Têtes rondes et têtes pointues

du 12 mars au 19 avril 2005
2 heures

Têtes rondes et têtes pointues

Comment une société malade en arrive-t-elle à désigner un bouc émissaire, responsable de tous ses maux ? A travers une parabole grotesque et fantaisiste, Brecht tourne en dérision l’idéologie raciste. Une tragi-comédie musicale au pays du Grand Ibérin, où les Têtes Rondes décident d’exterminer les Têtes Pointues.

« Humaine est l’injustice mais plus humain est le combat contre l’injustice »  B. Brecht

La pièce
Extrait

Pourquoi monter Têtes Rondes et Têtes Pointues ?

Une parabole grotesque et fantaisiste

Comment monter Têtes Rondes et Têtes Pointues ?

La musique

Brecht aujourd’hui ?

Le Star Théâtre
La presse

Comment une société malade en arrive-t-elle à désigner un bouc émissaire, responsable de tous ses maux ? A travers une parabole grotesque et fantaisiste, Brecht tourne en dérision l’idéologie raciste. Une tragi-comédie musicale au pays du Grand Ibérin, où les Têtes Rondes décident d’exterminer les Têtes Pointues.

Cette pièce est le deuxième volet d’un diptyque initié avec le Marchand de Venise de Shakespeare en 2003.

Traduction de Michel Habart.

Le directeur du Théâtre :
Cher public, notre pièce va commencer. Celui qui l’a écrit a beaucoup voyagé (et ce ne fut pas d’ailleurs toujours de son plein gré). Dans cette pièce, il vous montre ce qu’il a pu voir. Pour dire en un mot le fin mot de l’histoire. Il a vu d’effroyables conflits. Il a vu le blanc combattre le noir sans répit. Un jaune terrasser un autre plus grand que lui, un Tutsi tué à coups de machette par un Hutu, un homme au nez camus frapper un nez crochu.

Notre auteur s’est enquis des causes du conflit. Eh bien, sachez qu’en ce moment dans tous les pays, on reçoit la visite du grand distributeur de crânes, sauveur providentiel des âmes, aux poches pleines, de nez de toutes sortes et de peaux de toutes les couleurs ; grâce à quoi il sépare la fiancée du fiancé et l’ami de son meilleur Ami. Il parcourt villes et campagnes avec les mêmes slogans : tout dépend ici bas du crâne que l’on a ! C’est pourquoi la distribution de têtes terminée, on tient compte des cheveux et des peaux et des nez. Si tu n’a pas reçu le crâne qui convient, tu seras traité comme un chien !

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La création de Têtes Rondes et Têtes Pointues répond à la volonté de poursuivre la réflexion engagée avec Le Marchand de Venise en 2003 autour du racisme et de la discrimination sous toutes ses formes. Mettre en relation ces deux textes nous semble cohérent et pertinent : les époques, les langages, les contextes sont différents, pourtant la question posée par Shakespeare et Brecht est la même, et elle est aussi la nôtre : l’altérité.

Qui est l’Autre ? Quel est l’Autre ? Quelle est notre relation à celui que l’on considère comme autre ? Rejet, peur, ambiguïté...Notre rapport à l’Autre est souvent difficile, toujours complexe et conduit parfois notre société en mal d’identité à l’exclusion et au racisme...

Chaque auteur a sa façon de parler du racisme mais c’est dans leur complémentarité que leur rencontre trouve toute sa cohérence et sa pertinence.
Shakespeare s’attaque au fonctionnement inconscient, primitif, pulsionnel et incontrôlable de la haine de l’Autre. Brecht en montre les mécanismes politiques et économiques, ou comment la lutte des races remplace la lutte entre les classes.
Shakespeare démonte, Brecht démontre. L’un s’attaque à l’irrationnel humain, l’autre au rationnel.
Shakespeare joue tous les ressorts de l’identification contre la caricature. Brecht déjoue l’identification par la caricature.
Shakespeare signe une tragi-comédie qui commence mal et finit bien. Brecht une comédie tragique qui commence drôlement pour s’achever dans le bain de sang de l’histoire.
Chez Shakespeare, l’Histoire est derrière, loin derrière l’histoire de la pièce. Chez Brecht, l’Histoire est devant, juste devant...

