Des rires, 9 paroles, le sifflement d’une balle et le silence de Dieu…
Notes de mise en scène
La presse en parle
A mon âge, je me cache encore pour fumer est une tragi-comédie qui rassemble 9 femmes d’âges et de conditions diverses dans un hammam à Alger…
Elles sont là pour se laver mais surtout parler, se parler … Dans l’intimité de cet espace protégé de l’extérieur, les regards et les points de vue se croisent, entre pudeur et hardiesse, dans le dévoilement violent, ironique, drôle et grave, des silences refoulés de femmes qui se sont tues trop longtemps.
Peu à peu se révèlent leurs destins particuliers, à travers des histoires qui ont marqué et modelé leur chair, dévoilant progressivement la violence politique, sociale et sexuelle d’une Algérie en proie à la corruption, à la misère, aux attentats, aux combats quotidiens que se livrent les factions gouvernementales et les islamistes en utilisant la plupart du temps le corps de la femme comme champ de bataille.
Loin de tout regard accusateur, elles peuvent échanger états d’âmes, confidences, rêves, colères, joies, coups-bas ou petites mesquinerie, elle peuvent parler de morale, de religion, de sexe mais aussi de politique et bien sûr … débattre allégrement des hommes.
Un enfant s’apprête à venir au monde et par instinct et nécessité, toutes, d’une manière ou d’une autre se lèveront pour protéger et défendre cet être nouveau, leur espoir et projection dans la vie future à l’aube de la fin de l’intégrisme meurtrier.
9 femmes, 9 destins entre rébellion, rêve ou soumission. Mères, amantes ou « saintes », sont réunies au coeur de la matrice, le Hammam, ou le combat contre l’oppression, la violence, la guerre, se pense entre fous rires et pleurs, secret et exaltation.
L’une des grandes forces de ce texte, et également son originalité, est que Rayhana a réussi à traiter d’un sujet grave mais sans misérabilisme, sans complaisance, dans une écriture vivante, directe et très rythmée et souvent très drôle. L’émotion et le rire cohabitent en permanence dans un portrait bouleversant de l’Algérie contemporaine.
Tout ça donne, dans le désordre : des rires en rafale, un dentier oublié, un rêve de mariage étoilé, 8 grossesses imposées, le prix de la paix avec son homme, une marieuse pour fille vierge, le son de l'eau, une femme d'intérieur, un fils d'épicier à marier, un tremblement de terre, une terreur de souris, quatre limonades, une chanson d’amour, l’amour pour son homme, l'amour des hommes pour leur mère, une princesse mariée à 10 ans, un tronc d'arbre dans la main, un mari cocu, un certificat de virginité, les aboiements d'une belle mère, le mektoub de la belle fille, les rondeurs à cacher, un fils à l'asile, un autre stérile, une masseuse pétrisseuse, le fils de l'émigrée promis à marier, un frère vengeur du déshonneur de sa soeur, une mécréante et une pieuse, des brûlures à l'acide, des livres responsables / irresponsables, les fesses et le foulard de Dieu, un Imam assassin, le secours d'un hijab, le tajine et des cornes de gazelles, des langues qui se dénouent, un poulailler en furie, un plombier cagoulé, la peste et le choléra, le viol d'un homme et un vol de cigarettes, des rires, 9 paroles, le sifflement d’une balle et le silence de Dieu…
Le corps des femmes
Le thème du rapport entre l’intime et le pouvoir est un sujet que j’explore depuis quelques années dans mon travail de metteur en scène. A mon âge, je me cache encore pour fumer pousse la réflexion encore plus loin, où le pouvoir et la violence s’insinuent dans la chair des êtres et ici tout particulièrement des femmes. Le sexe même de la femme devient politique. Il n’est plus question de choix lorsque notre corps même dicte ce que nous sommes socialement, culturellement, religieusement, politiquement, notre rapport aux autres, au pouvoir, et nous relie à notre histoire collective.
A mon âge, je me cache encore pour fumer donne la parole à ces femmes, qui sont exclues parce qu’elles sont femmes. Et pourtant, ce sont elles qui assurent la continuité de la société dans laquelle elles vivent, comme si les hommes étaient en guerre et qu’elles devaient assurer la paix. Leur corps pour subir la guerre et la violence des hommes, leur coeur, leur courage et leur foi pour construire la paix. Comme si le fait de donner la vie faisait d’elles des protectrices instinctives et nécessaires pour protéger cette vie. Le corps des femmes est ce par quoi la violence des hommes arrive. Mais il est aussi le dernier rempart qui protège l’intime. Dans A mon âge, je me cache encore pour fumer, le corps de ces 9 femmes raconte ce qu’elles ont vécu, subi, mais elles semblent humainement et intiment moins abîmées que ce corps qu’elles ont utilisé comme protection. Leur force est restée intacte, leur désir de vie d’une force étonnante. Et la pièce raconte cela. Des femmes libres, fortes, dans un corps qui les a condamnée. Et si le hammam était justement ce lieu où les femmes retrouvaient ce rapport sain, sensuel, généreux avec leur propre corps. Et cette cérémonie de la réconciliation se fait à travers les mains et le corps d’autres femmes.
