Tristan

À Gennevilliers, Eric Vigner livre une très belle et fougueuse version du célèbre mythe de Tristan et Yseult. À ne pas manquer !
C’est un héros aux multiples facettes que présente Eric Vigner dans cette version très personnelle de Tristan et Yseult. Il revisite la légende dans un spectacle où temps et espace se télescopent sous le signe du mythe.
  • Revisiter la légende

Cʼest un héros aux multiples facettes que présente Eric Vigner dans cette version très personnelle de Tristan et Yseult où pour la première fois le metteur en scène monte un de ses propres textes. Loin de toute reconstitution historique, il revisite la légende dans un spectacle où temps et espace se télescopent sous le signe du mythe.

De Béroul à Wagner en passant par Chrétien de Troye, l’histoire de Tristan et Yseult a connu de multiples versions au cours des siècles. Eric Vigner que l’on connaît surtout comme metteur en scène s’est penché à son tour sur cette légende. Il en donne une lecture profondément personnelle. Loin de se cantonner au XIIe siècle, son Tristan rayonne à travers les âges et parle beaucoup de notre époque. Il est multiple, à la fois sésame magique ouvrant en grand les vannes de l’imaginaire et pôle d’attraction magnétique. Corps blessé, fourbu rejeté à demi mort par la mer sur une grève bretonne au début du spectacle, ses épreuves ne prennent jamais fin. Le texte abonde en allusions : aux commandos de marines basés à Lorient, à Othello, à Marguerite Duras, à Maurice Maeterlinck, à l’Apocalypse de Jean, aux réfugiés…

Sans s’identifier au héros, Eric Vigner y projette beaucoup de lui-même. Tristan est un « enfant de la mort » ; comme le Chasseur Gracchus de Kafka, il est condamné à errer à jamais entre deux mondes. Précisons que c’est la première fois que le metteur en scène monte un de ses propres textes. Un peu comme l’a fait Frédéric Boyer dans Rappeler Roland, d’après La Chanson de Roland, il a voulu « rappeler Tristan », c’est-à-dire raviver un mythe qui est aussi un souvenir, une lecture d’enfance qui l’accompagne depuis toujours. Tristan, à la fois héros et anti-héros à qui est confié systématiquement le sale boulot : tuer un géant, ramener Yseult d’Irlande pour qu’elle épouse le roi Marc… Tout ça pour finir au banc de la société à cause son amour fou – passion d’autant plus intense qu’elle est illicite – pour la belle Yseult.

  • La presse

« Une variation autour du mythe de Tristan et Iseult (ou Iseut), libre comme l’air marin, foisonnante comme un bouquet d’algues folles, un spectacle iodé complètement barré dans les vertiges de l’amour, celui du théâtre n’étant pas le dernier servi. (...) Ce spectacle, multipliant les fragments de désirs amoureux, est un tourbillon. » Jean-Pierre Thibaudat, Blog Théâtre et Balagan

« Tristan, d'Eric Vigner, texte inspiré de Tristan & Iseult, en rappelant la légende d'origine, avec la colère, la passion, le désir... C'est l'histoire d'une jeunesse extrême. » Joëlle Gayot, France Culture

« Éric Vigner conjugue la légende de Tristan et Iseult dans une version personnelle où temps et espace se télescopent. (...) Tristan est plusieurs. Il rayonne à travers les âges et parle beaucoup de notre époque. (...) L'esthétique du spectacle mêle ainsi les époques, proposant une fête de l'imaginaire volontairement décalée, où s'engouffre comme par bourrasques la réalité brutale du monde contemporain. » Hugues Le Tanneur, Les Inrocks

« Un temple en l'honneur de la grâce juvénile jetée dans les affres de l'amour à mort. (...) Ce qu'il y a d'attachant de prime abord dans la partition verbale composée par Vigner, c'est qu'on sent qu'elle lui importe viscéralement, qu'elle lui est en somme consubstantielle et prend place dans le réseau complexe de ses prédilections artistiques. Il y a surtout que la représentation, dans son ensemble, participe d'un vif éloge d'une jeunesse à la beauté effrontée. » Jean-Pierre Léonardini, L’Humanité

  • Note d'intention

Ce qui reste de Tristan...