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Au pays du Yahoo, la révolte gronde. La situation économique est mauvaise et les propriétaires augmentent sans cesse les loyers, précipitant les fermiers et leurs familles dans la misère. L’Etat s’inquiète du soulèvement qui se prépare mais ne veut pas remettre en cause les privilèges des grands propriétaires qui le soutiennent.

La solution : diviser le pays en deux peuples ennemis, dont l’un sera désigné comme responsable de tous les maux. L’objectif premier, sous la houlette des Tombeurs de Chapeaux, est désormais l’éradication par les Tchouques, citoyens vertueux et légitimes à la Tête Ronde, des Tchiches, ces « Têtes Pointues » fourbes et apatrides, devenus les boucs émissaires de toute la société...

Brecht a écrit Têtes Rondes et Têtes Pointues en exil en 1936. Il fait de sa pièce une parabole grotesque et fantaisiste, une satire des théories raciales nazies et d’un antisémitisme en pleine expansion. Pas à pas, il déconstruit devant nous la gigantesque manipulation politique qui, exploitant le désespoir d’une société, a conduit à une haine rationalisée de l’Autre et à la mise à mort organisée d’un peuple...

Ce n’est pas une leçon d’histoire que Brecht nous donne ici mais la vision terriblement lucide d’une Histoire qui se répète sans cesse. Ses personnages allégoriques sont d’hier et d’aujourd’hui... et chaque acte de barbarie, chaque insulte s’inscrit dans une perspective historique... Inventer un autre à humilier et à exterminer est encore crime très répandu, et le Brecht exilé d’Allemagne pourrait être aujourd’hui Tutsi, Tchétchène ou Croate...

Têtes Rondes et Têtes Pointues est, sous le couvert de la fable et du grotesque, un appel à la conscience politique du spectateur, un appel à la réflexion . En transposant l’Histoire parfois lointaine dans le quotidien, si proche et si familier, Brecht fait de sa pièce une scène de rue, un cabaret du monde auquel on ne peut rester indifférent.

Le Brecht de Têtes Rondes et Têtes Pointues, c’est le Brecht de L’Opéra de Quat’Sous. Parce que les personnages servent certes la réflexion et la reconstitution symbolique, mais qu’ils ont aussi une humanité forte qui leur est propre et qui, malgré la volonté de distanciation de Brecht, nous touche, et interroge notre rôle dans l’Histoire. Et parce que la rencontre du théâtre et de la chanson donne à la pièce une ambiance de cabaret loufoque qui contredit l’image souvent trop didactique de Brecht.

Monter Têtes Rondes et Têtes Pointues, c’est enfin croire à la suite de Roland Barthes que : « Quoique qu’on décide finalement sur Brecht, il faut du moins marquer l’accord de sa pensée avec les grands thèmes progressistes de notre époque : à savoir que les maux des hommes sont entre les mains des hommes eux-mêmes, c’est à dire que le monde est maniable, que l’art peut et doit intervenir dans l’histoire, qu’il doit aujourd’hui concourir aux même tâches que les sciences dont il est solidaire, qu’il nous faut désormais un art de l’explication, et non plus seulement un art de l’expression, que le théâtre doit aider résolument l’Histoire en en dévoilant le procès, que les techniques de la scène sont elles-mêmes engagées. »

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Le parti-pris de mise en scène de Têtes Rondes et Têtes Pointues est, à l’inverse du Marchand de Venise, celui d’un dépouillement volontaire : tout se joue et se construit là sous nos yeux, avec un chapeau, un trait de peinture, une note de musique. Les décors sont en effet « peints » durant le déroulement de la pièce par un plasticien qui croque à la craie les toiles de fond de chaque scène en même temps qu’elles se déroulent, au fur et à mesure des besoins de l’action ou des personnages. Le dispositif scénographique est constitué d’un jeu de tableaux noirs mobiles où surgissent « en direct » les décors exigés par la situation et les acteurs. Ces palissades servent aussi à composer un espace différent pour chaque scène, ainsi qu’à faire office de paravents…

Dans la même perspective, les costumes sont peints et structurés (ou déstructurés) pour signifier les « grands traits » de chacun des personnages. Traits accentués, désignés aussi par des « crânes » et des postiches qui permettent à 7 comédiens d’endosser une trentaine de personnages. L’atmosphère est celle d’une opérette futuriste, puisque l’Amérique Latine de carnaval de Brecht nous semble plutôt devoir être, aujourd’hui, pour les spectateurs nourris de science-fiction, un pays imaginaire projeté dans le futur. Cette opérette dessinée dans l’espace crée une sorte de cubisme futuriste et loufoque qui prend vie avec le ballet musical qu’elle induit.

