Issus des townships de Johannesburg, Via Katlehong séduit les publics du monde entier avec des shows à la vitalité contagieuse qui célèbrent la culture et les rythmes de l'Afrique du Sud. Avec ses danses et ses chansons menées tambour battant, l'exaltant Sophiatown ne déroge pas à la règle...
Dans les années 1960-1970, sous le régime de l’apartheid, les populations rurales noires d’Afrique du Sud ont été déplacées vers les grandes villes et regroupées dans les townships. C’est dans ces ghettos, marqués par le chômage et la criminalité, que naît la culture pantsula, qui intègre mode, musique, danse, codes gestuels et parler, et trouve son terrain d’expression dans la rue. Elle s’est particulièrement développée à Sophiatown. Zone multiraciale, berceau de nombreux styles de musiques et de danses (le tsabatsaba ou le kofifi, l’ancêtre de la pantsula), ce quartier de Johannesburg, détruit à la fin des années 1950, demeure encore aujourd’hui le symbole de la lutte contre l’apartheid, ainsi qu’une référence pour les écrivains artistes noirs engagés.
Sophiatown est un spectacle au long duquel trois musiciens de jazz, danseurs et danseuses font revivre les moments forts de la culture sud-africaine, où les danseurs crient, sifflent, tapent des pieds et des mains, et où l’assistance participe à cette fureur de vivre.
Créée en 1992, la compagnie tire son nom du township de Katlehong dans l’East Rand (Johannesburg). Dans tous ses spectacles, Via Katlehong Dance, récompensée par de nombreux prix internationaux, défend la culture contestataire pantsula. Dans les années 1990, alors qu’une Afrique du Sud multiraciale se met lentement en place, Via Katlehong Dance poursuit son combat protestataire à travers ses spectacles et performances qui combinent la danse pantsula, la tapdance, le step et le gumboot (danse de mineurs).
Conception et chorégraphie : Via Katlehong.
1ère partie : Dominique Hervieu - 5 danseuses
2ème partie : Via Katlehong - 9 danseurs, 3 musiciens jazz
« Ils ont la fierté superbe des ambassadeurs mais une authenticité brute de décoffrage qui détonne. […] Il s’agit de célébrer les couleurs, les rythmes, la poésie tant qu’on est là pour les sentir. Danses et chansons se succèdent tambour battant, sautant d’une saynète à l’autre, conviviales, variées. » Ariane Bavelier, Le Figaro
« On se régale » Marie-Christine Vernay, Libération, 13 décembre 2013
L’idée initiale est de témoigner et d’apporter un éclairage sur la fameuse période de Sophiatown dans les années 1950. Sophiatown est un quartier de Johannesburg détruit à la fin des années 1950. Il fut une zone multiraciale, berceau de nombreux styles de musiques et de danses. Il fut également l’endroit qui incarne le début de la lutte contre l’apartheid et demeure encore aujourd’hui le symbole de la lutte des artistes.
Sur des musiques sud-africaines devenues internationalement renommées, des tubes de Dorothy Masuka ou Miriam Makeba, le spectacle mettra en scène des couples dansant le tsaba-tsaba ou le kofifi, l’ancêtre de la pantsula. Accompagnés de trois musiciens de jazz, ils nous feront revivre ces moments forts de la culture africaine, l’époque de « happy Africa » !
Avec la destruction de Sophiatown, le père Huddleston se lamentait : « Sophiatown est finalement rayée de la carte et sa population dispersée ; je veux croire que l’Afrique du Sud aura perdu là non seulement un lieu mais aussi un idéal. » Même au moment où les bulldozers du gouvernement rasaient les maisons, Sophiatown généra une effervescence culturelle inégalée dans l’histoire urbaine de l’Afrique du Sud. Même à l’état de souvenir, Sophiatown est un symbole, un point de référence légendaire pour les écrivains noirs et artistes de toutes sortes.
