Funny birds

Il y a longtemps, Aristophane rêva d’une cité utopique, délivrée de toute corruption  ; il écrivit Les Oiseaux. Funny Birds a le même espoir pour aujourd’hui, on sent que ce n’est pas gagné.
Il y a longtemps, Aristophane rêva d’une cité utopique, délivrée de toute corruption  ; il écrivit Les Oiseaux. Funny Birds a le même espoir pour aujourd’hui, on sent que ce n’est pas gagné.
  • Cité utopique

Il y a longtemps, Aristophane rêva d’une cité utopique, délivrée de toute corruption  ; il écrivit Les Oiseaux. Funny Birds a le même espoir pour aujourd’hui, on sent que ce n’est pas gagné.

Une meute d’êtres étranges, costumés et cravatés, trouvent deux euros et, improvisant librement, en font dix, cent, cent mille. Évidemment, l’argent aidant, tout se dérègle et les pires pulsions explosent. Funny Birds pourrait donc bien s’achever sur une note savoureusement inquiétante et un grand cri animal  : « Ce que je veux vraiment c’est leur arracher le cœur et le manger avant qu’ils meurent. »

  • Entretien avec Lucie Valon

Funny Birds semble monter ensemble des références antiques et des réalités contemporaines. Comment se fait le montage entre ces mondes ?
Les références antiques se font malgré moi. Peut-être parce que les mythes grecs ont à voir avec le théâtre, ils étaient transmis par des poètes, sans église, ni dogme… ils sont toujours présents quelque part, comme une quête, une force, quelque chose qui vous tient quand vous ne savez plus où chercher. Nous pouvons nous lire dans les mythes et c’est là où nous sommes finalement le moins moche. Quand on traite de notre monde contemporain, ça aide.

D’où vous est venue l’idée de ce montage entre la finance et la Grèce antique ?
Il n’y a pas de montage entre la pièce d’Aristophane Les Oiseaux – qui a inspiré le titre du spectacle – et Funny birds. Ce qui m’a plu dans cette pièce ce sont les deux protagonistes principaux. Ils ne sont pas très nets, ils cherchent à échapper aux taxes et pour ce faire colonisent le ciel. Les héros ne sont pas très recommandables. Disons que cette pièce a été le déclencheur du projet, mais on ne peut pas dire qu’il en reste quoi que ce soit dans notre pièce à nous. Notre spectacle débute avec la crise des subprimes et il est nourri de lectures et de recherches sur la crise que nous vivons. Il y a de drôles d’oiseaux qui rôdent mais ce serait plutôt des vautours.

Il semble que Funny Birds soit un spectacle très critique à l’égard du monde actuel. Quel est votre « ennemi » ? (le capital par exemple ?)
Je n’ai pas cette prétention, le capital n’est pas mon ennemi. L’impunité oui, le mépris pour les classes inférieures, pour les citoyens qui payent simplement leurs impôts, la condescendance et le populisme. Ce n’est pas une critique que nous faisons, c’est un constat. Que dire d’un monde qui n’a pas de perspective valable à proposer, où l’avenir pour nos enfants sera plus dur que celui que nos parents nous ont laissé ? Dès qu’un projet est trop engagé, on nous demande à nous, les artistes, de parler d’autre chose, de faire rêver les gens, de les sortir de leur quotidien mais il y a un quotidien qu’il est urgent de prendre à bras le corps et de raconter autrement.

Pensez-vous que la scène puisse toujours avoir un rôle politique aujourd’hui ?
Oui, mais que veut dire rôle politique dans votre question ? Changer quelque chose ? Nous tentons de rendre palpable un malaise, rendre physique une sensation diffuse d’impuissance et d’humiliation, donner corps au carnaval critique qui nous manque. Et puis le politique évite souvent le psychologique, c’est un outil qui permet de sortir de la petite histoire qui ne dérange finalement personne. Nous cherchons aussi dans le rire ce qu’il peut avoir de subversif et c’est un chalenge que d’aborder la finance de façon détournée et poétique autant que faire se peut. Nous voulons que ça ne soit pas didactique et comment ne pas l’être sans être simpliste ? C’est sur ce fil que nous évoluons.

Comment s’est construit le spectacle ? Y a-t-il une narration préexistante qui vous aide à construire l’ensemble ? Ou le spectacle s’est-il écrit au plateau ?
Nous avons d’abord travaillé pour le plaisir entre amis, dans une recherche pure autour du clown puis lors d’une résidence à Nanterre où nous avions décidé de diriger le travail sur l’impunité et le cannibalisme, la crise des subprimes a commencé à devenir publique et tout s’est accéléré. Nous sommes partis sur beaucoup de pistes mais certaines improvisations se sont vite sélectionnées d’elles-mêmes et sont restées une part du travail. Si tout a été improvisé, il est probable qu’à la fin tout soit réglé au cordeau tout en gardant une marge imprévisible : là est la spécificité de ce travail.

Jouez-vous de l’improvisation, et comment ?
C’est la base de l’écriture. L’ensemble de l’équipe se plonge dans cette recherche ; dès lors les improvisations sont nourries de façon collective par différents matériaux (livres, documentaires, sons, films, articles etc.) et par l’intérêt commun d’explorer le thème. Cela permet des échanges, des confrontations. Les acteurs sont au centre du dispositif et l’écriture se mène par couches successives, comme autant d’allers-retours entre le plateau et la table. Ensuite le texte se définit peu à peu.

Funny Birds raconte les aventures de six clowns. Pourquoi des clowns ? Êtes-vous intéressée par une tradition de clown plus que par une autre ?
Notre travail est sur la frange, en tout cas les Funny Birds ne sont pas des clowns traditionnels, notre travail ne se construit pas vraiment dans cette ligne là. Dans Funny Birds il n’y a pas de performances à proprement parler, de numéros d’acteurs, c’est un projet choral où l’étrangeté prime afin de questionner la norme. Ce n’est pas que du divertissement même si je tiens à ce que ce soit le plus accessible possible.

Le monde moderne, celui des subprimes, sera-t-il présent par un travail sur la scénographie ?
La scénographie sera simple mais elle sera moderne dans le sens ou elle nous rappellera des espaces d’esthétique contemporaine. Mais il n’y aura pas de tapis roulants, ni de vidéos ! ! !

Vous avez monté une version de La Divine comédie de Dante. Aujourd’hui, vous vous intéressez à la multiplication de l’argent. Il semble que vous soyez très intéressée par une sorte de théâtre qui déborde de la scène ou l’amplifie. Est-ce une bonne façon de décrire votre travail ?
On ne peut pas dire que nous ayons monté de version de la Divine comédie, nous nous sommes inspirés de la description que fait Dante de lui-même, comme d’un être maladroit qui ne fait que des gaffes en parcourant les cercles de l’enfer du purgatoire et du paradis ; une sorte de clown. Dans notre triptyque nous avons choisi trois figures clownesques pour parcourir trois mondes qui pourraient évoquer un enfer, un purgatoire et un paradis. Mais j’aime beaucoup votre mot déborder. La frange, le contour, la marge, l’à-côté, mais déborder convient très bien à ce spectacle, j’aimerais beaucoup y arriver. Le débordement aujourd’hui est souvent traité par la provocation. Nous essaierons de ne pas les confondre.

Propos recueillis par Stéphane Bouquet, novembre 2016

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Spectacle terminé depuis le vendredi 28 avril 2017

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