Spectacle en langue italienne surtitré en français.
La pièce
Note de Toni Servillo
Histoire du Teatri Uniti
Le jour de repos dominical, attendu toute la semaine, s’avère souvent être un enfer. C’est le jour de réunion familiale, et la vacance de l’esprit donne à chacun tout loisir pour chercher les conflits. Cela crée une atmosphère détonante. Tous les ingrédients sont là pour que les choses se nouent, se dénouent, et se renouent… Dimanche, donc. Trois générations se retrouvent pour le repas dominical chez Don Peppino. À l’aube du boom économique en Italie - 1959 -, les valeurs changent : les désirs et les espoirs de confort et d’aisance des plus jeunes vont à l’encontre des angoisses des rescapés de la guerre, et cette cohabitation est explosive. Chaque individu est dans une grande euphorie ou un profond désarroi face à cette transformation de la société. Et De Filippo a parfaitement écouté chacun d’entre eux.
Pour lui, Naples est une métaphore du monde - cette pièce brille par son universalité - et le napolitain, un langage non folklorique, mais un cisèlement de la langue, pour enrichir l’italien. Comme dans Filumena Marturano, on ne sait si on doit rire ou pleurer, car l’humour y est plus fort que la tension dramatique. De Filippo a en effet toujours cherché à créer une « fusion tantôt harmonieuse, tantôt grinçante, entre rires et larmes, grotesque et sublime, drame et comédie » sans « division nette entre farce et comédie ».
Je suis acteur et j’ai aussi presque toujours été le metteur en scène des spectacles dans lesquels j’ai joué. Pour cette raison, après avoir travaillé intensément sur Molière (Le Misanthrope, Tartuffe), maintenant je trouve naturel le passage à Eduardo De Filippo ; les deux auteurs rassemblent, dans leurs textes, dans leurs scénarios, parole et geste ; le résultat d’ensemble n’exclue pas la mise en scène, mais la comprend.
De Filippo est l’auteur italien qui, avec la plus grande efficacité, favorise dans sa dramaturgie la rencontre, et non la séparation, entre texte et mise en scène. Affronter ses textes signifie s’insérer dans un équilibre instable entre écriture et oralité qui rend ambiguë et toujours surprenant son théâtre. En suivant avec humilité son enseignement, je cherche dans mon travail à ne jamais faire prévaloir le texte sur l’interprétation, l’interprétation sur le texte, la mise en scène sur le texte et sur l’interprétation. Il faut remplir de sens l’espace profondément silencieux qui existe entre le texte, les interprètes et le public, soir après soir sur la scène, réplique après réplique.
J’ai choisi Sabato, domenica e lunedì parce que De Filippo s’occupe d’une grande famille napolitaine où cohabitent trois différentes générations à un moment crucial de l’Histoire italienne : l’aube du boom économique qui a imposé un modèle de développement nouveau et imprévu, avec l’apparition de nouveaux désirs et de nouvelles modes, capables de créer d’un côté de l’euphorie, et d’un autre, un sentiment de confusion et de malaise. Un bouleversement socioculturel qui a marqué profondément - et influence encore - les destinées, les idées, les habitudes de notre pays.
Traduction Antoine Doré
Teatri Uniti est un laboratoire permanent pour la production et l’étude de l’art scénique contemporain. Il a été créé en 1987 à Naples, à partir de la fusion de trois compagnies de théâtre : Falso Movimento, Teatro dei Mutamenti et Teatro Studio di Caserta. Le travail du noyau artistique fondateur - Mario Martone, Antonio Neiwiller, Toni Servillo, Andrea Renzi, Licia Maglietta - s’est par la suite enrichi, au fil des années, de la collaboration avec d’autres auteurs et artistes de théâtre, cinéma, littérature, musique, peinture, arts visuels : entre autres, Enzo Moscato, Thierry Salmon, Leo De Berardinis, Steve Lacy, Anna Bonaiuto, Carlo Cecchi, Fabrizia Ramondino, Cesare Garboli, Enrico Ghezzi, Mimmo Paladino, Fabio Vacchi.
Teatri Uniti a obtenu une ample reconnaissance en mettant en scène, dans les plus importants théâtres italiens, des textes classiques et contemporains. Plusieurs spectacles dirigés par Martone e Servillo, à partir de textes de Sophocle, Yannis Ritsos, Enzo Moscato, Raffaele Viviani, Molière, Eduardo De Filippo ont été représentés en France, Allemagne, Grèce, Espagne, Colombie, Angleterre, Turquie, Suisse, Belgique, Venezuela.
Teatri Uniti a aussi une activité de production cinématographique et télévisuelle, et il a présenté avec succès des pièces de théâtre et des films aux Festivals de Venise, Cannes, Locarno et Berlin. Par ailleurs, les artistes de Teatri Uniti ont collaboré avec d’importantes institutions musicales telles que La Fenice de Venise, le Sao Carlos de Lisbonne et le San Carlo de Naples.
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