Un musicien joue sur scène une composition originale et participe aux côtés du peintre à la construction de la fable. Tous deux sont en effet de chaque côté du plateau et entrecroisent le texte de Têtes rondes et têtes pointues de courts extraits caustiques de Dialogues d’exilés de Brecht.

Les comédiens interprètent les chansons, mais travaillent aussi avec le musicien sur des passages chantés, rythmés etc. afin que la totalité du texte développe un rapport intime, critique et distancié avec la musique - un peu comme un Opéra de Quat’sous auquel ce « conte noir » s’apparente.

Théâtre et Histoire se fabriquent ainsi devant le public, dans un rythme soutenu qui mêle volontairement les genres : clown, farce, fable, théâtre, comédie musicale, opérette, performance plastique…

Tout comme dans Le Marchand de Venise, nous continuons à travailler sur le grotesque qui passe le tragique au crible du comique et en montre le pathétique dérisoire. A travers la fable ludique, la réflexion proposée échappe ainsi au didactisme et à la leçon de morale...

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Quand elle m’a demandé d’écrire la musique de Têtes Rondes et Têtes Pointues, Isabelle Starkier m’a fait part de sa volonté de donner à cette pièce une signification contemporaine. Elle souhaitait utiliser des images et un langage qui aient un sens pour les spectateurs aujourd’hui. La musique devait donc servir ce langage.

C’est pour cela que nous avons choisi de ne pas utiliser la musique composée par Eisler en 1936. En effet, si la composition originale d’Eisler est magnifique, elle est aussi très connotée : c’est une musique allemande des années 30. Or, notre objectif est de s’interroger à travers le texte allégorique de Brecht, sur notre monde du 21ème siècle. La musique devait donc s’adapter à notre époque pour mieux montrer l’actualité de la pièce.

Le fait de jouer en français demandait un langage rythmique particulier car la langue française est plus souple dans ses rythmes et ses sons que la langue allemande. Elle demande donc une musique élégante où les nuances de rythmes et de timbres jouent un rôle significatif.

La pièce de Brecht a un côté très didactique même si l’humour, certes grinçant, est aussi très présent. Le but n’est pas de faire un cours magistral au spectateur mais de l’engager à travers ses émotions et ses perceptions afin de le sensibiliser aux idées défendues par le texte. J’ai donc essayé, à travers ma musique, d’inviter le spectateur à une sorte de danse intérieure où le message intellectuel parfois très dur et pessimiste de Brecht est aussi lié au plaisir sensuel qui dérive de la musique. Cette composition sera donc une sorte de canevas entre l’optimisme et le pessimisme, le facile et le difficile, le cérébral et l’émotionnel, la réalité et le rêve d’un monde meilleur.

Si je devais décrire la musique que j’ai composée, je dirais donc qu’elle exprime trois choses essentielles :
- une nostalgie pour quelque chose qui n’existe pas, un désir pour l’impossible. Elle transparaît dans le choix des intervalles mélodiques, dans le traitement de la dissonance et de sa résolution (ou de sa non résolution), dans le traitement de la relation mélodie/harmonie avec une utilisation extensive des degrés loin de la racine de l’accord.
- l’humour. Il se retrouve dans la dissonance accentuée, dans le décalage qui est créé entre le texte et la musique, mais aussi à travers la balance entre répétition et évolution de la matière musicale.
- le mélange du banal et de l’inattendu. Il est rendu possible à travers l’utilisation de phrases musicales empruntées à l’univers enfantin, ou de clichés musicaux placés dans un nouveau contexte mélodique ou harmonique.

Têtes Rondes et Têtes Pointues a un message fort à communiquer et j’espère que ma musique favorisera la compréhension et l’adhésion à ce message.

