Presque Don Quichotte
Ce quen pense la presse
Avant toute chose, avant tout spectacle, la scène du théâtre est nue, aride comme une terre sèche, où rien ne semble pouvoir pousser, pas le moindre geste, pas le moindre mot.
Puis soudain, surviennent de toutes parts, des silhouettes jetées, des corps sans ombre sous cent soleils, des illusions, des fantômes qui se révèleront être bientôt autant de corps réels, mobiles, à la chair éclatante, à lénergie démesurée.
Cest le début dune aventure, qui na pas encore de nom ni de destination, et quon appellera plus tard la danse.
Une chorégraphie de Jean-Claude Gallotta est ainsi faite. On ne sait jamais doù elle vient, quel est son village natal, quelles rencontres elle fera, quelles amours elle provoquera. Cest en se frayant son chemin quelle découvre son but, cest en écoutant le choc des corps quelle déchiffre son rythme. Elle sinvente à mesure quelle sécrit.
Cette nouvelle chorégraphie emprunte à Don Quichotte ses élans, ses toquades, ses combats chimériques, ses rêves damour. Comme lui, elle se rend capable de prouesses et de fatigues, de sublime et de grotesque, parcourue comme lui, sur toute la longueur de sa colonne vertébrale, par le sentiment tragique de la vie.
Nous sommes tous des chevaliers errants, dit-elle par solidarité avec tous ceux à qui on refuse le droit daccéder à leurs rêves, le droit dêtre ce quils sont, là où ils sont, le droit dêtre lautre quils ont envie dêtre. La danse ne cherche pas le repos, elle milite pour lhomme et contre la haine qui le gagne. La danse cherche les ennuis.
Obstinément, Jean-Claude Gallotta poursuit son compagnonnage avec cette famille de héros inlassables dont Emile Dubois fut une ombre gigogne et Don Quichotte la figure de proue, de ces hommes qui ont su embrasser lespace du monde à grands gestes et fouetter lair devant eux pour ouvrir leur marche.
Lhistoire raconte que, juchés sur leur propre monture, les interprètes de Jean-Claude Gallotta parcourent luvre de Cervantès comme une lande qui sétend jusquà nos jours. Mais les temps ont changé. A la croisée de limaginaire et du réel, du geste et de la parole, ils rencontrent souvent la réalité. La dure, la vraie, linévitable, lindéguisable. Don Quichotte avait presque raison, aujourdhui les géants ont succédé aux moulins à vent. La bataille sera furieuse et inégale.
Claude-Henri Buffard, mai 1998.
« Prenez le plateau de la Mancha avec Don Quichotte et son Sancho, soufflez sur ces deux silhouettes reconnaissables entre toutes et vous vous retrouvez avec un trou béant quil sagit de remplir ». Cette confidence de Jean-Claude Gallotta vaut comme avertissement à tout spectateur de Presque Don Quichotte. Tout est donc dans ce « Presque » ( .) Secouer, relancer, déstabiliser. Quand la fièvre grimpe, les corps lâchent. Ils tremblent, sautillent comme des boxeurs trop nerveux, tournoient et galopent avec une vitalité enfantine. Ces déflagrations disent haut le désir de Jean-Claude Gallotta de secouer ses habitudes, de relancer sa donne Ainsi ce virtuose des circulations éclatées et des contrepoints se plait-il, cette fois-ci, à rassembler ses troupes dans des danses frontales, des unissons en guirlandes.». Le Monde, Rosita Boisseau, Février 1999
« Presque Don Quichotte ? Non, tout à fait !( ). En combinaisons blanches ou pyjamas à rayures, ils s'en donnent à cur joie à force de duos tendres et loufoques, de courses ludiques, d'étonnements naïfs et de sympathie violente: lesprit Gallotta quoi !. Nul besoin de la silhouette du célèbre hidalgo. Son assurance en ses chimères est bien partagée. Telle cette danseuse qui, sur la pointe des pieds, laisse tomber le buste pour regarder le monde entre ses jambes, la tête en bas. Lun claudique jambe raide à la traîne, lautre chevaleresque, emboîte le pas cordialement. Une belle séquence où les danseurs roulent autour de la scène serrant des livres sur leur cur, évoque la lecture boulimique, folie et délectation. » Danser, B. Bonis, mars 1999.
«Il y a tout Gallotta dans ce « Presque Don Quichotte », sa désespérance, sa loufoquerie, sa fantaisie, sa bonhomie aussi. » Libération, M.-C. Vernay, 1999.
place Aubry 02000 Laon