Un spectacle au croisement de tous les possibles. D’un côté, Gioacchino Rossini et sa Petite messe solennelle. De l’autre, le duo de metteurs en scène mais aussi comédiens Jos Houben et Emily Wilson, dont le travail verse dans le burlesque. Le mélange des deux mondes est-il une hérésie ? Au contraire, il se révèle complémentaire.
Rossini a 71 ans lorsqu’il compose pour la femme d’un ami, le comte Alexis Pillet-Will, cette messe de minces dimensions orchestrales. Le compositeur qui avait passé sa vie à enchaîner les succès d’opéra buffa, en retraite depuis des lustres, sort de sa tanière à Passy pour broder ce chef-d'œuvre de la musique sacrée, extraordinairement tissé de ses propres penchants à la légèreté. «Est-ce bien de la musique sacrée que je viens de faire, ou de la sacrée musique ? » écrira-t-il à Pillet-Will.
Jos Houben et Emily Wilson, eux, observent, découpent et cartographient le continent de la comédie au point d’élever la recherche de ses ressorts au rang de quête quasi spirituelle - à ce sujet, les conférences de Houben sur le rire sont un must fascinant d’intelligence et de drôlerie. Le duo d’instrumentistes, en recherche d’accidents, va donc disposer, autour des chanteurs dirigés par Gildas Pungier, un décor de marché aux puces où se croisent vendeurs et acheteurs, prétexte aux jeux d’objets les plus délirants.
À mille lieues de profaner l'œuvre, la mise en scène la déporte et la transcende, multipliant les fractures tout en célébrant cette messe (« le dernier péché mortel de ma vieillesse », selon Rossini) qui y apporte de l’harmonie. « Suivant l’invitation du compositeur, nous nous aventurons volontiers dans ce grand territoire du sacré tout en restant légers et surprenants avec un clin d’oeil à Tati et Charlot », explique le duo d’explorateurs comiques, à la tête d’un spectacle « un tout petit peu ridicule, comme la tour de Pise ».
Square de l'Opéra-Louis Jouvet, 7 rue Boudreau 75009 Paris