Comment peut-on fleurir dans un désert de sel ? Pour répondre à cette question, Robyn Orlin s’associe à la compagnie Garage Dance Ensemble, basée dans la province du Cap-Nord et aux musiciens uKhoiKhoi. Cette région d’Afrique du Sud représente, pour la chorégraphe, un concentré de l’histoire de ce pays colonisé, son humour, sa richesse, son humanité mais aussi sa cruauté.
Associée à huit interprètes de la compagnie Garage Dance Ensemble, Robyn Orlin radiographie les blessures de la colonisation en Afrique du Sud et leurs échos contemporains. C’est une plaie qui n’a jamais correctement cicatrisé, faute d’une réelle reconnaissance politique : à partir du 17e siècle, la région du Cap-Nord a non seulement été délestée de ses richesses minières par les colons hollandais, mais elle a aussi été traversée par des violences sexistes et un puissant mouvement de négation de ses cultures et identités. Posant l’hypothèse que ce passé avait refait surface durant le confinement sous la forme d’une explosion des violences sexuelles et sexistes, Robyn Orlin a imaginé un spectacle politique, ludique et musical, aux frontières de la performance et de l’installation, où affleurent les questions des privilèges et des hiérarchies sociales et sexuelles.
La chorégraphe sud-africaine est ici fidèle au grand brassage de formes, esthétiques et expressions, qui marque son œuvre prolifique depuis maintenant 35 ans dans une démarche critique et politique. En complicité avec le Garage Dance Ensemble, basé à Okiep dans la province du Cap-Nord, elle entend non seulement exposer les victimes de ces violences mais aussi impulser une compréhension collective des agissements de leurs auteurs et favoriser ainsi un processus de guérison.
« Pour cette création présentée à l’orée du Festival de Marseille, Robyn Orlin met en scène le Garage Dance Ensemble, compagnie de danse basée à Okiep, dans la province du Cap Nord. Au-delà des townships et de la violence (qui naturellement se déploie particulièrement envers les femmes), le spectacle évoque donc avant tout cette miraculeuse floraison via une éclosion de multiples couleurs qui éclatent dans la vidéo qui accompagne tout le spectacle. Filmés souvent par le haut, en plongée, les tissus que portent les danseurs se transforment en images kaléidoscopiques, autant d’explosions colorées qui rythment un spectacle qui en devient excessivement hypnotique. Toujours tendu entre la douleur et la possibilité du bonheur, entre le malheur qui rôde et la possibilité de s’en extraire par la beauté, How in salt… pêche cependant par un rythme monotone, l’hyper sonorisation et l’omniprésence de l’image en fond de scène qui effacent les corps et les visages. Sans doute est-ce pour cela, que lorsqu’à la fin, les danseurs tractent avec leurs cordes le podium des musiciens jusqu’à l’avant-scène, face à cette troupe joyeuse qui semble enfin crever l’écran, la salle debout, tape dans les mains et communie. » Sceneweb
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