Une déclaration d’amour à l’Algérie
A mon âge, je me cache encore pour fumer parle aussi de ce lien à la fois magnifique et douloureux que l’on peut entretenir avec la patrie que l’on a été obligé de fuir. Même si des événements récents ont donné toutes les raisons objectives de partir, la patrie reste le lieu de nos origines, de l’histoire dont nous sommes le fruit, de l’histoire de nos parents, de notre enfance. Une patrie qui a été source de souffrance mais que l’on ne peut s’empêcher d’aimer profondément. Une histoire difficile mais qui reste, malgré tout, notre histoire. Si Rayhana condamne certains aspects de l’histoire récente de l’Algérie, le portrait qu’elle fait de ces femmes est pour moi une déclaration d’amour.
L’ombre de la France
La France est omniprésente dans ce portrait contemporain de l’Algérie. Terre d’asile naturelle et historique pour fuir les violences quotidiennes, la France attire pour l’espoir d’un avenir meilleur qu’elle suscite. Mais elle offre aussi un visage plus sombre : celui d’une terre d’accueil qui a échoué dans l’intégration de ses étrangers, terre de souffrances qui engloutit les amants, sépare les familles et transforme les frères en fanatiques. Et ces femmes ont sur ce pays un regard lucide et même temps chargé d’espoir. Et c’est peut-être cela qui caractérise les femmes d’Algérie : une lucidité étonnante sur le monde dans lequel elles vivent et en même temps une foi insolente en l’avenir.
Bien sûr, A mon âge, je me cache encore pour fumer parle de l’Algérie, de l’Islam, du statut des femmes dans certains pays arabes, mais la pièce traite surtout de vie, de la force et de la beauté des femmes, de solidarité.
Entre légèreté et gravité
Pour porter cette histoire, j’ai choisi des comédiennes qui ont, bien entendu, l’âge des personnages, mais qui ne sont pas toutes d’origine maghrébine. Bien qu’étroitement lié à l’Algérie, A mon âge, je me cache encore pour fumer est avant tout un portrait universel de femmes et je souhaite conserver cette dimension à travers, entre autre, ce choix de distribution. La direction d’acteur est précise, essentiellement centrée sur le rythme, la vivacité et l’humour avec des ruptures franches pour permettre à l’émotion d’exister pleinement. La gravité cohabite en permanence avec la légèreté, la drôlerie et la générosité de ces femmes et ce passage dynamique de l’un à l’autre donne la note générale du spectacle.
Une chorégraphie des corps
L’espace dans lequel évoluent les comédiennes est un plateau nu et ne conserve du hammam que quelques accessoires comme des tabourets et quelques bassines. La grande salle chaude est marquée par un grand rectangle de lumière au sol, dont les couleurs et textures évoluent en même temps que l’action, notamment grâce au travail vidéo de Bastien Capela. Au fond du plateau, un grand cyclo permettra, grâceà la lumière, d’ouvrir l’espace pour la dernière scène. Les costumes sont des pagnes, des robes très légères que les femmes portent dans les hammams. La matière particulière du tissu donne l’impression que ces vêtements sont mouillés et adhèrent à la peau. Il y a peu de nudité.
Jazz contemporain et diwane traditionnel
La bande son est constituée de morceaux de Arve Henriksen, trompettiste et compositeur norvégien qui compose un jazz contemporain, et dont l’utilisation étonnante de la trompette donne à son travail des couleurs orientales. Les autres morceaux sont du groupe algérien Gaâda Diwane de Béchar, qui joue le Diwane des villes du Maghreb, mêlant et tissant tour à tour des rythmes arabo-bèrbères, des chants mystiques traditionnels, des sonorités africaines et des fresques musicales colorées de blues.
