Dans son roman Ulysse, publié en 1921, James Joyce retrace dans une forme d’Odyssée moderne, la journée de Léopold Bloom en dix-huit chapitres. Le dernier, Pénélope, est l’un des premiers monologues intérieurs de la littérature, dénué complètement de ponctuation.
Dans ce qui pourrait apparaître comme huit phrases, huit longs souffles, il donne à entendre la (les) voix de la femme de Léopold, Molly Bloom. Un voyage nocturne dans les méandres de la pensée d’une femme indomptée qui nous livre son intimité, sa peur de la solitude, et son désir de jouir dans une société où la morale tient une place prédominante.
« Nous plongeons délicieusement avec la comédienne : elle ose tout et elle le peut. C’est très beau. » La Provence
« Molly est tout simplement un petit bijou. Chloé Chevalier est époustouflante. Une vraie belle pièce ! » Le Dauphiné
La première question est celle de la parole. Comment rendre compte d’un rythme d’une pensée vagabonde en un rythme de parole. Pensée à voix haute, adresse à l’autre (public) soi-même, en respectant cet essoufflement progressif de ces huit phrases sans ponctuation. Ce texte est une des grandes pages de la littérature du XXème siècle, plus d’un siècle après, elle garde une pertinence dans ses propos, quant à son contenu sur l’intime et les rapports de couple mais aussi à la liberté de ton de Molly. Un des premier « monologue intérieur » où le flux de la parole détermine au fur et à mesure le personnage. Il s’agit de jouer l’immédiateté de cette parole, de jouer de la parole légèrement déformée par le son comme différent registre. Légère déformation de la silhouette en changeant les plans de jeu, comme pour jouer de gros plan proche du spectateur et de s’en éloigner pour lui laisser sa place de spectateur/voyeur. Avec Chloé Chevalier, nous avons depuis plus de dix ans, travaillé librement le texte de Joyce, comprendre comment ce texte peut être joué, depuis ce texte l’accompagne et ce temps est inespéré car la lente maturation lui donne des libertés absolues dans la parole, elle en fait une surprenante drôlerie, à la fois très mature et légère. Nous en avons fait une adaptation en gardant tous les méandres des pensées et la saveur du texte, nous avons retiré principalement les références liées au roman, qui n’auraient pu être comprises que par des connaisseurs avertis de l’œuvre.
Pascal Papini
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