Lʼhistoire est là depuis toujours, lʼamour est là depuis toujours. Que reste-t-il de ces figures héroïques, archaïques, ancestrales ? Comment ces figures éternelles arrivent-elles jusquʼà nous ? Quʼest-ce quʼelles nous enseignent ? Que reste-t-il de Tristan et Iseult ? Un imaginaire, une légende, un mythe, celui du territoire dʼoù je viens, la Bretagne, mais aussi lʼIrlande, la Cornouailles, le paysage celte, territoire hostile, rude où lʼhomme lutte avec les éléments.

Une langue étrangère dʼavant la littérature savante, une langue qui est la source de la littérature, le passage de lʼoral à lʼécrit. 
Ce qui reste de Tristan, une histoire en morceaux que je dois terminer. La part manquante où la création entre en œuvre. Ce qui reste de Tristan cʼest lʼapprêté, la violence de la nature faite à lʼhomme, la mer, la pierre, le vent. La forêt qui les tue, les chiens.
 Ce qui reste de Tristan cʼest la magie comme moteur dramatique au même titre que la raison : le philtre, les créatures extraordinaires, le cheveu dʼIseult apporté par une hirondelle. Le merveilleux du Moyen Âge. Ce qui reste de Tristan cʼest la jeunesse – sans père, héroïque – lʼextrême jeunesse de ces enfants qui veulent mourir – romantiques avant lʼheure.

Tristan et Iseult, des jeunes gens en colère, en révolte contre lʼordre établi. Sans illusions sur leur avenir ou destinée, ils préfèrent le suicide à lʼabandon. Ce qui reste de Tristan ce sont les rituels dʼamour et de mort. 
Ce qui reste de Tristan cʼest la force dʼun mythe très ancien qui traverse le temps et se réactive dans lʼœuvre dʼautres écrivains de Claudel à Duras. 
Avec Tristan commence un cycle, ce sera Partage de Midi de Claudel en 2015 et Le Vice-Consul de Duras en 2016, pour en finir avec Tristan, pour retourner à la page blanche.

Eric Vigner

  • Entretien avec Eric Vigner

Pourquoi avoir choisi de travailler sur Tristan et Iseult ? Est-ce lié à votre culture ? Tristan de Loonois, cʼest un nom breton. Un jeune homme du Léon, de Bretagne. On sait lʼimportance quʼa pour vous Lorient et son histoire avec lʼailleurs, la route des Indes et le rapport à lʼétranger. Ici vous vous retrouvez face à la mer, lʼIrlande et la Cornouailles. Tout se concentre autour de la mer de Bretagne, est-ce un moyen pour vous dʼêtre plus proche de votre territoire ?
Je suis breton comme Tristan mais ce mythe celte dont lʼhistoire se concentre entre la Bretagne, lʼIrlande et la Cornouailles ne se limite pas à ce territoire géographique ni à son imaginaire. Il est dit que lʼon trouve déjà cette histoire dans le conte persan Wis et Ramin. La légende de Tristan et Iseult appartient au monde. Tristan et Iseult cʼest lʼune des grandes histoires dʼamour tragique qui va voyager et influencer la littérature. Les premières traces écrites datent du IXe siècle. Ce qui mʼintéresse cʼest de voir comment ce mythe donne Roméo et Juliette de Shakespeare ou Bérénice de Racine ou Pelléas et Mélisande de Maeterlinck ou plus récemment Partage de Midi de Claudel et Le Vice-Consul de Duras. Pour paraphraser mon ami Frédéric Boyer, mon projet est de rappeler Tristan, aujourdʼhui, sur la scène du théâtre, au début du XXIe siècle.