Amnon Beham, compositeur-interprète

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Têtes Rondes et Têtes Pointues (1932-34) appartient à cet ensemble d’œuvres que Brecht a écrites de 1932 à 1941 pour dénoncer la montée du fascisme (dont Grand peur et misère du Troisième Reich que nous avons monté sous forme de Cabaret de la grand’peur). D’abord conçu comme une adaptation de Mesure pour Mesure de Shakespeare en 1931 pour être monté à Berlin, Brecht a infléchi le cours de la parabole devant la montée du régime nazi qui fit interdire la pièce en 1933. C’est en exil au Danemark en 1936 que fut ainsi donnée la première représentation de Têtes Rondes et Têtes Pointues.

Imprégnée de relents expressionnistes, c’est dans cette première pièce que Brecht met en place la notion même de distanciation (« Verfremdung »). A travers cette « parabole », modèle de « dramaturgie non aristotélicienne », il demande au metteur en scène et aux acteurs « le sacrifice sans réticence des effets d’illusion ». Ce qui ne signifie pas : « renoncer aux émotions. Et surtout pas au sentiment de justice, à la soif de liberté, à la juste colère : il (le théâtre) y renonce si peu qu’il ne s’en remet pas à leur présence, mais cherche à la fortifier ou à les faire naître. L’« attitude critique » qu’il s’efforce de faire adopter à son public, n’est à son sentiment jamais assez passionné». Contrairement à La Mère, écrit Brecht, Têtes Rondes et Têtes Pointues s’adresse « à un large public et tient un compte plus généreux de considérations purement récréatives ».

« Lors d’une représentation de Têtes Rondes et Têtes Pointues, j’ai vu la même scène faire pleurer certains spectateurs, en faire rire d’autres ; j’ai été satisfait des deux réactions ». Voilà ce qu’écrit Brecht à propos de la première représentation de Copenhague - qui nous a tout du long guidé dans ce travail fragile mais passionnant sur le grotesque : comment trouver l’humanité derrière la caricature formelle et apparemment déshumanisée, comment faire rire de ce qui fait pleurer et transformer soudain le rire en larmes, comment rendre l’humanité derrière l’inhumanité, ou comment trouver la complexité de la condition humaine sous l’apparent simplisme de la fable…

La difficulté d’une mise en scène de Brecht et particulièrement d’une pièce satirique et /ou historique, c’est de pouvoir faire jouer - comme on dirait de « donner du jeu » - texte et contexte : celui de l’époque mais aussi le nôtre, qui est la raison pour laquelle l’universalité du texte nous interpelle à un moment précis de notre histoire…Voilà qui semble vrai de tout théâtre, de Shakespeare à Claudel, mais plus particulièrement de Brecht qui travaille sur un théâtre épique, engagé, englué même, dans la glèbe de son triste temps.

Dans cette pièce écrite en 1934 et représentée en 1936, il semblait évident que la doctrine raciale de l’Etat nazi devait répondre à une logique économique. Ce qui fut et est toujours le cas dans sa mise en place et comme justification de sa « solution » politique : sur le lit d’une crise économique qu’elle semble pouvoir résoudre (« Cinq millions de chômeurs, c’est Cinq millions de juifs/d’immigrés en trop ! »). C’est ce que raconte Brecht dans la première scène de la pièce : le président abandonne son pouvoir à Iberin pour résoudre la misère et la révolte paysanne - en donnant « figure à ces maux » car « faute d’analyse, car la misère épuise la patience, le peuple cherche pour incarner les causes de sa misère un être familier qui ait une bouche, des oreilles et que chacun croise dans sa rue… ». Admirable définition du fonctionnement politique et social de l’antisémitisme et du racisme.

Ce que ne pouvait deviner Brecht ni la plupart des analystes, historiens et intellectuels marxistes de l’époque, c’est la non-fonctionnalité, la non-rentabilité ou le total illogisme économique de la doctrine raciale qui dépasse sa propre utilité (en tant que moyen) pour devenir une fin en soi… Sa propre logique est interne : elle n’est plus économique mais fantasmatique. Retour au Marchand de Venise

On le sait même si justement, en autre pour cela, beaucoup le nient : les camps d’extermination ne servaient à rien. Ils coûtaient de l’argent au régime, beaucoup d’argent. On ne faisait pas travailler les juifs pour « rentabiliser » la haine, on les exterminait à n’importe quel prix. C’est à cet endroit précis, soit au dénouement de Têtes Rondes et Têtes Pointues que se creuse l’abîme entre une pièce écrite « avant » et une représentation « après ». Avant et après la Shoa…

