Spectacle en japonais surtitré en français. Dans le cadre du Festival d'Automne à Paris.
Deux femmes dialoguent sur scène. L’une, la blonde, est assise dans un fauteuil profond avec des accoudoirs et se lève de temps en temps pour rejoindre sa camarade. L’autre, la brune, les deux s’expriment en japonais, semble un peu plus figée et hoche la tête de façon mécanique. Elle cligne des yeux à des moments étranges, comme si chaque mot prononcé lui demandait un effort de concentration.
On sent que quelque chose n’est pas tout à fait naturel et pourtant ces deux femmes semblent bien se connaître. La blonde demande à la brune de lui réciter des poèmes, comme deux amies habituées à se confier, à se raconter leurs histoires. Il est question de réconfort et de mélancolie.
Et soudain, celle qui a la tête penchée et semble absorbée dans une forme de langueur nous apparaît pour ce qu’elle est : c’est un robot, un androïde, ses mouvement semblent limités comme ceux d’une personne âgée, elle ne peut se lever, elle est arrimée à sa chaise sans pouvoir se tourner, et pourtant elle paraît immanquablement plus forte et solide face à un être vivant qui évoque sa mort prochaine. Et de fait, l’androïde est là pour prendre soin de la fille blonde, atteinte d’une maladie incurable.
Après sa disparition, l’androïde n’a plus de raison de rester dans la chambre vide : on la transporte pour accomplir une nouvelle mission que les humains ne peuvent accomplir.
Ils nous ressemblent et nous répondent, ils peuvent aussi jouer un texte une fois quʼon les a programmés. Dans ces deux pièces qui parlent des aspirations et des doutes liés à la vie humaine, de notre désir de consolation, les robots introduisent un trouble captivant.
Quʼest-ce qui différencie un humain dʼun robot ? À première vue pas grand-chose. Les progrès de la technique étant ce quʼils sont. Intrigué, le dramaturge et metteur en scène Oriza Hirata, dont le théâtre flirte parfois avec la sciencefiction, a voulu tester cette différence en apparence infime dans lʼespace du plateau. Deux de ses nouvelles créations, Sayonara ver.2 et Les Trois Soeurs version Androïde, ont été écrites non pas pour des robots, mais en intégrant lʼexistence dʼandroïdes dans la trame même du drame. Dans ces deux spectacles, des comédiens en chair et en os se confrontent à lʼun des leurs qui nʼest autre quʼun robot. Une expérience qui nʼaurait pas été possible sans le travail de haute précision ayant permis la réalisation dʼun être baptisé « géminoïde », lequel, au lieu dʼêtre animé par un moteur électrique, est mu par un actuateur pneumatique qui confère à ses mouvements un aspect plus humain – jusquʼà imiter la respiration, par exemple.
Pour Oriza Hirata, ce robot nʼest pas un gadget, mais un élément déterminant de sa création. Dans Sayonara ver.2, des parents ont engagé un géminoïde pour prendre soin de leur fille atteinte dʼune maladie incurable. Sur scène, un robot et une actrice se donnent ainsi la réplique. Dans Les Trois Soeurs version Androïde, lʼaction se déroule sur fond de crise sociale dans une petite ville du Japon. Une des soeurs morte a été remplacée par un androïde par son père chercheur en robotique de pointe. Avec cette adaptation, Oriza Hirata catapulte Tchekhov dans le futur – un futur qui rappelle beaucoup nos préoccupations dʼaujourdʼhui.
41, avenue des Grésillons 92230 Gennevilliers
Voiture : Porte de Clichy, direction Clichy-centre. Tout de suite à gauche après le Pont de Clichy, direction Asnières-centre.
A 86 Sortie Paris Porte Pouchet. Au premier feu tourner à droite, avenue des Grésillons.