Aujourd’hui, nombre de musiciens et professionnels de la culture sont à la recherche de l’esprit artistique autrefois incarné par ce quartier légendaire.
Créer avec les filles de via kathleong, c'est d'abord faire connaître leurs danses que seuls les hommes ont aujourd'hui amenées jusqu'à nous. Et rétablir cette vérité : le Pantsula n'est pas une danse réservée aux hommes ! Voir ces filles s'emparer de ce déferlement d'énergie, de chant, de rythme est une tempête chorégraphique. Créer pour elles, c'est aussi pour moi repartir de la danse et de la danse seule, parce que je pense que leur art se passe de scénographie, se passe aussi quasiment de dramaturgie. Ou plutôt, il s'agira d'une dramaturgie qui partira du corps.
Je tenterai de créer un espace « spectaculaire » qui s'appuiera sur un langage totalement autonome et artificiel qui naîtra de la rencontre de la musique, du mouvement, du chant et de la lumière. Ce qui est fort, c'est leur intensité et leur classe, leur tradition et leur disponibilité à inventer. Ce qui stimule mon imaginaire, c'est « partir de ces danseuses » sans obligation de préserver un répertoire, ni de témoigner, ni de dénoncer, ni de montrer une « danse réalité », c'est « partir d'elles » pour redécouvrir avec elles le pantsula, celui de leurs rêves d'aujourd'hui et de leurs nécessités d'artistes.
Pourquoi avoir choisi de faire un spectacle autour de Sophiatown ? Est-ce une façon de prendre une position politique ? Ou simplement un travail de mémoire ?
Les deux à la fois, l’art et la politique sont comme frère et soeur. C’est une façon de réfléchir à de nouvelles approches artistiques, à un autre théâtre créatif qui puisse utiliser notre énergie pour évoquer des sujets liés à des questions sociales. Sophiatown, par exemple, est un très bon modèle pour notre nouvelle démocratie. Avant que le gouvernement d’Apartheid n’expulse les gens de leurs propriétés, c’était le seul endroit où la race n’était pas un problème et où des gens avec des cultures différentes, des origines ethniques différentes pouvaient vivre ensemble.
Comment avez-vous construit la pièce ? Vous êtes vous inspirés d’événements réels ?
Oui nous nous sommes inspirés d’une histoire vraie qui s’est déroulée à Sophiatown au début des années 60. Nous ne sommes pas partisans de la fiction. Nous vivons dans un monde réel, nous sommes traversés par une réalité qui mérite discussion, qu’il est important d’explorer. Nous voulons être des artistes sudafricains et nous pensons qu’il est important de rester en contact avec le monde riche — riche d’histoires et de traditions — qui est celui de l’Afrique du Sud d’aujourd’hui si nous voulons vraiment avoir notre mot à dire.
Via Sophiatown exploite des danses spécifiques à l’Afrique du Sud comme le gumboot ou la pantsula. Pouvez-nous dire ce qui fait la spécificité de ces danses ?
Le gumboot est très lié à l’esclavage minier. Il a été forgé par des hommes qui venaient de différentes cultures, de différents villages, et qui se sont retrouvés dans les mines d’or autour de Johannesburg. Ils n’avaient pas le droit de parler, ils étaient enchaînés, alors ils ont développé un système de communication avec leurs bottes et avec leurs chaines, faits surtout de coups et de percussions. À l’origine, c’était un code. Et puis, pendant les pauses,
cela s’est développé en danse. Ils utilisaient les gestes des gardiens et des propriétaires de mines et les retournaient, jouaient avec, se les appropriaient à leur façon. La pantsula est née dans les townships des années 50 et n’a cessé d’évoluer depuis. C’est un mélange unique de danse, de mode, de musique, de politique. C’est en fait une façon que les Noirs sud africains ont eu de coder en danse leurs expériences de l’Apartheid pour pouvoir les exprimer. Dans les deux cas, au fond, la danse sert à se réapproprier la possibilité de parler, son identité, sa fierté.