Dans la pièce de Brecht, tous les propriétaires se retrouvent au banquet, y compris le propriétaire tchiche que sa tête pointue avait fait arrêter et condamner à mort. Par contre tous les pauvres, têtes rondes comme pointues, sont les dindons de la farce… Brecht le dit clairement dans son prologue comme dans la dernière scène (« A tous deux (le riche tchiche et le pauvre tchouque) il a donné La vie et la liberté. Pourtant ce n’est pas mesure égale Qu’à tous deux il a donnée. Ils vivent tous les deux Mais l’un s’en va se mettre à table Et l’autre s’en va travailler Pour lui remplir son garde-manger »). Nous avons donc gardé ce texte mais écrit dans l’espace, l’acte non écrit par Brecht en 1934 : celui où Gusman le grand propriétaire tchiche est, en allant à la table du banquet, exécuté en direct car, nous le savons assez, pour le riche tête pointue et le pauvre tête ronde l’issue de tous les Etats fascistes est la même : la mort ou son équivalent… Cette « erreur » de Brecht nous semble non seulement compréhensible mais répandue : combien autrefois ont dit « plutôt Hitler que le Front populaire ? » et combien aujourd’hui encore seraient prêts à pactiser de nouveau avec le diable pensant, qu’en toute logique, la richesse ou le pouvoir reste un garant infaillible de la vie et que tout finira par rentrer dans l’ordre...

Le second intérêt et la seconde difficulté de cette pièce consiste à remettre en mémoire ce moment où le monde était divisé en deux camps : fascisme et communisme. L’espoir fou que Brecht met dans la lutte salvatrice de la Faucille pose aujourd’hui la question de : à quoi peut-on opposer le banquet sanglant des riches propriétaires et du nouvel ordre sur les ruines du monde ? Brecht fait finir la pièce par le chant de la Faucille incarnant la prise de conscience du paysan et l’espoir ténu mais fondamental des lendemains qui chantent. Nous avons longuement débattu au sein de la troupe et longtemps hésité sur nos lendemains à nous dont on ne sait qui les ferait encore chanter. Quelle part alors de nostalgie ou de trahison dans le fait de garder ou de supprimer ce chant final de la Faucille ? Quelle part de lecture ou de réécriture de la mise en scène face à un texte dont le sens est tant lié au contexte (l’espoir de l’alternative communiste en 36) qu’au texte (en tous temps donner de l’espoir et avoir foi en l’homme) ?

Nous avons en tout cas voulu garder ces tremblements entre texte et mise en scène qui nous semblent, par le fait même de poser question, être l’essence du théâtre - là où les limites de l’Histoire tremblent aux marges de sa représentation…

Isabelle Starkier, metteur en scène

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La Compagnie Star Théâtre a été créée en 1985 par Isabelle Starkier qui met en scène les spectacles proposés par la Compagnie et la dirige. Isabelle Starkier travaille avec un musicien compositeur et un décorateur ainsi qu’avec plusieurs comédiens qui l’accompagnent au fil de ses projets.

Le Star Théâtre défend le théâtre contemporain et la création de textes nouveaux autour de sujets d’actualité politique et sociale, mais cet engagement trouve également sa force dans la mise en perspective de textes classiques. Isabelle Starkier a ainsi mis en scène des textes d’auteurs vivants tels que Fatima Gallaire, Frédéric Sabrou, Guillaume Hasson, Jean-Jacques Devaux, Victor Haïm, Daniel Soulier... mais également des textes de Brecht, Marivaux, Pirandello, Feydeau ou Shakespeare.

Notre pari : considérer le théâtre - à l’intérieur des murs de la Cité - comme un rassemblement par le rêve et par le rire par sa réflexion au miroir de sa représentation. Le théâtre est pour nous, l’outil social de la collectivité car il permet une circulation du tissu social, une reconquête de la parole que ce soit dans l’échange qui suit une pièce qu’au cours d’un stage de sensibilisation. Mais le Théâtre réside aussi dans sa propre finalité artistique : il est à la fois un luxe et une nécessité, une fin et un moyen...

Le Star Théâtre associe donc depuis toujours dans un même geste création et diffusion, en banlieue parisienne principalement, notamment dans le cadre de ses résidences. Cela s’accompagne d’une réflexion sur le public du théâtre actuel. Nous souhaitons en effet toucher un très large public et nous revendiquons un théâtre citoyen « dont on ne pourrait pas plus se passer que de pain » comme le disaient les nouveau émigrants juifs d’Amérique à propos de leur théâtre yiddish.

