Présentation
Notes de mise en scène
La presse
Riche dune distribution multiethnique et dextraits empruntés à La Tempête, cette « île des esclaves », où les maîtres deviennent valets, et réciproquement, devient le lieu de la plus totale confusions des âmes et des corps : quand les rapports sociaux sinversent, nest-ce pas tous les repères, moraux ou sentimentaux, qui vacillent ?... Comme une autre « Surprise de lAmour », inattendue et sans tabous... Bref, Marivaux toujours aussi moderne, et comme on la rarement vu.
Dans LIle des Esclaves, Marivaux nous parle dabord d'illusion. De cette illusion qui veut que, par son nom, sa fortune ou quelque autre pouvoir, un tel soit maître, et tel autre valet. Illusion qui va venir se briser aux rivages de la fameuse île... Trivelin, le sage qui veille aux lois, et surtout à celle qui veut, que, sur cette île, les maîtres deviennent valets, et les valets, les maîtres, est donc une sorte de magicien à lenvers. Au fond, il ne fait pas lillusion, il la défait. Il est ainsi, selon nous, le double inversé du Prospéro de La Tempête de Shakespeare...Nous y reviendrons.
Regardons dabord ce qui se passe pour les protagonistes de la pièce lorsque sombre lillusion, comme navire en pleine tempête. Les maîtres souffrent en silence, acceptent finalement assez bien leur nouvelle vérité : il est des images qui pèsent... Par contre, les réactions des anciens valets sont très contrastées : Arlequin, samuse plus quil nabuse de sa nouvelle condition de maître, quand Cléanthis en profite pour laisser éclater sa haine et sa rancoeur. Pourquoi une telle différence ? Les relations quentretiennent Arlequin et son maître ne sont-elles pas étrangement excessives, troublantes même, comme cette étonnante déclaration damour mutuel que l'un et lautre se font assez tard dans la pièce ?... Oui, lun des parti pris forts de notre mise en scène sera quentre Arlequin et son maître, le minuscule fossé qui sépare lamitié de lamour entre deux hommes soit peut-être franchi, ou en passe de lêtre.
Pour soutenir cette approche mais aussi pour montrer ce que peuvent être les relations « normales » entre maîtres et valets avant de sinverser sur « lîle des esclaves » (et que cette inversion en prenne dautant plus de poids) nous avons souhaité ouvrir notre spectacle sur une scène entre Arlequin et son maître (autre maître, mais même typologie, issu de La Surprise de lAmour) où, sous couvert de se dire lun lautre leur même mépris des femmes (mépris passager certes, pour peine damour passagère), lun et lautre sont tout prêts là encore à shomo-aimer. Autre surprise de lamour...
Par contre-point, et pour les mêmes raisons (parler damour et de société), cette scène sera mêlée et mise en parallèle avec une autre, entre une maîtresse et sa soubrette (empruntée elle au Jeu de lAmour et du Hasard), où lon verra que, parce quelles sont toujours potentiellement rivales (au moins chez Marivaux), les femmes restent plus à distance dun possible amour. Lensemble de ces deux scènes, intimement liées, donnera lieu à une scène de départ frénétique en bateau dans une ambiance sombre, bruyante, de tempête imminente. Ambiance musicale aussi pour laquelle nous avons demandé le concours de Pierre-Marie Trilloux, compositeur contemporain et concepteur dunivers sonore bien connu en Auvergne où la compagnie sest implanté il y a de cela près de trois ans. Mêlant des rythmes à la exotiques et contemporains à des bruits mystérieux, presque inquiétants, et des références musicales tout droit venues de Jean-Sébastien Bach, celui qui trouble et qui enivre par le caractère quasi hypnotique de ses fugues et de ses variations, il a conçu un univers envoûtant, bruissant et sensuel, pour les moments clés du spectacle, tempête en tête !
Et voici donc que surgit Trivelin/Prospero, le magicien qui a pour tout pouvoir celui que lui confère une loi, celle qui régit « lîle des esclaves », et qui règne en maître sur cette île où les songes viennent séchouer et se briser plutôt quils ne naissent et se fomentent (à linverse de ce qui se passe chez Shakespeare). La filiation cependant nous a conduit à utiliser des extraits de La Tempête du grand Will pour figurer ce moment du naufrage, moment ludique de pur spectacle, où, sous les incantations de Trivelin, les voiles écrues du bateau quauront pris Euphrosine, Cléanthis, Iphicrate et Arlequin, sentrechoqueront, se détacheront et viendront séchouer sur lîle le sol du théâtre. Simplicité d¹une scénographie qui nous rappelle que Marivaux emprunte la forme de sa courte pièce à lallégorie et à lutopie... Presque une pièce dans la pièce... Autre manière de retrouver Shakespeare.
La boucle est bouclée, ou presque. Ajoutons seulement que, pour enrichir Lillusion dune homosexualité latente chez Marivaux, pour mieux donner corps à la violence du ressentiment de Cléanthis, et surtout pour donner tout son sens au terme si fort desclave dans le titre, nous avons voulu une distribution à la fois, jeune, belle, moderne, et multiethnique : Trivelin est noir, Arlequin maghrébin, et Euphrosine comme venue tout droit des Amériques. La rancur de Cléanthis serait donc mêlée de racisme ?
Cette jeunesse et ces couleurs de peau rendront dautant plus troublante la sensualité qui émane de LIle des Esclaves : la mer est toute proche, et avec elle le soleil et le sable; les vêtements se font et se défont, un coup à cause du naufrage, un coup sur ordre de Trivelin, puisque changer dillusion, cest aussi changer de costumes. Et lamour enfin, cette illusion suprême, finit par pointer son nez, malgré lextrême de la situation que sont en train de vivre les protagonistes de la pièce. Des amours impossibles parfois, entre deux hommes donc, mais aussi entre un esclave et une maîtresse; car, quand la loi en tant que repère est perdue, n'est-ce pas tous les repères qui le sont ?
Reste que cest en cela, le surgissement de l¹inattendu de la vie au sein des pires mécanismes du vécu, ainsi que par la franche frénésie qui émane de situations inimaginables sur la terre ferme (entendez un théâtre non utopique) que LIle des Esclaves est dabord une comédie, et lune des plus modernes de son auteur.
« Des décors soignés, une mise en scène alerte, et des comédiens, excellents » La Montagne
« Tempête chez les nantis ! Car lajout dextraits du texte éponyme de Shakespeare colle parfaitement à l¹ambiance et offre une ouverture tout en atmosphère à loeuvre de Marivaux ». Centre-France
« Les relations maîtres-valets sont vues dun oeil drôle et un peu amer. Lucide, en bref. Ces rapports de force se retrouvent dailleurs dans la mise en scène très gestuelle, où les corps à corps sont omniprésents, dans les regards aussi, qui tour à tour fusillent ou apaisent ». LEveil
« Les rôles desclaves sont magnifiquement interprétés par Sandrine Bouchou et lespiègle Ali Meziti... Une mise en scène de qualité. ». Magazine Starter Plus
« Une très bonne interprétation, une mise en scène simple et ingénieuse... La conception du spectacle est excellente. ». Artelio
« Des comédiens inspirés pour un beau moment de théâtre. ». Le Dauphiné Libéré
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