L’un d’entre vous a dit à un journaliste, « la pantsula n’est pas seulement une danse, c’est un mode de vie ! » Quel mode de vie ?
La survie !
C’est la première fois que des danseuses rejoignent votre compagnie. Pourquoi avoir décidé de vous ouvrir aux femmes ? La danse sud africaine est-elle très « genrée » ?
En fait, nous avons commencé à travailler avec une femme en 2011 en invitant Hlengiwe Lushaba à nous rejoindre pour un spectacle cabaret. Dans cette nouvelle pièce, il y a quatre danseurs et quatre danseuses. C’est lié à l’histoire même de Sophiatown où les femmes ont joué un important rôle politique. Mais il est vrai qu’à l’origine le gumboot ou la pantsula étaient spécifiquement des danses d’hommes. Elles sont nées dans des milieux masculins, elles parlaient de la dureté du travail, de la violence des rapports sociaux. Elles étaient moins une forme d’art qu’une forme d’expression de la culture populaire, une façon de négocier avec la réalité. Aujourd’hui, ce n’est plus la même chose. Il s’agit plutôt de célébrer un héritage que de vivre la danse dans les conditions sociales qui l’ont fait naître. Ces danses sont de plus en plus des formes d’art et du coup il y a de plus en plus de femmes qui se mettent à les danser, à se les approprier à leur tour.
Est-ce une danse très écrite ou relativement improvisée ?
Notre danse n’est pas écrite à l’origine. Durant le travail, elle est le libre flux d’individus uniques qui s’expriment, mais les improvisations restent liées à l’époque où se déroule l’histoire, ou au thème du spectacle. Ensuite, au cours des répétitions, tout est plus ou moins figé, nous décidons de garder des choses et d’en jeter d’autres mais nous laissons toujours la possibilité à des moments d’improvisation durant le spectacle.
Quelle est la situation de la danse aujourd’hui en Afrique du sud ? Est-ce difficile d’y faire vivre une compagnie ?
Ce n’est pas très facile. Il n’y a pas beaucoup de soutien public à la danse car il y a tellement d’autres domaines plus urgents qui aspirent l’argent dans notre toute jeune démocratie. Et puis l’Afrique du Sud n’est pas une société qui a toujours témoigné un grand respect pour l’art. Mais, malgré tout, la danse innove toujours plus chaque année. Nous ne sommes pas encore arrivés mais la lutte continue…
Propos recueillis par Stéphane Bouquet, mai 2014
Formidable spectacle ! j'y étais pour la dernière ! très belle réussite que cette troupe qui nous transmet toute leur belle énergie. On revit à chaque tableau, devant de belles photos en noir et blanc l'ambiance du quartier de Sophiatow l'apartheid : quelque part on est transportés en Afrique du Sud. Bravo !
L'histoire d'un quartier en quelques tableaux colorés, dynamiques et émouvants. Ca respire la joie de vivre, et rappelle le passé pas si lointain de l'apartheid. De belles danses, de belles voix, une énergie communicative, quelques images d'archives pour poser le contexte. Le spectacle est très réussi et tout public. A voir !!
Pour 1 Notes
Formidable spectacle ! j'y étais pour la dernière ! très belle réussite que cette troupe qui nous transmet toute leur belle énergie. On revit à chaque tableau, devant de belles photos en noir et blanc l'ambiance du quartier de Sophiatow l'apartheid : quelque part on est transportés en Afrique du Sud. Bravo !
L'histoire d'un quartier en quelques tableaux colorés, dynamiques et émouvants. Ca respire la joie de vivre, et rappelle le passé pas si lointain de l'apartheid. De belles danses, de belles voix, une énergie communicative, quelques images d'archives pour poser le contexte. Le spectacle est très réussi et tout public. A voir !!
17, boulevard Jourdan 75014 Paris