hui encore, reste une pièce… d’exception.
Anne-Marie Lazarini
8, avenue Dolivet 92260 Fontenay-aux-Roses
Voiture : N 20 depuis porte d'Orléans - sortir à Bagneux.