Robert Moule est éducateur. Il mène une vie calme et sans histoire, jusqu'au jour où, exaspéré, il attrape Justine, une de ses élèves, par le bras. Celle-ci, soutenue par son père, producteur de festival d'humour, l'accuse d'agression… sexuelle. Parviendra-t-il à surmonter cette épreuve ?
Une écriture jubilatoire, profonde et drôle pour parler de la crise de nos valeurs humanistes face au triomphe du libéralisme et de l'individualisme.
Par La Chaise et le Grain de Sable.
C’est l’histoire d’un éducateur confronté à ses valeurs humanistes. Robert Moule, se retrouve accusé d’agression par une élève dont il a agrippé le bras, et dont le père est un puissant producteur d’humour à l’international.
C’est l’histoire de Robert Moule, un homme ordinaire. C’est l’histoire d’un homme qui réalise qu’à notre époque, la bonté ne pèse pas lourd face à l’absence de scrupules... C’est l’histoire d’un homme qui pense que l’éducation peut aider à améliorer la société. Mais ses principes sont remis en cause lorsque Justine, préadolescente rebelle, l’accuse d’agression sexuelle. Et l’introspection commence. Et avec elle, une galerie de souvenirs, d’expériences, de personnages historiques ou pas... qui viennent questionner, aider, conseiller notre Robert Moule. Car le père de Justine, Robert Goule, est un pragmatique cynique qui ne s’embarrasse guère de notions morales. Un gagnant à tout prix. Un homme de pouvoir. Un homme qui sait avoir l’ascendant... et qui semble-t-il n’aurait pas hésité à en abuser. Un Harvey Weinstein, un Tariq Ramadan, un Dominique Strauss-Khan... il y en a tant...
C’est l’histoire d’un homme qui se demande pourquoi les valeurs avec lesquelles nous sommes éduqués sont oubliées voire même montrées cyniquement du doigt, dès que nous entrons de plein pieds dans la réalité du monde du travail, des affaires, dans le monde du libéralisme à grande échelle... C’est l’histoire de Robert Moule qui se demande si, pour être honnête, il ne devrait pasmieux apprendre aux enfants dont il a la charge à voler, mentir, taper... au moins seraient-ils prêts à entrer dans le monde des adultes...
Moule Robert est un conte sur la crise de nos valeurs morales face au triomphe de l’individualisme et du libéralisme. Nous ferons un théâtre brut. La parole en sera le coeur. Les actrices et les acteurs en seront le corps. Un instant de rencontre avec les spectateurs. Un instant d’échange. Un présent partagé. Nous ferons un théâtre de l’ici et du maintenant. Débarrassés des artifices, nous plongerons dans la véritable magie : un espace irréel, clos, un théâtre, une scène, et des êtres, les uns spectateurs les autres acteurs, qui partent ensemble, grâce à l’art, à la création, à la découverte d’eux-même et de leur être profond. Le théâtre qu’écrit Martin Bellemare permet, demande, nécessite cette simplicité, cette mise à nue, cette intelligence où profondeur et humour cohabitent pour le plus grand bonheur de tous. La production se fera dans ce sens. Oui. Un stand-up collectif !
L’écriture de Martin Bellemare est totalement jubilatoire. La façon et le talent qu’il a de nous faire naviguer dans les méandres de sa propre pensée est tout à fait étonnante. Ici, pas de didascalies, juste une narration, des voix adressées directement au public, sans quatrième mur, qui disent ou décrivent les situations, commentent ce qui se passe, donnent leur avis, aident ou influencent les protagonistes. Sans lien direct avec eux, juste en lien avec le public, ces voix déroulent le fil de leurs pensées, de leurs contradictions, de leurs entrechoquements et nous guident.
