Pouchkine

Bobigny (93)
du 11 au 12 mars 2005

Pouchkine

Spectacle musical en 5 tableaux. Pouchkine, revisité avec la musique inventée par d’autres descendants d’esclaves, les créoles américains. Pour rendre hommage au génial musicien de la langue russe (inventions sonores, répétitions, digressions, ruptures rythmiques), au poète frivole et si profond, au chantre de la liberté qui n’aimait rien tant que l’indépendance d’esprit et bravait la Russie autocratique de son temps.

Spectacle musical en 5 tableaux
Une distribution internationale

Pouchkine : le fondateur de la langue, de la nouvelle, du roman russes modernes, le « poète en soi » (comme disait Gogol), tient à lui seul dans son pays la place que se partageaient Shakespeare, Byron et Walter Scott dans la littérature anglaise. En Russie, on lui voue toujours un culte indéfectible, et le monde entier connaît l’écrivain (La Dame de Pique, Eugène Onéguine), le dramaturge (Boris Godounov), le personnage génial et subversif acquis aux idées des Lumières, au destin flamboyant, depuis ses nombreuses conquêtes féminines jusqu’à sa mort en duel dans la fleur de l’âge.

Mais Alexandre Pouchkine, né en 1799 dans une famille de la noblesse russe, était aussi l’arrière petit-fils d’un Africain célèbre dans l’histoire de son pays : Abraham « Hannibal » Petrovitch (1696-1781). Esclave originaire du bassin du lac Tchad (actuel Cameroun), Hannibal fut affranchi par le tsar Pierre le Grand qui en fit son filleul et lui permit de devenir le plus grand architecte militaire de l’Empire. D’où l’influence et l’attraction que Pouchkine, ce gentilhomme de sang-mêlé, a pu exercer sur les grandes figures du monde noir, qu’il s’agisse de W.E.B. DuBois, Paul Robeson, Langston Hugues, Richard Wright... Car, bien que Russe, l’écrivain a constamment interrogé ses racines africaines - lointaines, rêvées et très réelles - ce qu’elles signifiaient à l’aube des temps modernes, comment elles travaillaient cette modernité de l’intérieur. Et ce jusqu’à sa mort, qui l’empêcha de terminer la biographie qu’il avait entrepris de son bisaïeul Hannibal, « le Nègre de Pierre Le Grand ».

David Murray songeait depuis quelque temps à célébrer Pouchkine. Pour rendre hommage au génial musicien de la langue russe (inventions sonores, répétitions, digressions, ruptures rythmiques), au poète frivole et si profond, au chantre de la liberté qui n’aimait rien tant que l’indépendance d’esprit et bravait la Russie autocratique de son temps.

Un personnage fascinant avec lequel le musicien s’est beaucoup promené, en pensée ; il a cherché à réveiller le corps noir du poète, ce créole russe dont l’origine imaginée et fantasmée (« Sous le ciel de mon Afrique… ») fut un ingrédient essentiel de la vie d’homme et d’écrivain, et à rappeler cette identité de Pouchkine, si présente et pourtant « oubliée » jusqu’il y a peu.

D’où ce projet qui, entre la Russie, l’Afrique et l’Amérique, ouvre un territoire artistique -et historique- immense. Pouchkine, revisité avec la musique inventée par d’autres descendants d’esclaves, les créoles américains, qui ont en commun avec le créole russe d’incarner aux 19ème et 20ème siècles le « métis des grecs », tel que l’ont compris Etiemble et Jean-Pierre Vernant : celui qui répond par la ruse et l’inventivité à la violence de l’histoire - et la transforme en acte de création et de liberté, en art.

Une telle évocation -David l’imaginait presque comme une comédie musicale, sinon un opéra- offre un terrain où la musique s’avance vers quelque chose qui s’apparente au théâtre, où le théâtre peut faire un pas en direction de la musique. Xavier Lemettre, directeur de Banlieues Bleues en a parlé à Patrick Sommier, qui a proposé le metteur en scène Mathieu Bauer (L’Exercice a été profitable, Monsieur, d’après Serge Daney en 2004) pour « installer » sur scène ce spectacle musical en cinq tableaux.

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La distribution, spécialement réunie pour l'occasion, n’est pas sans évoquer l'expression de la "Great Black Music" dans toutes ses phases et facettes, carnavalesques ou savantes, séculaires ou sacrées, swing, bop ou free. A la fois compositeur de l'ensemble de la musique, et saxophoniste à la tête d’un quartette au nombre d'or, David Murray, qui s'est imposé internationalement comme l'un des principaux créateurs de jazz depuis les années 80, est aujourd'hui à l'apogée de sa carrière musicale. Il s'est entouré ici des plus grands noms : le pianiste John Hicks, le batteur Hamid Drake, son complice Craig Harris (cf. Banlieues Bleues 2004) « conducteur » de l'orchestre de cordes...

Et un « casting » vocal exceptionnel et polyglotte, avec deux incontournables voix africaines, l'angolais Bonga et la camerounaise Sally Nyolo, deux voix russes de grand talent, Elena Frolova et Victor Ponomarev, et dans le rôle haut en couleurs de Pouchkine, à la fois récitant et chanteur, l'acteur Avery Brooks, l'une des personnalités les plus en vue de la communauté afro-américaine.

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Spectacle terminé depuis le samedi 12 mars 2005

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