Le dernier programme comporte des effets stroboscopiques, et des scènes explicites ne convenant pas à des jeunes de moins de 12 ans.
Quatre pièces au même programme
Célébration du centenaire des Ballets russes
Les pièces
Initiés en 1909 par Serge de Diaghilev, les Ballets russes ont révolutionné l’art de la danse. Cent ans plus tard, quatre chorégraphes détonants rendent un hommage explosif à cette aventure artistique unique.
Le Sadler’s Wells de Londres a passé commande d’oeuvres originales auprès de Wayne McGregor, Russell Maliphant, Sidi Larbi Cherkaoui et Javier De Frutos, fleurons de la danse actuelle, pour rendre un vibrant hommage aux Ballets russes de Diaghilev, Nijinsky et Fokine. S’y confrontent les styles de chacun : virtuosité graphique et musicalité pour McGregor, fluidité du mouvement pour Maliphant, animalité empruntée à la figure du faune chez Cherkaoui ou excentricité d’une fable à danser chez De Frutos. Avec, pour chacun, tout ou partie de sa propre compagnie, notre bande des quatre répondra, à sa façon, à la célèbre injonction qu’un jour lança Jean Cocteau à Diaghilev : « Étonnez-moi ! ».
Philippe Noisette
Programme : Dyad - entracte - After Light - pause - Faun - entracte - Eternal damnation to Sancho and Sanchez.
Wayne McGregor - Dyad 1909
lumière Lucy Carter
film Jane & Louise Wilson
costumes Mortiz Junge
avec 10 danseurs de Wayne McGregor | Random Dance
Russell Maliphant - AfterLight
musique Andy Cowton
lumière Michael Hulls
avec 3 danseurs
Sidi Larbi Cherkaoui - Faun
musique Claude Debussy
lumière Adam Carée
avec 2 danseurs
Javier De Frutos - Eternal Damnation to Sancho and Sanchez
musique Maurice Ravel (La Valse)
scénographie Katrina Lindsay
lumière Michael Hulls
avec 6 danseurs
En cette année de nombreux hommages aux Ballets russes, la scène londonienne du Sadler’s Wells a choisi d'évoquer l’essence même de cette compagnie révolutionnaire. Non pas en tentant de rejouer les spectacles de l’époque, mais en reprenant la démarche résolument novatrice de ces artistes pionniers, leur goût enthousiaste pour la modernité et leur volonté de créer au-delà des genres, au carrefour des disciplines et des écoles.
Les Ballets russes se jouaient de toutes les conventions pour mieux en imposer de nouvelles. Ils créaient ainsi une nouvelle donne. Leurs spectacles étaient conçus dans un esprit de grande collaboration par un petit groupe d'artistes proches, unis par la volonté d'offrir à la danse une esthétique moderniste qui puisse véritablement la placer parmi les beaux-arts.
Fondamentalement expérimentale, la compagnie des Ballets russes faisait appel au génie des plus importants peintres de l'époque, parmi lesquels Picasso et Matisse. Ceux-ci travaillèrent avec les compositeurs, les chorégraphes et les danseurs à la réalisation de productions à la pointe de l'innovation créative, chaque saison pendant deux décennies.
Cent ans plus tard, le Sadler’s Wells poursuit cette tradition en invitant quatre artistes déjà étroitement associés à ses productions à composer une soirée de danse actuelle. Wayne McGregor, Russell Maliphant, Sidi Larbi Cherkaoui et Javier De Frutos proposeront ainsi de nouvelles pièces inspirées par les Ballets russes et leurs idéaux. Ces quatre grands artistes d'aujourd'hui ont imaginé l’art chorégraphique du XXIe siècle. Tout comme Serge de Diaghilev et ses Ballets russes avaient redéfini le ballet et la danse à l’aube du XXe siècle.
Wayne McGregor - Dyad 1909
Pour Serge de Diaghilev, sa compagnie des Ballets russes était dévouée à des spectacles « totaux ». La danse, la musique, les arts visuels, la littérature et la philosophie s'y trouvaient placés à égalité. La collaboration entre les artistes et la complémentarité des disciplines représentaient tout à la fois un idéal et un modèle nouveau. Concevoir des dessins, des décors ou des costumes pour la compagnie était l'ambition de nombreux artistes d’avant-garde. Picasso, Matisse, Braque, Ernst et Miro, parmi d’autres, appréciaient la chance de participer à un projet des Ballets russes. Wayne McGregor, baigné dans le monde virtuel, s’intéresse particulièrement aux effets de la technologie sur la danse. Il alterne les collaborations pour la scène et l’écran. Dans son travail de chorégraphe, il a collaboré avec des personnes venues de tous les horizons : des designers, des compositeurs ou encore des scientifiques, spécialistes du cerveau ou du coeur.
