« Réjouir l’homme en lui montrant sa vie, mais comme « éloignée » de lui. » B. Brecht
Une parabole historique
Note d’intention
Théâtre En Tête réunit quinze comédiens, chanteurs et musiciens autour de l’œuvre majeure de Bertolt Brecht, Mère Courage et ses enfants. Au son du canon et de l’accordéon, toute l’actualité d’une parabole historique dans un spectacle dynamique et d’une grande modernité.
Au fil de cette fable, la carriole d’Anna Fierling, cantinière s’embourbe sur les sentiers de la guerre de trente ans, avec ses trois enfants, Eilif, son « préféré », Petit-Suisse (Schweizerkas) cadet-simplet et Catherine, benjamine muette. Aveuglée par sa soif de profit, personnage central, ambiguë et divisé, cette « Mère Courage », qui vit aux crochets de la guerre, se verra dépouiller successivement de sa progéniture. Dérision au rythme du combat contre la Bête.
Après Mère Courage et ses Enfants, peut-on encore écrire une pièce contre la guerre et son absurdité qui ruine et déshonore l’espèce humaine ? C’est une condamnation sans appel. Un implacable réquisitoire magnifique que Brecht écrivit là. Il aurait pu relater la guerre de 14 -18, mais le propos, presque contemporain, aurait paru moderne. En situant l’action de la pièce au XVIIème siècle, il donne à son message une valeur universelle. Ni préfiguration, ni prémonition. L’universalité du discours nous éclate d’autant plus à la gueule que Brecht rédigea ce texte en 1941. Il met en scène le commerce de la guerre au XVIIème siècle, mais en superposition, comme en photographie. Sur le plateau se dessine celui de toutes les guerres, dont notamment celle d’Irak qui se déroule en ce moment.
Avec Brecht, on n’implique pas le spectateur dans l’action, on fait de lui un observateur dans la volonté d’éveiller sa conscience, son activité intellectuelle. Dans Mère Courage et ses enfants, Brecht aborde le thème de la guerre et son effet sur les « gens d’en bas ». Pour que ce sujet brûlant et d’actualité reste « éloigné » du spectateur, on utilise de nombreuses méthodes : certaines sont propres à l’écriture, à la structure et au style des œuvres de l’auteur, d’autres à l’interprétation et à la mise en scène empreintes de cette dialectique brechtienne. L’éloignement dans l’espace et dans le temps, le burlesque, l’humour et l’ironie sont autant de procédés qui relèvent des plus vieilles techniques de distanciation d’un spectacle.
Comme à son habitude, l’auteur a choisi d’insérer son sujet dans une véritable légende, dans une parabole. L’action se situe dans une unité de lieu abstraite, les sentiers de la guerre, lors d’une unité de temps lointaine, la guerre de trente ans. En effet, relater un évènement d’actualité trop chargé des passions du moment ne permettrait ni d’approfondir la prise de conscience du spectateur, ni son enchantement.
Ce côté narratif est accentué par le chant et la musique (ici un accordéoniste) qui contribuent à la poésie en donnant soudain à la pièce une ampleur, une jeunesse ou une nostalgie immenses. La musique de Paul Dessau enserre la pièce à tel point que, sans elle, l’ensemble serait complètement défiguré. Elle en assure la vitalité dynamique, l’élan conquérant et cinglant. Du chant de départ au chant sans accompagnement de Courage devant sa fille morte, c’est toute la respiration de la pièce qui dit l’allégresse, l’aveuglement et la douleur de Courage.
Peu de mots contre la guerre dans cette pièce qui lui est pourtant radicalement opposée. On y entend même un aumônier faire son apologie expliquant son caractère indispensable pour le bien-être des hommes. Mère Courage, Anna Fierling, en vit puisqu’elle est cantinière, or elle se verra dépouillée successivement de ses trois enfants. On la voit même déplorer la paix qui la ruine. C’est précisément cette attitude familière avec la guerre, qui éloigne de nous les personnages et nous incite à juger au lieu d’accepter. La critique ne sera jamais amère, mais allègre, pleine d’humour, parce qu’indirecte et dialectique.
Volontairement, nous avons choisi d’attribuer différemment les parenthèses d’adresse directe au public selon le degré de corruption des personnages. A l’inverse, nous conservons l’existence du « quatrième mur » aux plus innocents (Catherine et Petit-Suisse). Il est surprenant de mesurer l’impact de ce simple procédé de distanciation qui produit un phénomène de déshumanisation des personnages aguerris, alors qu’il rapproche des seconds dont le jeu se borne à l’incarnation.
Pour Brecht, l’érotisme est la négation de l’amour, un appât essentiel à une société décadente et fondée sur la possession. Discret, mais brûlant, on le retrouve en toutes les putains dont Brecht a jonché son théâtre, et ici en Yvette Pottier. De fait, on ne rencontre guère chez Brecht le thème classique de la passion amoureuse trop éloigné des préoccupations essentielles de notre temps. Il lui préfère sa forme naturellement apaisée qu’est l’amour maternel et qu’il décrit sans aucun idéalisme. Certes, dans un premier temps on voit la mère défendre de toutes ses forces ses enfants contre la société et ses maléfices (Mère Courage entend garder ses enfants et les soustraire à la guerre), mais elle les perdra successivement, inexorablement, soumise à la société lorsque « les affaires sont les affaires ».
S’il est une forme d’amour à laquelle Brecht aime à nous confronter, c’est sans doute celle de la bonté. Mais lorsque l’auteur nous la fait vivre et respirer, c’est souvent aux dépends de celui qui la pratique et Catherine, la fille muette de Mère Courage, sera fusillée.
Ce qui nous conduit vers une conclusion étonnante : exercer la bonté paraît trop difficile, il faudrait donc choisir entre transiger ou mourir.
Le pinson dans la cour siffle
Cause toujours.
Avant qu’ l’année soit écoulée
Les v’là qui marchent avec la clique
Ils jouent déjà d’leur p’tit clairon,
Ils s’mettent dans l’ton.
Une deux, tout le monde dans l’rang
L’homme propose, Dieu dispose...
Tout ça, c’est du flan !
Nous ne critiquons pas la guerre, nous la montrons. Et cela suffit.
Magnifique !!! Un grand moment de Théâtre, un VRAI. On ne voit pas le temps passer, on en redemande aux saluts. Guy Bourgeois, Mère Courage, ses enfants et tous ceux qui les entourent, nous transportent dans cette superbe fable contre la guerre. Rire, larmes, chants... tout est parfaitement ressenti et transmis au public. LA PIECE A VOIR.
Formidable. Les comédiens sont excellents et la mise en scène tout à fait adaptée au sujet par sa sobriété. Encore bravo.
Magnifique !!! Un grand moment de Théâtre, un VRAI. On ne voit pas le temps passer, on en redemande aux saluts. Guy Bourgeois, Mère Courage, ses enfants et tous ceux qui les entourent, nous transportent dans cette superbe fable contre la guerre. Rire, larmes, chants... tout est parfaitement ressenti et transmis au public. LA PIECE A VOIR.
Formidable. Les comédiens sont excellents et la mise en scène tout à fait adaptée au sujet par sa sobriété. Encore bravo.
13, rue du Faubourg Montmartre 75009 Paris