"Comme s’il tombait un orage de temps suspendus, trois frères-hommes soudés à leur sœur-femme reviennent raconter comment, jadis, leurs parents adoptifs avaient inventé-fabriqué un Dire-Dire, objet-jeu pour la langue ; comment les père-mère pêle-mêle ont été défuntisés par la foudre ; comment la sœur cadette a acquis son talent de chanteuse d’un éclat d’éclair ; comment les quatre jeunes ont survécu, seuls, dans leur petite maison, aidés des municipiens ; comment Noéma, à l’âge venu, est partie pour ses tours de chant country et refait surface, un jour, tel un orage d’inattendus, avec des yeux vivants dans un corps sans force ni parole ; comment les frères machineront les soins d’amour à domicile malgré les oppositions de certains municipiens qui considèrent les Durant anormaux ; comment la sœur, la leur, s’allumera la nuit ; comment le terrain Durant sera envahi par des centaines de curieux régionaux ; comment les tonnerres et les éclairs viendront à la rescousse du quatuor d’amour et comment aussi, le Dire-Dire dans la main, la parole Durant s’élèvera jusqu’au château de lumière."
Daniel Danis
Dans l’histoire que nous racontent trois frères, soudés-scellés comme des chats siamois, sont lovées en creux d’autres histoires vieilles comme le monde. C’est le frère cadet, Fred-Gilles, qui dit qu’ils sont " des frères vieux comme le monde avec des yeux d’enfants ". Des fragments de mythes trament le récit, créent des constellations de signes sous la peau des mots. Depuis le grand chaos, la séparation du ciel et de la terre, la mer tendue en deux, Osiris cherche Isis, Orphée, son Euridice, Abélard, son Héloïse. Beaucoup d’air, de feu, de pluie, de douleurs en fusion, d’éclats de verre dans Le Chant du Dire-Dire.
Lorraine Hébert
(Extrait du programme du Chant du Dire-Dire, réalisé à l’occasion de la création de la pièce par René Richard Cyr, Espace Go, Montréal, 1998)
La poésie se cherche, se contemple, se confond et s’annule dans les cristallisations du langage. Apparitions, métamorphoses, volatilisations, précipitations de présences. Ces configurations sont du temps cristallisé : quoique toujours en mouvement, elles marquent à jamais la même heure — l’heure du changement. Chacune d’elles contient les autres, chacune existe dans les autres : le changement n’est rien d’autre que la métaphore réitérée et toujours différente de l’identité.
Octavio Paz
(Le Singe grammairien, Éditions Flammarion, coll. Champs, 1982, Citation choisie par Daniel Danis)
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