La Tragédie du savant est un travail sur le mythe de Faust, ses images et ses représentations. Elle emprunte sa structure générale au texte de Goethe, mais puise aussi dans d’autres versions : celle de Pessoa, en particulier, et celle de Marlowe. La tragédie se noue en cinq épisodes : la bibliothèque idéale ; la tentation du suicide ; le pacte ; l’amour ; la fête. Le drame de Faust naît de son rapport au savoir : sa quête bute sans cesse sur les infranchissables limites du cerveau, et l’insondable mystère de la mort. Alors il passe un pacte avec le Diable pour outrepasser les frontières humaines. C’est ce défi qui m’intéresse, signe de son désespoir et de son appétit. A une époque où le savoir est mis en doute, où les intellectuels sont méprisés ou ignorés, il me semblait urgent de mettre en scène, à travers Faust, notre rapport à la connaissance.
Il s’agit de partir des corps. Cette Tragédie du savant doit s’écrire sur la scène, en réinventant le texte de Faust. A la façon d’une chorégraphie elle sera partiellement composée en répétition. Sur scène les acteurs vont s’emparer des personnages, des mots et des atmosphères comme autant de vêtements épars dont ils se couvriront un instant. Ils joueront, au sens où des enfants jouent : à être quelqu’un d’autre, à vivre des situations, à amener les spectateurs jusqu’au bord des apparences. A entendre la tragédie de Faust, sans plonger totalement dans l’illusion théâtrale.
Catherine Marnas
Qui est Faust ? Comme tout mythe il est un personnage multiple, évolutif, aux significations changeantes. Et comme tout mythe, il nous parle d’une quête universelle : celle de la connaissance et de l’absolu. Les péripéties qu’il traverse varient selon les auteurs : son pacte avec le Diable, ses amours avec Marguerite, son désir de richesse et son rajeunissement en sont les étapes les plus courantes. Pourtant si certains le condamnent à l’Enfer, d’autres lui accordent une rédemption mystérieuse qu’il doit à l’amour, au remords, à la noblesse de sa quête ou à l’absolue clémence de Dieu. Mais quel que soit son destin, son enthousiasme pour la science cache sans doute une tentation diabolique : dans le Jardin d’Eden le fruit défendu était, déjà, celui de la connaissance…
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