« Vous êtes Legba ! » C’est sur cette exclamation que la danseuse et chorégraphe Germaine Acogny, fondatrice de l’École des Sables au Sénégal, avait salué Olivier Dubois à leur première rencontre. Legba est un dieu africain de la fertilité appartenant au vaudou. Il ouvre et ferme les chemins. Il fait écho au paganisme qui inspira à Stravinsky Le Sacre du printemps. Olivier Dubois aime à le répéter : depuis des années, les fantômes du Sacre rôdent autour de ses pièces. Ils étaient incarnés dans Prêt à baiser. Ils opéraient, plus discrètement, dans Tragédie. Mais ils exigeaient davantage. Leurs manifestations s’avéraient si pressantes, qu’en retour, le chorégraphe ne pouvait pas ne pas disséquer l’œuvre sous d’autres formes, constituer une « collection » de Sacre.
Et comme Germaine Acogny se trouvait « à l’endroit de tous ces fantômes du Sacre, ces monstres fougueux qu’il faut abattre », elle devenait la double dédicataire de la pièce. Par son présent et par son histoire avec Béjart. Le père du Ballet du XXe siècle n’avait-il pas annoncé à son étoile : « Tu seras mon élue noire. » Mais la prophétie avait fait long feu. Olivier Dubois a pensé qu’il lui revenait d’honorer l’engagement de Béjart. Mon élue noire – Sacre #2, serait par et pour Germaine Acogny. Élue de la Danse sacrale pour ses 70 ans. Dans une version symphonique intégrale, à elle dédiée, à son histoire. À ce qui provient d’Afrique dans le martèlement de toute terre, dans l’appel aux germinations d’un deuxième printemps.
« L’histoire – esclavage et colonialisme – l’enveloppe comme un cauchemar. Noir de la peau, obscurité de l’espace, plongeon dans la grotte où seules les traces de ses mains sur le mur conserveront son souvenir (...) » Rosita Boisseau, Le Monde, 25 mars 2015
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