« Rayhana dessine ces 9 portraits avec des traits justes assez appuyés pour dire l’insupportable condition féminine, et la dignité et le courage de celles qui résistent. Pourtant, il ressort des cette pièce une liberté de ton insolente, une énergie vitale presque joyeuse, une rage de vivre qu’il faut entendre au nom de toutes les femmes qui combattent pour défendre leur dignité envers et contre tout. » C. Denailles, Webthea.com
« Neuf femmes, neuf voix, entre fous rires et larmes, parlent pour briser les murs entre lesquels on veut les cloîtrer. Un humour ravageur et contagieux. Les neuf actrices incarnent savoureusement ces personnages typés, bien trempés, jouent et s’emparent des truculences du texte sans faux-semblants, avec une sincérité qui fait mouche. Rayhana dresse un réquisitoire implacable contre les intégrismes et la lâcheté. La mise en scène de Fabian Chappuis épouse les méandres de ces confidences polyphoniques. Elle parvient à canaliser ce flot de paroles dans une chorégraphie des corps et des voix. » M.J Sirach, l’Humanité
« Une œuvre coup de poing qui dénonce les violences politiques, sociales et sexuelles. Un texte tout à tour révoltant et hilarant qui célèbre la femme maghrébine. Des femmes si lumineuses et dignes dans leur combat vers la liberté. » C. Chaory, Jeune Afrique
« L’écriture de Rayhana est truculente, tendre est drôle. Tous ces personnages possèdent une combativité et une force qui pourraient surprendre bien des occidentales « libérées ». Un spectacle tonique et réjouissant. » S. Bernard-Guesh, Télérama (TT)
« Fabian Chappuis a réalisé un travail pointu, précis et d’une belle finesse. La carte qu’il abat en toute délicatesse et celle d’une judicieuse sobriété. Toutes les comédiennes sont excellentes, Marie Augereau bouleversante. » D. Denorme, Pariscope
« Toutes les comédiennes font preuve d’un vrai et émouvant talent dans cette pièce à la choralité harmonieuse. A travers des récits poignants ou drôles, toutes parviennent à donner à leur rôle une épaisseur et un intérêt véritables. Le spectacle parvient à équilibrer avec élégance émotion et humour et constitue un bel hommage à l’art d’être femme par temps lourds. » C. Robert, La Terrasse
« Excellente mise en scène de Fabian Chappuis. Le hammam devient un lieu sans contours où l’âme est aussi visible que le corps. La fureur et la terreur vous sautent au visage en même temps qu’un amour désespéré. » G. Costaz, Politis
« Fabian Chappuis souligne délicatement cet inframonde où l’humour le dispute sans cesse à la tragédie. » M. Hajoui, A nous Paris (****)
« La pièce de Rayhana est drôle, poignante et tendre. Les actrices, toutes formidables, méritent un concert de youyous. » J. Nerson, Nouvel Observateur (**)
« Il y a un rythme, un sens des dialogues naturels, savoureux, des confidences audacieuses, une liberté de ton. Tout cela fait de ce spectacle un moment fort et original, très courageux, émouvant et drôle. » A. Héliot, Le Figaro
« Les spectateurs en ressortent tourneboulés, les larmes aux yeux. La force de cette pièce est de transformer du tragique en éclat de rire. » D. Arnaud, Libération
« Un vrai art du dialogue, de très fortes situations, de très bonnes comédiennes, un excellent spectacle. » Le Masque et la plume, France Inter
« Un théâtre profondément ancré dans la parole, qui en oscillant entre humour et gravité dessine avec volonté et détermination une féminité aux multiples facettes. » C. Châtelet, Théâtre on line
« Un réquisitoire et un chant de résistance. Une véritable mise à nu dans un langage cru et direct. La liberté et l’intelligence de ces femmes, leur apprentissage de l’audace, leurs échanges chaleureux, leur complicité et leur maturité sociale et politique impressionnent. » J.C Rongeras, France2.fr
« Plaidoirie et témoignage dans cet obscurantisme ambiant, âpre, virulent, corrosif, chargé d’un humour caustique, tonique, décapant avec des moments d’une curieuse poésie. Des comédiennes au-dessus de tout éloge, un mise en scène tout en teintes nuancées. » Edgar Davidian, L'Orient Le Jour – Liban
Vraiment bien. Drôle, émouvant, sérieux, futile, bref féminin. Cette pièce explore toutes les états de la conditions féminine Musulmane (et c'est souvent pas enviable hélas). Ces femmes sont belles, fortes, aimantés et attachantes. Beau spectacle à recommmander, surtout aux hommes!!
Vraiment bien. Drôle, émouvant, sérieux, futile, bref féminin. Cette pièce explore toutes les états de la conditions féminine Musulmane (et c'est souvent pas enviable hélas). Ces femmes sont belles, fortes, aimantés et attachantes. Beau spectacle à recommmander, surtout aux hommes!!
20 rue de la liberté 94102 Saint-Maur-des-Fossés
Voiture : prendre l’A4, sortie n°4 Joinville, Saint-Maur, et toujours tout droit, après Joinville, Bd Maurice Bertheaux, rue de la Varenne (à gauche après le lycée Berthelot), Bd Rabelais, avenue Foch et après le carrefour du 8 mai 45 à droite rue de la réunion et à gauche en suivant les panneaux.
Parking gratuit et couvert au niveau du 47 avenue Miss Cavell. 130 places, sans ascenseur.