Résumé
Intention de mise en scène
Une farce tragique
Fantasmes et humanité
Des personnages à la cruauté comique
Peindre un univers d'illusion vraie
L'homosexuel est une vertigineuse confusion quant à la différence des sexes. Irina tantôt fille, tantôt garçon ou encore transsexuelle, est l'enjeu d'une lutte sans merci.
Copi agite son théâtre devant vos yeux comme un rideau aux couleurs démentes.
Chez Copi, tout semble factice, outré, démesurément dérisoire et cependant
fantaisie et traumatisme opèrent: on rit, on descend aux tréfonds de la tragédie,
on entre chez Copi.
Copi : un théâtre où surnage d’un total désespoir l’écume de cet humour aberrant
dont l’Argentin avait le secret de fabrication.
Des histoires de cul et de pouvoir mêlées à des histoires de famille plongent dans
la douleur pure, le tout à la vitesse boulevard !
Copi apparaît comme un héritier d’Artaud tant ce qui y baigne dégouline bien
au-delà du cadre de la scène, à Genet pour ses constantes transgressions et au théâtre
Nô, à voir évoluer avec une sombre grâce des hommes grimés en femmes.
On aurait tort de prendre son théâtre pour un délire. Au détour d’une image ou d’un mot, le grotesque et l’absurde se métamorphosent en monstres, et ils en deviennent plus inquiétants que risibles. C’est le théâtre au-delà des limites, inadmissible, mais dont les arêtes vives sont poncées par une main experte et imaginante qu’a voulu nous faire découvrir Jean-Louis Martin-Barbaz, en atelier de 2ème année d’école du Studio Théâtre d’Asnières
Ce fut un travail d’une grande richesse mais difficile, difficile de par la crudité du texte, un texte qui demande à être apprivoisé, difficile quant à la nudité à laquelle il faut faire face en tant que jeune acteur.
Qu’est-ce qui distingue l’être du faire, le rêve du vécu, le possible de l’incongru, voilà des questions qu’on ne se pose plus en face de Copi. Tout est trouble et ça en devient troublant...
Copi, Auteur difficile et sulfureux s’est joué trois fois au Studio-Théâtre d’Asnières, devant un public interdit aux moins de 13 ans. Une atmosphère à la fois sensible et fragile rythmée de musique argentine laisse danser des larmes de rire et de douleur.
Un univers inventif, osé, débridé, chaotique et décalé a vu le jour... Deux ans après, aujourd’hui qu’il a mûri, c’est à nous de lui donner pleinement vie !
Julie Deliquet
Dans L’Homosexuel ou La Difficulté de s’exprimer, le faux est vrai à faire mal.
Madre, comme son nom l’indique, serait tout simplement la mère d’Irina, et Garbo, sa maîtresse de piano, s’il ne régnait pas dans L’Homosexuel une vertigineuse confusion quant à la différence des sexes... Irina, tantôt fille, tantôt garçon ou encore transsexuelle, est l’enjeu d’une lutte sans merci entre les deux autres, dont à vrai dire, le sexe n’est guère plus assuré. “ Mais est-ce que madame Simpson avant de changer de sexe n’était pas l’oncle Pierre ? ”
Copi situe l’action en Sibérie sur fond d’épidémie provoquée par un mystérieux virus des steppes. “On se fait baiser tout l’après-midi par 40 degrés sous zéro et on ne touche pas à une soupe au dîner ? ”
Cette pièce est de loin ma préférée de l’oeuvre de Copi ; tout d’abord elle raconte une histoire avec des personnages bien vivants, en chair et en or à mes yeux. Des personnages en or car dictés par le sentiment pur, ce sentiment c’est l’amour, l’amour d’Irina.
“Je t’aime Irina, je voudrais repartir en Chine avec toi.” L’action n’est que fantasme, une fuite vers la Chine, mais la situation est bien réelle ! Elle est comparable à celle d’un rêve dans lequel une personne veut courir pour échapper à la mort et qui n’arrive pas à bouger ses jambes (comme Irina à la fin de la pièce), elle essaie, essaie encore, même si en réalité elle sait qu’elle dort... “ Irina marche ! Elle le fait exprès, je la connais ! Elle a déjà passé une semaine sans marcher. Puis tu t’es remise à marcher, Irina, tu t’en souviens ? ”
Dans L’Homosexuel, les personnages se savent condamnés à la solitude mais ils
essaient, essaient de croire au contact charnel, aussi sanguinaire soit-il.
