L’œuvre de Josef Nadj trouve son origine dans les plaines de la Voïvodine, en ex-Yougoslavie, dans les cieux nuageux de ces terres brutes, les paysages infinis d’un pays traversé par les remous des siècles. C’est l’histoire d’une ville, Kanizsa, d’une géographie intime, d’un enracinement à ce « petit triangle qu’on appelle le coin des tempêtes » selon les mots du chorégraphe. L’histoire gronde au-dessus de ces lieux dans lesquels Josef Nadj a grandi : « J’ai vu l’éclatement du pays dans lequel je suis né et j’éprouve ce paradoxe : en tant qu’hongrois, je suis né Yougoslave et puis je suis devenu Serbe, en attendant mon passeport français. »
Dans Paysage inconnu, pièce pour deux danseurs et deux musiciens, il se plonge dans les souvenirs de cette scène biographique et imaginaire, habité par les spectres du passé. Si le paysage est dit « inconnu », il est réel et concret, convoquant des figures amies : Otto Tolnai, le poète, Tihamer Dobo, le peintre ou encore Antal, le lutteur devenu sculpteur.
Le spectacle se fait confidence et livre l’histoire d’un danseur au parcours pétri de rencontres. Avec la force d’un conteur universel, d’un chamane magicien, le corps de Josef Nadj s’élève sur un plateau sombre, aux accents crépusculaires. Accompagné d’Ivan Fatjo, il danse l’origine de cette plaine étale et sourde de Voïvodine. Leurs silhouettes en habit noir créent des photographies qui semblent familières : chez le chorégraphe, l’obscurité se mue toujours en théâtre, en rituel ancestral. Les visages parfois offerts aux spectateurs se transforment en masques inanimés, contrits : la tragédie de l’histoire perce dans la danse, les images cristallisent la pensée pour mieux interpeller le regard du spectateur. « On ne sait pas ce qui provoque l’évocation d’une image, ni ce qui la transforme. Parfois ce sont des jeux de reflets et d’autres fois on ne sait pas. C’est lié à une sensibilité de l’œil qui emmagasine et trie, qui transmet au corps, à l’esprit. Et après, ça travaille… » explique Josef Nadj. Chez le danseur, l’idée ne s’arrête pas en chemin, elle devient un tableau aux reliefs mouvants.
Sur scène, le quatuor convoque la fragilité du geste et du son comme manifestation de l’origine. La nature s’engouffre dans le spectacle, et se confronte soudainement à l’animal : l’imposant bestiaire de Josef Nadj a toute sa place dans ce paysage inconnu et sensible. Le geste laisse une trace, la danse et la musique s’emparent du vivant pour épouser l’histoire d’un territoire.
« Paysage inconnu est une danse macabre telle que sait les conduire Josef Nadj, chef de parade incontesté en la matière. Depuis près de trente ans, le directeur du Centre chorégraphique d'Orléans démonte la mécanique humaine sans jamais en venir à bout. (...) Il signe plus de dix ans après un nouvel autoportrait en biais, tout aussi énigmatique. Quête de soi en cours. » Rosita Boisseau, Le Monde, 24 septembre 2014
Chorégraphe et plasticien, Josef Nadj travaille le noir, le sec et l'humide, la poussière et le gras, le vertical et le à-l'envers, marche arrière ou tête en bas, . Souvent lent, toujours inattendu. Visionner : https://www.youtube.com/watch?v=ACwjuR1K6lo
Chorégraphe et plasticien, Josef Nadj travaille le noir, le sec et l'humide, la poussière et le gras, le vertical et le à-l'envers, marche arrière ou tête en bas, . Souvent lent, toujours inattendu. Visionner : https://www.youtube.com/watch?v=ACwjuR1K6lo
5 rue Curial 75019 Paris