Boris Vian - Juste le temps de vivre

Du théâtre en chansons pour redécouvrir un Boris Vian plus jeune et actuel que jamais. Un grand souffle de liberté.

Mort en 1959 à 39 ans, il est reconnu par la jeunesse de mai 68 comme l’un des siens. Aujourd’hui, alors que l’on fête le cinquantenaire de sa mort, il n’a jamais été si proche de nous.

• Un amoureux fou de la vie

Juste le temps de vivre est le troisième volet d’un travail musical autour des écrivains. Après Bertolt Brecht (Belles de Brecht) et Colette (Belles Vagabondes), c’est avec Boris Vian que nous avons eu envie de faire un bout de chemin. Sous la direction de Jean-Louis Jacopin, ils sont trois sur scène, deux filles et un garçon, tous trois chanteurs, musiciens et acteurs, à faire revivre cet éternel jeune homme au sourire lumineux. Avec beaucoup d’humour, Jean-Louis Jacopin a imaginé uneémission de radio des années 50, dans laquelle les mots de Vian se baladent en toute liberté.

Juste le temps de vivre est un spectacle qui fait la part belle à la chanson. Boris Vian en a écrit des centaines. La plupart n’ont pas pris une ride et influencent encore les chanteurs d’aujourd’hui. « Un jour viendra, comme dit l’autre, où les chiens auront besoin de leur queue et tous les publics des chansons de Boris Vian. » Hommage d’un autre grand de la chanson, Georges Brassens.

Aux chansons se mêlent poèmes, pages de roman – de L’Écume des jours à J’irai cracher sur vos tombes – et extraits du sulfureux et quasi inconnu Traité de civisme.

Funambule provoquant et tendre, jongleur de mots et d’idées, cet écorché vif, obsédé par l’usure du temps – « Que tu es impatiente la mort !, – est un amoureux fou de la vie. Elle est un bien trop précieux et trop fragile pour être sacrifiée à ceux qui veulent nous boucler dans une société-prison où « de haut en bas on normalise ». Dans un grand éclat de rire, il jette à la trappe – comme Jarry avant lui – les marchands de canons, de religions et tous ceux qui font du travail une valeur sacrée tout en exploitant les plus faibles.

« Adieu, monde trop vieux », dit-il dans une de ses plus belles chansons en s’envolant loin de notre planète hurlante. De là-haut, tel Pierrot sur son croissant de lune, il nous regarde et doit bien rigoler.

François Bourgeat

• Ça n’est pas fini !

25 Décembre 1948, Francis Blanche qui a 27 ans vient d’écrire « Vive le vent d’hiver ! » Partout on chante :

Vive le vent, vive le vent Vive le vent d’hiver Qui s’en va sifflant, soufflant Dans les grands sapins verts.

Pendant ce temps, Vian, qui, lui, a 28 ans, souffle dans sa trompinette. Et le vent, le vent qui siffle dans les branches du boulevard Saint-Germain, ça l’épate tellement d’entendre le Boris, qu’il y perd le i de son sifflet qui vole au Vian. Et du coup le vent se met à souffler :

Vive le Vian, vive le Vian Vive le Vian divers Qui rapporte aux vieux enfants Leurs souvenirs d’hier.

Une jeune fille de 16 ans qui vient de débuter comme chanteuse de cabaret et qui passait par là, entendant les paroles du vent et parce que c’est Noël, se mit à chanter avec lui. Et c’est ainsi que Magali chantera Vian.
Tant d’autres après elle le chanteront ! Et ça n’est pas fini ! La preuve, avec Juste le temps de vivre, nous prenons la relève pour que les souvenirs d’hier deviennent, avec impertinence, les réalités de demain.
Et le Boris il est où pendant ce temps là ? Au paradis bien sûr. Et là-haut il paraît qu’il joue aux dés Vian.
Au déviant ?
Pardon Monsieur le Président, Eau d’Evian !

Jean-Louis Jacobin