"Ce que Socrate dit sur l’homme, personne ne le saura, mais tout le monde saura que Socrate a été le premier à parler de l’homme."
Stéphane Tsanev
La dernière nuit de Socrate : face à face de Socrate et de son gardien entre le deuxième et le troisième chant du coq.
Cette comédie philosophique propose donc la rencontre entre un maton et son
prisonnier, à moins que ce ne soit celle de fous dans un jeu de rôles
s’interpellant par des fragments de discours platoniciens.
Par des confrontations irrévérencieuses, Socrate éveille l’intelligence de son
gardien, de sorte que celui-ci puisse se révéler son égal, être à même de prendre sa
place et, de mourir en Socrate : bigre, quel honneur!
En liant la civilisation d’Athènes aux sociétés européennes, cette œuvre
nous éclaire sur l’intervention de la démocratie, sa résonance dans le monde
actuel, ses propres limites et contradictions.
Par des interpellations enjouées, ce texte nous invite à réfléchir sur
l’intelligence des rapports humains dans la réalité matérielle de notre société.
Un vrai champ de batailles !
Au-delà de la manipulation du langage par les hommes et des hommes par le langage, surnagent l’humour et le plaisir du jeu.
Notes de mise en scène
J’aime cette écriture maîtrisée du dialogue. Ce conflit qui nous ramène à la source du rapport à autrui, du savoir écouter, aimer.
C’est la comédie la plus ancienne et la plus inattendue entre le maître et son élève ; ici le gardien "socratisé" ira plus loin que le maître, comme toujours, et se perdra de façon dérisoire.
Dans la mise en scène, je m’attache à la théâtralité de cette comédie
philosophique de la logique et de la rhétorique.
Le dispositif scénique, croisé de barreaux escamotables, met en évidence et en
accusation l’axe de communication, d’affrontement et d’emprisonnement.
Le trop vide et le trop plein de l’arène définissent un espace carcéral paradoxal.
En effet, drôle de prison qui est aussi un lieu d’exposition des "œuvres" du gardien, drôle de gardien artiste qui garde non par fonction mais par vocation, qui veut apprendre et se nourrir de ses détenus plus qu’il ne les surveille.
Mais d’où viendra donc le grain de sable qui fera capoter le jeu jubilatoire et
dialectique des deux hommes ?
- De la femme Xanthippe, réalité tangible des sens. Socrate alors dira : "Pouce, je
ne joue plus."
De la ciguë comme moment pathétique ? Au contraire, Stéphane Tsanev en fait un gag.
Où se situe l’enjeu de l’affrontement du philosophe et du gardien ? Au niveau
des autorités pénitentiaires ou politiques qui fixent les limites sociales ?
- Non. Il se situe bien au-delà. Sans foi, ni loi, l’enjeu réside véritablement au
sein des idées pour lesquelles ils sont prêts à mourir.
Socrate est-il dupe ?
"Dans 399 ans, un petit gars de Nazareth fera le même numéro et il va réussir, je te dis ; il va peut-être même devenir Dieu ! Parce que Dieu n’écrit pas, c’est nous qui lui inventons ses paroles"
Stephane Tsanev
53, rue Notre Dame des Champs 75006 Paris