Le ton est donné, et l’archétype du gay peut se rhabiller. L’homosexuel du Marais, à slip Calvin Klein et teint orangé, n’intéresse pas les mauvais génies de ce nouveau Tour de pédalos ; cabaret éclaté, galerie de portraits déjantés, les artistes lèvent le voile sur l’homo condamné en Afrique ou au Moyen-Orient, comme sur le pédé honteux d’une bourgeoisie archaïque.
Tout y passe. Numéros trashs, défilés de monstres, chansons dures ou douces, Les pédalos prônent le tir à vue sur les nouveaux moralisateurs de la jeune classe politique, les amalgames puants et l’homophobie latente. Comment vivre gay, si serré dans sa tête et son boxer ? Comment survivre dans les banlieues, face à un Islam intégriste ou à une mère juive ? Et le mariage, l’adoption, l’homoparentalité ?
Il y a trente ans, en complicité avec Jean-Michel Ribes, Alain Marcel et ses complices triomphaient dans Essayez donc nos pédalos, coup-de-poing dans le bas-ventre des idées reçues. En France ou off-Broadway, ces premiers Pédalos répondaient en 1979 aux préjugés véhiculés par le succès de La Cage aux folles. Ils tordaient le cou à une middle class rance qui confondait déjà pédé et pédophile, sexualité et maladie. « Nous les tantes », chantaient-ils en choeur.
Autre temps, autres moeurs. À nouveau dirigée par Alain Marcel, auteur entre autres de L’Opéra de Sarah (Molière 2009 du théâtre musical), une nouvelle bande de doux dingues bariolés s’attaque à une France autrement moisie, où les stéréotypes plus rétrogrades que jamais font encore fureur. Objet provocateur, insolent et salubre, Encore un tour de pédalos travaille au corps le retour en force de l’hypocrisie sournoise et de la bonne marche à suivre. Vulgaire et raffiné, sensible et explosif, hargneux et caressant ; monstrueusement gay.
Avenue de Marigny 75008 Paris