Une traversée romantique
Une allégorie autobiographique
La grâce et la sincérité
La presse
Répudié par ses parents parce qu’il n’est pas de leur couleur, moqué pour sa voix qu’aucun de ses congénères n’apprécie, ballotté par le vent depuis une gouttière du Marais jusqu’au bois de Mortefontaine, un jeune oiseau s’interroge sur son identité…
Ni le pigeon voyageur en route pour Bruxelles, ni la petite pie russe, ni la tourterelle Gourouli, face à laquelle il se découvre soudain une âme de « tourtereau », ni le pédant poète-cacatoès, ni les grives séductrices, ni les étourneaux frivoles, ni les vieilles colombes rencontrés sur sa route ne lui porteront secours dans à sa quête existentielle.
À son obsédante question : « Qui suis-je ? », le hasard répondra en lui révélant son identité de merle blanc. Il décide alors d’assumer sa condition d’oiseau d’exception et se déclare écrivain. Le succès remporté par son oeuvre est tel que sa réputation internationale lui apporte la visite de confrères exotiques, un merle du Sénégal, un autre de la Chine. Insensible aux témoignages d’admiration dont il est l’objet, il s’enferme dans la solitude de sa différence, source intarissable de souffrances. C’est une jeune merlette admiratrice de son oeuvre, « femme de plume » et non moins blanche que lui, qui parvient à le tirer de sa mélancolie, en lui proposant de partager sa vie…
Cette idylle marquera-t-elle la fin des tribulations du volatile romantique ou l’entraînera-t-elle vers de nouvelles désillusions ?
« Pour écrire l’histoire de sa vie, il faut d’abord avoir vécu. »
C’est ainsi qu’Alfred de Musset ouvre la Confession d’un enfant du siècle. Il a 26 ans. Sa rupture avec George Sand, qui disparaît sans le prévenir après un an et demi d’une passion orageuse, remonte à l’année précédente.
Six ans plus tard, en 1842, il publie l’Histoire d’un merle blanc dans Le Journal des débats. Déçu par le médiocre succès que rencontre son oeuvre dramatique, le poète se consacre à la composition de nouvelles, essentiellement publiées par La Revue des deux Mondes. Ce sont, dit-il, des « ouvrages alimentaires », mais tous portent l’estampille d’une expérience personnelle.
L’Histoire d’un merle blanc, que Grandville illustre lors de sa parution dans le recueil collectif des Scènes de la vie privée et publique des animaux, est peut-être le plus autobiographique de cette série de courts textes en prose. Il s’agit d’un récit écrit à la première personne, mais cette personne est… un merle. Merle blanc, qui plus est ! C’est-à-dire un « individu extrêmement rare, introuvable », selon le dictionnaire. Parmi le bestiaire grouillant dans lequel chaque être humain peut se reconnaître un homologue animal, le jeune Musset s’est choisi pour alter ego une bête légendaire, issue d’une erreur de la nature, un spécimen rare. C’est dire son sentiment d’exclusion et de marginalité !
L’Histoire d’un merle blanc est l’incarnation fantaisiste et chargée d’autodérision du vers immortel de La Nuit de mai : « Les chants désespérés sont les chants les plus beaux. » Outre cet aspect profondément personnel, l’Histoire d’un merle blanc dresse une divertissante galerie de portraits, sous les masques desquels se dessinent les traits d’une société littéraire malveillante, qui y laisse quelques plumes !
Stéphanie Tesson
Qui ne s’est jamais senti merle blanc, âme solitaire, oiseau sans pareil, étranger à ses semblables ? C’est le mal, non pas seulement d’un siècle – celui des inimitables romantiques – mais aussi celui d’un âge, l’adolescence, qui chez certains se prolonge la vie durant… L’orgueilleuse angoisse de la différence, le sentiment de se sentir à part, singulier, marginal.
L’Histoire d’un merle blanc, c’est une fable de vie, dans laquelle chacun peut se reconnaître à un moment ou à un autre de son existence.
Nous avons choisi l’épure pour donner au texte de Musset toute sa force. Le voyage initiatique du merle-poète est vécu en direct par l’interprète, vêtue d’un simple manteau à plumes blanches, et partageant avec le spectateur, dans le cadre illimité et si stimulant pour l’imaginaire de la boîte noire, les diverses rencontres de sa traversée de vie. La lumière et le public sont ses deux compagnons de scène. Ainsi la langue de Musset s’incarne dans une sobriété et une sincérité scénique, qui en font ressortir toute la beauté et la vérité.
« Depuis le premier jour de cette si grande aventure, j’ai tenu à ce que Stéphanie habite tous les personnages évoqués par Musset, comme il est d’usage lorsque l’on franchit les limites qui séparent le monologue narratif de la représentation vécue et éprouvée. Comme le dit Olivier Py qui propose à l’acteur « d’écouter le texte monter en soi », je la regarde avec attention mêler jeu et littérature, souffrir parfois avec le héros qui la porte, et se laisser gagner toujours par la grâce secrète qui la relie si fort à l’auteur. »
Anne Bourgeois, metteur en scène
« Le texte, qui n'a pas pris une ride en 200 ans, est savoureux et plein d’humour. La jeunesse, la vivacité, l’énergie de Stéphanie Tesson, seule en scène pour interpréter tous les personnages, font merveille. » Paris La muse
13, rue du Faubourg Montmartre 75009 Paris