Vous me disiez que vous commenciez le premier volet dʼune trilogie consacrée à ce mythe avec la création de Tristan puis celle du Partage de Midi de Paul Claudel et enfin une adaptation du Vice-Consul de Marguerite Duras...
Cʼest un cycle sur les rituels dʼamour et de mort où la mer est présente. Il est généré par la légende. Tristan sera créé en novembre 2014 à Lorient dans le cadre du Festival Mettre en Scène. Le second volet que je créerai en 2015 sera la mise en scène du Partage de Midi de Paul Claudel où la question de lʼamour ajoutée à celle de Dieu se déplace chez des personnages au milieu de leur vie. Ils prennent la mer pour la Chine pour espérer recommencer une nouvelle vie. Le dernier volet qui clôturera ce cycle en 2016 est celui des fantômes de ces héros qui prennent cette fois les traits dʼAnne-Marie Stretter et du vice-consul de Lahore dans Le Vice-Consul de Marguerite Duras. Ce roman qui appartient au cycle indien de lʼécrivain situe lʼaction dans une ambassade de France qui nʼa jamais existé dans les années 30 à Calcutta à la fin du colonialisme. Ces trois spectacles se répondent les uns les autres. Ce qui mʼintéresse cʼest la transformation du mythe à travers ce voyage littéraire. Tristan et Iseult deviendront Ysé et Mesa dans Le partage de midi puis Anne -Marie Stretter et Jean-Marc de H. dans Le vice-consul.

Lʼétrangeté de la légende de Tristan et Iseult cʼest que nous avons plusieurs versions, en France et en Allemagne. Cʼest la première fois que vous choisissez un texte qui nʼest pas écrit – ou même trop écrit quand on voit les nombreuses versions qui existent. Or vous avez beaucoup travaillé la littérature écrite, le rapport au livre, des auteurs ont écrit pour vous — pourquoi prendre un texte dont on nʼa que des fragments ?
Il nʼy a pas en effet un livre qui serait lʼhistoire de Tristan et Iseult mais une multitude de fragments qui sont réunis pour la première fois par un spécialiste du monde médiéval Joseph Bédier au début du XXe siècle. Ce texte reconstitue lʼensemble des épisodes de la légende avec les fragments qui proviennent du XIIe siècle principalement de Béroul, Chrétien De Troyes, Thomas dʼAngleterre, auxquels il a ajouté d'autres fragments (Eilhat D'Oberg, fragments anonymes...) pour constituer un récit faisant aujourd'hui référence. En 2014, on peut donc réécrire lʼhistoire, reprendre ces fragments de discours amoureux entre Iseult et Tristan et les donner à jouer, à entendre, à vivre. Mon projet nʼest pas de raconter tous les épisodes de la fable mais dʼen rendre compte dʼune manière sensible et contemporaine, de voir ce quʼil en reste et de la confronter à la jeunesse. Ce qui me passionne cʼest la part manquante, celle qui reste à inventer. Lʼinachevé originel de ce mythe et sa capacité de se transformer qui nous autorise à le reprendre pour créer ici et maintenant.

Lʼamour est le moteur principal de votre travail au théâtre. Vous avez mis en scène Othello, Pluie dʼété à Hiroshima, La Bête dans la jungle... Shakespeare, Racine, Duras... Comment intégrez-vous dans votre réflexion cette légende médiévale ?
Ce premier volet associe lʼamour et la jeunesse dans un imaginaire qui est celui du Moyen Âge. Le Moyen Âge a une rudesse, une violence, une cruauté et une crudité magnifiques. Ce nʼest pas un monde policé, mais un monde dur, fait de granit, de forêt, dʼocéan, où la nature la plus farouche exalte la passion des amants. La mer est un élément fondamental dans Tristan également, lʼélément matriciel en quelque sorte, celui qui unit et sépare.

Quel traitement esthétique allez-vous appliquer à ce mythe qui a généré des œuvres indissociables comme lʼopéra de Wagner ou les toiles de Waterhouse ? Comment le metteur en scène et plasticien que vous êtes va-t-il sʼapproprier ces figures incandescentes et ces espaces perdus que sont Tintagel et la forêt du Morois ?
Je reprends un travail esthétique que jʼai mené avec Orlando de Haendel en octobre dernier et je le poursuis avec Tristan. Comme pour Orlando, je voudrais créer une dramaturgie plastique qui exalte la palette du sentiment amoureux qui va de la naissance du désir à la folie suicidaire. Pour Tristan, ma démarche est proche de celle de la construction dʼun opéra, avec du texte bien sûr puisque cʼest un récit de tradition orale, mais où la musique et le chant sont très présents, cʼest par le chant quʼIseult guérit Tristan. Le Moyen Âge est le monde de lʼenluminure, du livre dʼheures. Le spectacle se développera par tableaux, par chapitres, quʼils soient purement plastiques, musicaux ou théâtraux.

