En anglais, surtitré.
L’œuvre a pour cadre le Lower East Side new-yorkais des années 40. Ce quartier pauvre abrite dans des conditions insalubres une société cosmopolite composée en majorité de populations issues de l’immigration.
L’histoire commence par une nuit d’été étouffante : une foule bigarrée est réunie au pied d’un immeuble. Les hommes sont en majorité des voyous portés sur la boisson et les femmes des commères qui font leurs choux gras de la liaison d’une habitante mal mariée, avec le laitier. Des tensions se nouent entre les habitants et des situations tragi-comiques aboutissent à un désastre.
Street Scene, écrite en 1947, est l’œuvre la plus remarquable de la dernière période créatrice de Kurt Weill (auteur de l’emblématique Opéra de quat’sous), qui s’éteindra prématurément trois ans plus tard.
Synthèse entre l’opéra européen (la structure en actes) et la comédie musicale américaine (les moyens techniques de Broadway), ce divertissement intelligent aboutit à un genre nouveau, l’opéra américain. Street Scene a modifié le musical de Broadway en en faisant un puissant outil de l’observation de la société.
La création par le Young Vic Theatre de Londres en septembre 2011 a été saluée par la critique :
« An extraordinary musical. » Evening Standard
« A show of such passion and power… a show that deserves to be seen. » The Guardian
Musique : Kurt Weill
Livret (basé sur sa pièce éponyme) : Elmer Rice
Lyrics : Langston Hughes, Elmer Rice
Mise en scène : John Fulljames
Remonté par : Lucy Bradley
Direction musicale : Tim Murray
Avec l'Orchestre Pasdeloup et le Choeur du Châtelet.
En 1947, Kurt Weill présente Street Scene, son ouvrage le plus lyrique, gratifié du premier Tony Award de l’histoire de Broadway. Dès la lecture de la pièce à succès d’Elmer Rice, prix Pulitzer 1929, il comprend qu’il tient « le sujet parfait pour un opéra américain, par son récit prenant et la richesse de ses protagonistes ». L’histoire de cette rue de New York lors d’une journée de canicule, avec ses personnages hauts en couleur, entre au répertoire du New York City Opera en 1959, neuf ans après la mort de Kurt Weill, réalisant ainsi le rêve du compositeur d’origine allemande : écrire un opéra américain.
Immigré aux États-Unis en 1935, Kurt Weill tentera de donner à Broadway un ton plus « opéra ». Entre 1936 et 1949 il compose huit partitions pour le fameux quartier des théâtres. Ainsi, avec ses comédies musicales sophistiquées, il est l’un des précurseurs du concept musical, cher à Stephen Sondheim, basé sur la psychologie des personnages.
Cette pièce représente l’apogée de mes efforts. (...) Ma formule est simple. En tant que compositeur de théâtre, je dois présenter ma musique de manière qu’elle touche un public réaliste. (...) Il y aura soixante-quinze pour cent de musique dans mon histoire et vingt-cinq pour cent de dialogues. Parfois, le dialogue sera souligné par l’orchestre lorsqu’un tournant dramatique se déploie. À d’autres moments, il n’y aura pas de musique du tout.
Je n’appelle pas mon œuvre « opéra ». Je la qualifierais plutôt de comédie musicale dramatique. Il y a certaines choses que l’on attend normalement d’un opéra et qui ne sont pas réalisables dans une production de Broadway. Par exemple, mon orchestre ne compte que trente-cinq musiciens, au lieu de quatre-vingts. Afin de préserver le réalisme, je ne peux pas raconter toute l’histoire en musique, mais le texte parlé doit se lier au song s’il veut parvenir à une fusion de ces deux effets. Le résultat rappelle un peu Carmen avec son dialogue parlé, tel qu’il est de mise dans l’opéra-comique, dans La Flûte enchantée de Mozart, ou Le Freischütz de Weber. (...)
Je n’ai pas tenté d’écrire des hits, comme on dit, et, bien que des arias apparaissent en tant que séquences de monologues dramatiques, elles ne sont là que dans le but d’intensifier l’action.
Kurt Weill
Paru dans The Musical Digest, New York, 1946 (titre original : Broadway Opera, Our Composer’s Hope for the Future). Texte publié dans Kurt Weill, de Berlin à Broadway, traduit et présenté par Pascal Huynh. © Éditions Plume, 1993.
1, place du Châtelet 75001 Paris