Feydeau, Renard, Courteline : trois auteurs contemporains qui traitent de l’adultère avec un génie comique singulier et une originalité surprenante. La preuve avec ce Triptyque de couples inédit où se mêle jalousie, lâcheté et séduction : l'énergie délirante de Feydeau, l'ironie subtile de Renard et l'humour féroce de Courteline.
Par la fenêtre de Georges Feydeau
Par la fenêtre est la première pièce de Feydeau, représentée à Paris en 1882. Tandis qu’Hector, avocat, s’apprête à déjeuner seul en l'absence de sa femme, Emma, sa voisine d’en face, débarque chez lui pour « donner une leçon à son mari », dont elle ne supporte plus la jalousie intempestive. Elle exige qu'Hector lui fasse la cour devant sa fenêtre ouverte afin d'être vue par son mari. Mais lorsqu'elle parvient à ses fins, Emma aperçoit ce dernier en tête à tête avec une femme. Furieuse, elle sort précipitamment pour « lui arracher les yeux ». Ayant retrouvé le calme, Hector regarde à son tour par la fenêtre et croit reconnaître son épouse dans la femme dînant avec le mari d'Emma, dont le retour impromptu lui apparaît comme une aubaine puisqu'il crie vengeance à son tour. Mais Emma lui révèle que la dîneuse en question est son ex-domestique, à qui sa femme a donné l'une de ses robes avant de la congédier, et tout rentre finalement dans l'ordre après ce double quiproquo.
Le Pain de ménage de Jules Renard
Avec Le Pain de ménage, Jules Renard obtient en 1898 l'un de ses plus grands succès théâtraux. Un couple marié, Berthe et Pierre, offre l’hospitalité à un autre couple, Marthe et Alfred. Les deux ménages sont unis et heureux. Après le dîner, Marthe et Pierre se retrouvent seuls et s'adonnent à leur « petit jeu préféré », qui consiste à parler d'amour en l'absence de leur conjoint, analysant leur bonheur conjugal plus ou moins « parfait », évoquant leurs rares tentations passées et surtout l'éventualité, toujours hypothétique, de commettre un adultère... Peu à peu, pris au piège de ce marivaudage, Pierre succombe à son besoin d'adorer en se livrant à une cour de plus en plus enflammée, à laquelle Marthe a bien du mal à résister. Mais le charmeur perd de son éloquence dès que Marthe lui demande concrètement où il veut l'emmener... Alors le charme tombe et la raison reprend ses droits, chacun promettant à l'autre de s'endormir chastement auprès de son conjoint.
La Peur des coups de Georges Courteline
Inspirée par la relation tumultueuse de Courteline avec sa première épouse, l'actrice Suzanne Berty, La Peur des coups est représentée pour la première fois en 1894. Un couple se dispute en rentrant du bal au petit matin. « Lui », fou de rage, n'a pas supporté que sa femme se laisse ouvertement courtiser par un officier et menace de donner suite à cette affaire. Excédée par sa lâcheté et sa mauvaise foi, « Elle » l’en défie à plusieurs reprises avant de lui donner la carte de l'officier pour qu'il puisse aller de suite « donner de son pied à ce monsieur ». « Lui » ne parvient finalement à sauver la face qu'en piquant une terrible colère, qui se conclut par un énième renvoi de la bonne et l'interdiction formelle faite à sa belle-mère de remettre les pieds chez lui.
L'envie de monter ce triptyque est d'abord née de ma rencontre avec les deux comédiens, Marina Valleix et Jean-Patrick Gauthier, et de notre intérêt commun pour la fin du XIXe siècle, période sur laquelle je travaille depuis de nombreuses années. Le premier élément qui m'a incité à réunir ces trois pièces est d'ordre thématique, puisqu'il s'agit de trois histoires de couple ou plus exactement de deux couples qui ne se font pas et d'un couple qui se dispute. L'adultère, thème si cher au théâtre de cette époque, y est évoqué avec cette originalité qu'il n'est pas consommé, malgré les tentations diverses...
En outre, ces pièces sont contemporaines de l'essai sur Le Rire publié en 1899 par Henri Bergson, où le philosophe définit trois principaux comiques : le comique de mouvement, le comique de mots et le comique de caractère. Il m’a dès lors paru logique d'orienter ma mise en scène sur la différenciation entre ces trois types de comique, dont Par la Fenêtre, Le Pain de ménage et La Peur de coups offrent d'excellentes illustrations.
J'ai donc cherché, avec les comédiens, à travailler différemment sur les trois pièces, afin de souligner leur singularité stylistique et dramaturgique et de montrer ce qui caractérise ces trois auteurs, trop souvent englobés dans la famille du « vaudeville » ou du « théâtre fin de siècle », appellations commodes mais ô combien approximatives... Fort de cette distinction, il a fallu trouver non pas une unité mais une continuité permettant d'assurer la cohérence du triptyque, que j’ai choisi de renforcer par une scénographie de « plein air ».
Plutôt que d'enfermer ces six personnages au sein d'un intérieur bourgeois où ils étouffent, j’ai tenu à leur offrir davantage d'espace, en les transposant dans un cadre contemporain et bucolique, afin de prouver qu'ils ne perdent rien de leurs qualités théâtrales en se risquant à l'exercice du plein air, à l'instar de leurs contemporains impressionnistes que Feydeau chérissait tant et auxquels il fait d'ailleurs référence dans sa pièce. J’ai ainsi voulu naturaliser le contexte sans dénaturer le texte.
L'enchaînement des trois pièces offre aussi une évolution temporelle qui sert de fil conducteur. D'abord par un jeu de lumières illustrant les trois heures du jour : l'heure du déjeuner pour les bourgeois de Feydeau, de la veillée à la nuit tombante pour les chasseurs de Renard et les « sept heures du matin » pour le couple de Courteline. L'accent est mis également sur le passage des saisons par différents effets sonores (le vent glacial du « mois de février », le brame des cerfs à l'automone et le chant printanier des oiseaux) et des effets visuels (l'entrée d'Emma amène des flocons de neige à l'intérieur du mobile home, Marthe et Pierre marchent sur des feuilles mortes et la tente d’« Elle » et « Lui » est entourée par quelques pots de fleurs).
Les costumes se veulent à l'unisson de cette alternance saisonnière tout en montrant une certaine distinction sociale entre les couples.
En plus de donner un supplément d'air à ces pièces, ce choix scénographique présente enfin l'avantage de pouvoir s'adapter à tout type de lieu.
Guillaume Peigné
Bon jeu d'acteurs. J'ai particulièrement bien aimé le jeu de séduction dans le Pain de ménage de Jules Renard.
Très bon moment, je recommande a tout les amoureux de théâtre! :)
Deux comédiens qui ont la pêche ! Tryptique ou l'on s'y projette. Nous avons bien aimé ☺
Pour 3 Notes
Bon jeu d'acteurs. J'ai particulièrement bien aimé le jeu de séduction dans le Pain de ménage de Jules Renard.
Très bon moment, je recommande a tout les amoureux de théâtre! :)
Deux comédiens qui ont la pêche ! Tryptique ou l'on s'y projette. Nous avons bien aimé ☺
6, rue de la Folie Méricourt 75011 Paris