Le grand Folial, Bouffon de Philippe D’espagne, moitié du XVIè siècle, dirige une école de Bouffons en Flandres. Ses élèves, qui sont envieux et méchants, montent sournoisement un spectacle en son honneur. Ce spectacle reproduit la mort de la fille de Folial. Mais, plus fort que ses persécuteurs, il résistera à l’émoi qui le terrasse en cette culminante et mortelle séquence, et apprendra à ses élèves le secret de son art: " le secret de notre art, du grand art, de tout art qui veut durer: c ’est la cruauté! "
Plusieurs choses m’ont arreté sur cette pièce. D’abord l’univers de Ghelderode, sombre lugubre, baroque et brüeghelien. Ensuite, les personnages. Les bouffons. J’aime les monstres parcequ’ils sont laids. Et la laideur est plus fascinante et plus belle que la beauté,simplement parcequ’elle s’oppose à l’ordre social.
Il y a dans cette pièce un théâtre dans le théâtre, un jeu dans le jeu : c’est un théâtre qui désacralise le théâtre en le magnifiant. Lucide, insolent. Rien ne peut réconcilier les mots et les choses, certainement pas l’humour de cette pièce, ni sa violence, c’est un drame.
Et puis cette école qui sculpte, inutile, sensée recenser les difformes, qui nous rappelle qu’il n’y a dans notre monde qu’une toute petite place pour les réformés. Et nous apprenons en fin finale que le seul secret que les personnages aient à tirer de leur enseignement, c’est la cruauté.
Franchement, entre nous, ça ne vous rapelle rien?
Christophe Boudé.
" La bouffonnerie est une philosophie. Elle est la forme la plus achevée du mépris. Du mépris absolu." J. Kott
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