Est-ce que le héros Orlando a en quelque sorte convoqué Tristan ?
Je pense sincèrement que chaque création est la partie dʼun tout qui finit par constituer une œuvre. Une production en entraîne une autre. Avoir travaillé Orlando de Haendel dont la source originelle est le poème de LʼArioste au début du XVIe siècle me conduit à désirer rencontrer Tristan qui est antérieur et qui est aussi lʼhistoire dʼun combattant amoureux.

Vous avez choisi des jeunes comédiens pour porter cette histoire. Pourquoi ce choix de la jeunesse pour jouer cette histoire ancienne qui a presque mille ans ?
Lʼextrême jeunesse est très touchante dans Tristan et Iseult. Cʼest ce qui est très beau. Vaincre la malédiction. Aller au bout de son désir. Jusquʼà la mort. Revenir à la légende dʼorigine cʼest retrouver la colère, la passion, lʼélan du désir pur et indomptable confronté à la brutalité de la nature et à la violence dʼun monde cruel, cʼest se brancher à lʼénergie vive de la jeunesse.

Propos recueillis par Olivier Dhénin, mars 2014.

Sélection d’avis du public

Original Par VALERIE C. - 6 mars 2017 à 14h39

Le sujet a été revisité de façon plus moderne et bien qu'on ait du mal à certains moments à se replonger dans l'histoire ancienne, le jeu des acteurs est excellent. Quelques expressions peuvent paraitre trop actuelles par rapport à l'univers de ce mythe littéraire mais le décor est détonnant et et la mise en scène impressionnante. Alexandre Ruby excelle dans cette pièce. Valérie C.

Grotesque Par Philippe G. - 22 février 2017 à 23h23

Pièce dont la prétention et le grotesque laissent pantois. Sièges confortables qui permettent néanmoins de dormir confortablement

surprenant Par Jean P. - 22 février 2017 à 08h30

Au début je me suis demandé où je me trouvais tant l'énumération des faits graves récents m'a perturbé Ensuite je suis rentré dans ce texte qui mélange "aujourd'hui" et "la légende" Les jeunes comédiennes et comédiens qui sont sur scène sot tous très bons. Mention pour les décors et lumières

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Original Par VALERIE C. (2 avis) - 6 mars 2017 à 14h39

Le sujet a été revisité de façon plus moderne et bien qu'on ait du mal à certains moments à se replonger dans l'histoire ancienne, le jeu des acteurs est excellent. Quelques expressions peuvent paraitre trop actuelles par rapport à l'univers de ce mythe littéraire mais le décor est détonnant et et la mise en scène impressionnante. Alexandre Ruby excelle dans cette pièce. Valérie C.

Grotesque Par Philippe G. (1 avis) - 22 février 2017 à 23h23

Pièce dont la prétention et le grotesque laissent pantois. Sièges confortables qui permettent néanmoins de dormir confortablement

surprenant Par Jean P. (125 avis) - 22 février 2017 à 08h30

Au début je me suis demandé où je me trouvais tant l'énumération des faits graves récents m'a perturbé Ensuite je suis rentré dans ce texte qui mélange "aujourd'hui" et "la légende" Les jeunes comédiennes et comédiens qui sont sur scène sot tous très bons. Mention pour les décors et lumières

Informations pratiques

Théâtre de Gennevilliers (T2G)

41, avenue des Grésillons 92230 Gennevilliers

Accès handicapé (sous conditions) Bar Grand Paris Hauts-de-Seine Librairie/boutique Restaurant
  • Métro : Gabriel Péri à 464 m
  • RER : Les Grésillons à 1 km
  • Bus : Marché de Gennevilliers à 15 m, Place Voltaire à 293 m, Gabriel Péri - Métro à 371 m
  • Transilien : Asnières-sur-Seine à 2 km
  • Voiture : Porte de Clichy, direction Clichy-centre. Tout de suite à gauche après le Pont de Clichy, direction Asnières-centre.
    A 86 Sortie Paris Porte Pouchet. Au premier feu tourner à droite, avenue des Grésillons.

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Plan d’accès

Théâtre de Gennevilliers (T2G)
41, avenue des Grésillons 92230 Gennevilliers
Spectacle terminé depuis le dimanche 26 février 2017

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