En répétition tout particulièrement, c’est toujours une relation de collaboration que je demande. Je travaille avec des individus et mon désir est de créer à partir de leur individualité. Plus les rencontres sont variées, plus le spectacle bénéficie de leur perception, de leur intelligence, de leur sensibilité et de leur imagination.
Dans Dyad 1909, Wayne McGregor part de l’année de création des Ballets russes. Il convoque les événements historiques, politiques et scientifiques qui agitaient le monde ainsi que leur influence sur les artistes et les créateurs de l’époque. Sur une partition de Graham Fitkin spécialement composée pour le spectacle, il travaillera avec Jane et Louise Wilson, deux artistes vidéo particulièrement réputées, dont les installations à l’atmosphère électrisante cherchent à concrétiser l’inconscient par la lumière et les ombres.
Russell Maliphant - AfterLight
Toute sa vie, Vaslav Nijinski a peint et dessiné des centaines de croquis et de tableaux abstraits, principalement des formes géométriques et circulaires, avec souvent, au centre, un oeil stylisé. Russell Maliphant s’est intéressé à l’idée de flux, de circulation, évidente dans ces formes aussi bien que dans les portraits photographiques de Nijinski.
Sur les photos de Nijinski, on reconnaît une attitude, un maintien particulier et une palette d’expressions qui m'intéressent particulièrement. Cette dynamique, ce flux, je les retrouve dans les peintures de Nijinski. Avec les photos, ce sera le point de départ et l'inspiration de notre recherche.
Russell Maliphant a créé un langage chorégraphique distinct qui intègre des mouvements de la danse classique, de la danse contemporaine, du yoga et des arts martiaux. Son étroite collaboration avec le créateur de lumières Michael Hulls et le compositeur Andy Cowton a produit des pièces remarquables qui travaillent l'interaction du mouvement, de la lumière et de la musique.
Sidi Larbi Cherkaoui - Faun
Tant pis ! Vers le bonheur d'autres m'entraîneront
Par leur tresse nouée aux cornes de mon front :
Tu sais, ma passion, que, pourpre et déjà mûre,
Chaque grenade éclate et d'abeilles murmure ;
Et notre sang, épris de qui le va saisir,
Coule pour tout l'essaim éternel du désir.
Un faune : un petit diable, esprit de la forêt, à la tête d'homme mais aux cornes animales. Des sabots pour danser, des mains pour jouer de sa flûte. Sa musique enchante ou bien rend fou... C'est à la recherche de cette créature que Sidi Larbi Cherkaoui se lance avec un duo dansé par deux membres de sa compagnie, James O'Hara et Daisy Phillips. Son Faun réinventera le mythe, personnage hybride et indéfinissable plein de sensualité et de désir, doté du pouvoir de faire apparaître les fruits de son imagination.
Après Myth et Sutra, Sidi Larbi Cherkaoui poursuit son travail sur l'animalité du mouvement humain et l'influence des récits mythologiques sur notre conception du monde. Il reprend donc à sa manière singulière l'épopée de ce certain faune, conçu par Mallarmé dans le poème éponyme, mis en musique par Debussy et immortalisé par la chorégraphie de Nijinski.
Javier De Frutos - Eternal Damnation to Sancho and Sanchez
Bien souvent je me suis demandé où en seraient les croisements entre disciplines artistiques si Serge de Diaghilev n'était pas mort, emportant dans sa tombe son talent de marieur créatif... Je me suis donc rendu en pèlerinage imaginaire sur sa tombe, dans l'île de San Michele à Venise. Je suis allé lui demander conseil. Et il m'a répondu : « Pour trouver la Beauté, il te faut tuer la Bête. » De là est venue cette histoire dans laquelle Apollon est provoqué par Sancho et Sanchez, un monstre bicéphale qu'il faudra anéantir lors d'une danse rituelle macabre pour que la Beauté triomphe et qu'Apollon et ses muses atteignent le Paradis. Cette fable édifiante est inspirée par des écrits de Cocteau. Elle fait écho à la fameuse injonction de Diaghilev aux artistes : « Etonnez-moi ! »
Javier de Frutos, chorégraphe qui a obtenu l'Oliver Award, fait ici équipe avec la décoratrice de théâtre Katrina Lyndsey et le créateur lumières Michael Hulls pour s'inspirer de scénarios et de dessins de Jean Cocteau pour les Ballets russes. Eternal Damnation to Sancho and Sanchez imagine ce que Cocteau aurait proposé s'il avait conçu la pièce lui-même. Au coeur de ce travail, La Valse de Maurice Ravel, danse macabre par excellence, partition commanditée pour les Ballets russes par Diaghilev mais refusée par lui à cause de son esprit sinistre qu'il jugea « impossible à danser ».
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