En fond sonore, le chant des criquets, le coassement d'une grenouille. Nous sommes quelque part comme au fin fond de la Bresse. Ambiance marécageuse, couleur automne. Une lumière entre chien et loup pénètre à l'intérieur d'une cabane sale et encombrée. Là, trois hommes. Mathias, c’est celui qui chantonne assis dans un coin en découpant des contours de vedettes de cinéma dans un catalogue. Il a environ trente ans et paraît légèrement " simple " . Celui qui fait les cent pas en taillant un morceau de bois avec son grand couteau, c’est Buick. Plus jeune que Mathias, il s'impose en chef malgré sa nervosité. Au centre de la pièce, l’homme plutôt chic qui est attaché à une chaise, c'est Jean. Il a la trentaine certifiée. Malgré son inquiétude, il se dégage de lui une sorte d'air affirmé. Un charme travaillé à la manière des " Tropolipourêtrehonnête " ...
Après avoir installé les mots. J’aimerais maintenant inscrire leurs silences. Montrer tout ce qui ne se dit pas et se déclare en regard, en écoute. Afin d’obtenir une vérité touchante et drôle. Simple, mais surtout pas facile. Je demanderai aux acteurs de rester en direct avec la réalité. D’être aussi vrais que dans la vie. C’est-à-dire : Mentir, tricher, avoir peur, être lâches ou méchants. Aimer, en avoir le souvenir ou le manque. Ne rien comprendre, trop parler ou mal se taire. Au nom de l’humour plus que de la cruauté, je leur demanderai de laisser leurs personnages subir le temps qui passe avec les vraies secondes. D’oser les maintenir dans la gêne, l’angoisse et l’interrogation. Laisser défiler l’histoire au rythme d’un soir qui tombe sur ces personnages embourbés par le comique de la situation, afin d’obtenir un tout : tragiquement drôle, méchamment sincère et je l’espère, simplement juste.
Eliane Gallet
80, rue Villier de l'Isle Adam 75020 Paris