“Irina, arrête de saigner ! Elle le fait exprès.
- Elle ne le fait pas exprès, elle est en train de mourir ! ”
Ce que le théâtre peut encore arracher à la parole, ce sont les possibilités d’expansion hors des mots, de déplacements dans l’espace, d’action dissociatrice et vibratoire sur la sensibilité. Je veux arracher la parole à la psychologie mais n’éluder en rien l’obscénité du texte.
“Baisse tes culottes, salope ! Je vais te mettre les fesses au rouge vif ! ” La mise en scène doit faire que le fantastique même le plus déroutant aille de soi.
Cependant la mise à nu de l’acteur et la sincérité des personnages éviteront une
vulgarité non-écrite dont je n’ai pas envie. La violence de Copi est telle, que je
veux qu’elle reste drôle par elle-même, et ne pas rajouter en élément de
mise en scène de la provocation visuelle gratuite.
La mise en scène visera à charmer, à engourdir, à brusquer par un langage d’espace, de sons, de cris et de lumières. Les attitudes des gestes frisant la théâtralité, le face-public, les mouvements des objets orchestrés par un jongleur-accessoiriste tendront vers un prolongement du sens propre du texte, du moins qui est ma propre lecture : c’est violent mais attention, c’est pour de rire !
Les protagonistes sont ici au sens strict des acteurs incarnés totalement enfermés dans la subjectivité de leurs fantasmes : “Les transsexuels sont des acteurs qui vont jusqu’au bout”.
Je veux que les personnages jouent ensemble dans un pilonnage éperdu de rythmes et d’émotions. Tout va très vite, les ruptures fusent, les silences pèsent et apaisent, la complicité laisse place à l’affrontement : on ne s’installe jamais mais on prend le temps de vivre.
“Vous voulez que je parle ou vous voulez que je me taise ? ” Chaque personnage étant typé à l’extrême, sa gesticulation, sa physionomie, son costume apparaîtront comme autant de traits de caractère. Un caractère que je veux haut en couleurs, avec des comédiens fantaisistes, drôles et sincères. De cette sincérité absurde naîtra le rire et l’attendrissement.
Acteurs travestis, soulevés par des chaussures à talons et recouverts de poils de fourrure, se maquillent dans une loge, en fond de scène, à vue du public. L’acteur en noir se poudre et entre en lumière sur un plateau découpé par les faisceaux des projecteurs. Voilà, ce cadre, c’est la Sibérie lugubre !
Derrière, cette loge à vue, c’est la petite boîte d’intimité où se dissimule l’exhibitionniste... l’opacité poétique est accompagnée d’un instrument à l’état d’objet et faisant partie intégrante du décor ; cet instrument c’est un violoncelle qui vise à créer une transcription musicale : le Transibérien, la neige, les chiens, la mélancolie sont autant de récurrents, qui pourront être exprimés par le violoncelle.
L’ivresse de la mirabelle sera rythmée par le jongleur. L’accessoiriste donnera mouvement aux objets, comme si l’alcool venait à faire bouger le décor au même titre que les pulsions. Il fera vivre également “la loge à vue”, en jonglant avec les artifices des costumes et en rendant théâtrale la préparation même à la théâtralité.
Parce que L’Homosexuel est une pièce d’Humanité, d’acteurs et de passions ordinaires, un canapé face public sera l’unique point fixe de cet univers remuant, inconfortable, explosif et délirant.
“Regardez-moi ça si elle est pas conne ! ”
Julie Deliquet
J'ai beaucoup aimé cette pièce de Copi, sa verdeur, son humour grinçant servi par une jeune troupe tout à fait dans le ton et très motivé à défendre leur auteur. J'ai retrouvé un jeune comédien que j'avais vu aux côtés de Philippe Meyer cet hiver dans une sorte de comédie musicale ; c'est dire que Benoît Carré aime brouiller les pistes de son talent. Je lui prédis un bel avenir. Stature, timbre de voix, jeu multiple. Encore bravo
J'ai beaucoup aimé cette pièce de Copi, sa verdeur, son humour grinçant servi par une jeune troupe tout à fait dans le ton et très motivé à défendre leur auteur. J'ai retrouvé un jeune comédien que j'avais vu aux côtés de Philippe Meyer cet hiver dans une sorte de comédie musicale ; c'est dire que Benoît Carré aime brouiller les pistes de son talent. Je lui prédis un bel avenir. Stature, timbre de voix, jeu multiple. Encore bravo
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