C’est drôle, oui, souvent, à l’image de nous-même et de la vie. C’est drôle, oui, très souvent, et néanmoins la question que nous pose Martin sur notre sentiment de culpabilité ou plutôt sur notre « comment s’en débarrasser », « comment s’en libérer et se libérer de l’autocensure que nous exerçons à notre propre égard » … quid de notre morale ? quid de l’éducation et des valeurs morales que l’on nous inculque (respect, probité, politesse etc.) puisqu’une fois lancé dans le grand bain des adultes, ne réussissent (soi-disant, ou sont montrés comme tel...) que ceux qui bafouent ces valeurs ?
Oui cette question est dérangeante. Oui cette question est complètement contemporaine : qu’est-ce qui fait que nos enfants, à qui l’on cherche à apprendre des valeurs et des principes, finissent par devenir avec le temps et une fois adulte aussi pervers ? D’où vient-elle, cette fracture, cette dérive, ce grand-écart ? Aux côtés des narrateur.trice.s, interviennent une flopée de personnages fictifs ou réels, vivants ou morts, comme le théâtre, seul, peut en appeler sur scène. Il suffit pour cela de les convoquer... c’est aussi simple que cela. Et cette simplicité fonctionne à merveille. Tellement. C’est fou, c’est drôle, c’est profond.
Oui, car voilà le théâtre que nous proposons : un théâtre en relation avec le public, au temps T, en direct, une absence de 4ème mur, un témoignage brut, simple, transparent, des personnages qui se livrent, et qui avancent dans leurs faiblesses et leurs questionnements. Un théâtre jubilatoire pour les spectateur.trice.s comme pour les acteur.trice.s. Produire de la joie et du rire.
Oui ! Car l’allégresse et la gaieté autant que la rébellion et la contestation les produisent. Comme un élan, ou la réminiscence d’un élan, vers un certain idéal. Comme l’expression d’un désir, plus que d’une croyance, en un changement possible. Pour Robert Moule, au bout du compte, ce sera grâce à une chanson, un tube planétaire, qu’il trouvera une réponse. Elle aura le mérite d’ébranler ses acquis, de remettre en questions ses croyances, et comme nouveau départ, de le faire entrer dans un nouveau « moule ». « Imagine ! »
Benoit Di Marco
Qui est Robert Moule ?
Martin Bellemare : Robert Moule est un éducateur en service de garde, un pion. Il est le crédule, guidé par les valeurs judéo-chrétiennes qu’on lui a inculquées, préoccupé par la question de l’égalité et poursuivi par la peur de prendre la place de quelqu’un d’autre, par la peur de nuire. Benoit Di Marco : Robert Moule est surveillant dans une école. Un homme ordinaire. Un homme comme nous autres. Un homme victime de l’air du temps. Un homme confronté à notre actualité qui devient la sienne. Un homme qui se demande si la “réussite”, l’ambition doit obligatoirement rimer avec l’oubli, la perte des valeurs collectives, du “bien” collectif.
Le spectacle fait-il écho aux récents mouvements #metoo ?
M.B. : Le texte faisait déjà état d’un comportement disons agressif de la part de certaines personnes, on pourrait appeler ça de l’ambition, ce désir d’obtenir quelque chose qui parfois ne s’embête pas des obstacles. Le texte a été écrit en amont du mouvement mais il participe du même constat. Le texte ne se limite cependant pas à ce parallèle. Il aborde la cohabitation de certaines notions comme l’éducation, l’ambition et la culpabilité.
Qu’est-ce qui vous a séduit dans la plume de Martin Bellemare lors de votre découverte de Moule Robert - qui n’a jamais été monté en France auparavant ?
B.D.M. : L’écriture de Martin Bellemare est totalement libre dans la forme, dans le fond, dans la manière d’écrire le théâtre. C’est jubilatoire ! Pour les act.eur.rice.s autant que pour les spectat.eur.rice.s ! C’est drôle, souvent, à l’image de nous-même et de la vie. Très drôle même, absurde, désopilant très souvent, et en même temps la question que pose le texte est complexe et dérangeante : quid de notre morale ? quid de l’éducation et des valeurs morales que l’on nous inculque.
Propos recueillis par Mathilde Bariller
94, rue du faubourg du temple 75011 Paris