Cette volonté de faire un théâtre accessible à tous nous pousse à vouloir toucher à la fois le public institutionnel et habitué des CDN et CDR (Reims en 1992 et 1994, Lille en 1996, Lorient en 1993 et 1995, Rouen en 1996), des Scènes Nationales (La Coupole en 1988, 1992 et 1995) et autres théâtres identifiés à Paris ou ailleurs, mais aussi un public qui ne va pas ou très peu au théâtre par méconnaissance ou par crainte... et que nous allons rencontrer en jouant dans les appartements, les maisons de retraite, les maisons de quartier, les médiathèques, les établissements scolaires, les associations, les prisons, les hôpitaux... Grâce à des formes légères dans la structure comme dans le contenant, nous essayons de susciter une interrogation, un questionnement en allant chercher le public là où il se trouve pour l’inciter à se rassembler à se réapproprier le théâtre. C’est le Théâtre Hors Théâtre (THT) ou théâtre à domicile qui permet d’établir un rapport direct entre les créations et le public en donnant ou en redonnant l’envie d’aller au théâtre pour y retrouver une émotion et une équipe. « Si tu ne vas pas au théâtre, le théâtre ira à toi... »

Il ne s’agit en aucun cas de promouvoir une culture théâtrale à deux vitesses en séparant animation socio-culturelle et théâtre sacralisé en salle, mais bien au contraire de trouver un même mouvement qui traverse les différents publics et les amène à se retrouver autour de pièces dont l’exigence qualitative est la même.

C’est dans cet esprit que nous avons mené un travail de répertoire avec des pièces dont les thématiques et les formes de croisent et se répondent.

Autour de ses spectacles, le Star Théâtre propose des journées de sensibilisation au sein des établissements scolaires afin de faire découvrir la fabrication de l’objet théâtral aux élèves et de préparer leur venue en salle. L’intervenant est toujours un comédien de la compagnie habitué à ce genre d’intervention et répondant à une charte pédagogique.

Il s’agit d’appréhender un texte, d’apprendre à le lire, à le manipuler et à le jouer : c’est donc un travail autour de l’improvisation, de la reconstruction d’une situation dramatique et de l’interprétation qui est ici proposé. Ce travail permet d’une part, une découverte et un développement par l’élève de ses capacités d’expression et de créativité. D’autre part, il permet d’amener les élèves à découvrir le théâtre et sa fabrication de l’intérieur, et par là même de le leur rendre plus proche et plus accessible.

Enfin, des débats sont souvent proposés à la fin des représentations. Les spectateurs peuvent ainsi se rencontrer et échanger autour du spectacle, de ses thèmes, de la mise en scène...

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« Tout le théâtre de Brecht est à la fois grave et festif. La musique, le cabaret, la truculence des personnages, le divertissement, servent d’ingrédients à la découverte de cette société humaine capable du meilleur comme du pire. » Revue Spectacle

« Cette adaptation est un travail titanesque au service d’un message fort : démontrer comment notre rapport à l’autre peut, dans un contexte de crise, conduire à l’exclusion, au repli communautaire et au racisme. » La Marseillaise

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Sélection d’avis du public

Têtes rondes et têtes pointues Le 27 octobre 2006 à 11h57

Trés belle mise en scéne, trés belle pièce, à l'air où le racisme et l'intolérance sont bien présents il y a là matière a réfléxion. Bravo

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Têtes rondes et têtes pointues Le 27 octobre 2006 à 11h57

Trés belle mise en scéne, trés belle pièce, à l'air où le racisme et l'intolérance sont bien présents il y a là matière a réfléxion. Bravo

Informations pratiques

Espace Rachi - Centre d’Art et de Culture

39, rue Broca 75005 Paris

  • Métro : Censier - Daubenton à 375 m
  • Bus : Port Royal - Berthollet à 142 m, Monge - Claude Bernard à 182 m, Les Gobelins à 251 m
Calcul d'itinéraires avec Apple Plan et Google Maps

Plan d’accès

Espace Rachi - Centre d’Art et de Culture
39, rue Broca 75005 Paris
Spectacle terminé depuis le mardi 19 avril 2005

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