Création à
Dinan, 1ère en Ile-de-France (octobre 97)
Du texte à la scène...
Conférence du samedi 18 octobre :
La presse à la création
Une femme nous livre par bribe le récit de sa vie : elle quitte sa campagne natale et sa famille pour découvrir la ville. Puis, lasse de ses combats et de ses désordres, elle revient à la terre, heureuse de retrouver les sources multiples de ses inspirations, de son savoir, de ses évasions, de ses bonheurs Un homme est là pour lécouter ; disons que cest son métier.
Création à Dinan, 1ère en Ile-de-France (octobre 97)
Créée à Dinan au Théâtre des Jacobins en Octobre 1997, " Aimée " constitue le premier spectacle de la compagnie du Cap.
Au-delà de lhistoire, le spectacle explore un monde qui séloigne des conventions naturalistes dune autobiographie.
Dun récit à lautre, la conscience ricoche, la réalité vacille, les situations basculent, un univers jaillit dun être hors du commun, hors limites, et pourtant si proche de notre intimité à tous.
Implicitement, le spectacle sinvente autours de la métaphore théâtrale du rapport entre Lacan et Marguerite. Mais progressivement, le théâtre va réécrire les rôles et proposer une version imaginaire de cette rencontre. Lhomme qui écoute se retrouve entraîné par ce flot de paroles quil sollicite et qui le métamorphose au gré des situations. Il se laisse envahir par lalchimie mystérieuse du langage qui relie lactrice, lauteur, lhéroïne. Il voyage ainsi dune identité à lautre : médecin, âne, amoureux, manifestant, servante Dune fonction à lautre : comédien, serviteur de scène, musicien, machine à vent, à neige, à imaginaire.
Lacan disait de sa patiente quelle savait parce quelle inventait. Cest de ce savoir là dont la pièce " Aimée " sempare.
Cest véritablement suite à une lecture des textes de Marguerite Anzieu faite par Isabelle Lafon, que Gilles Blanchard décide de sintéresser à cette histoire. Le texte le séduit à tel point quil décide, avec laide dIsabelle Lafon de ladapter à la scène ainsi que de le faire éditer.
" Jai été impressionné par la qualité stylistique de lécriture et par lutilisation que Marguerite Anzieu fait du langage pour exprimer, à la surface, la richesse de notre fonctionnement intérieur, richesse de ce chaos qui nous constitue tous, où pensées, sensations, émotions, images se percutent et sactivent en toute liberté pour nourrir notre vie extérieure. Jai construit une pièce de théâtre avec comme matière première cette écriture fascinante, et comme cadre le contexte biographique dont la relation avec Lacan, rassemblant ainsi la vie et luvre pour raconter lhistoire. "
Gilles Blanchard
" Marguerite Anzieu parle de très près, une intimité littéraire véritable qui donne une langue vigoureuse et en même temps très douce. Cest précieux pour une comédienne dêtre en face de cette tenue décriture, de frôler le risque de devenir tout ce quon dit et de dire tout ce quon devient. Jai aimé les textes de Marguerite Anzieu tout de suite, sans réserve. Je ne connaissais pas son histoire, ce que les autres ont appelé sa folie. Jai souvent imaginé une femme incroyablement belle, drôle, éperdue, une plaine au vent... "
Isabelle Lafon
Conférence du samedi 18 octobre :
" LE CAS AIMEE "
Réponse au metteur en scène par Jean Allouch, psychanalyste et auteur du livre " Marguerite ou lAimée de Lacan "
La preuve est aujourdhui faite que les textes de Marguerite Anzieu se prêtent au théâtre. Quelle a donc écrit une uvre poétique de théâtre Démonstration dautant plus assurée quIsabelle Lafon et Gilles Blanchard lont fait valoir en acte. Le ton a été trouvé. Ceci, je lai su dés que la comédienne a prononcé ses premiers mots. Et la suite ne cessait de le confirmer, quels que soient les changements de registre (ils furent assez nombreux et toujours fondés) Il faudrait étudier chaque séquence. On pourrait montrer que les changements de registre servent à chaque fois dune manière adéquate ce qui se dit dans linstant et, au bout du compte fait valoir ce ton juste. Celui-ci, pour tenter ici de le dire en mots, nest rien dabsolument ceci ou cela : Pas absolument triste tout en étant triste parfois, pas absolument revendiquant tout en létant parfois, pas absolument amoureux tout en létant parfois, pas absolument bucolique tout en létant parfois, etc... La folie nest pas si absolue qu'on en vient à le croire... Peut-être est-ce parce quil y a cette sorte de légereté, ce je men fichisme qui nen est pas un, qui nest pas le contraire du sérieux, peut-être est-ce pour cela quil y a place pour le théâtre, soit - disait Gilles Blanchard - pour un dispositif interprétatif qui accompagne le dire, qui nous prend en main, nous spectateurs, en nous proposant de laccueillir dune façon optimale, la plus ouverte. La mise en scène est en permanence inventive. Cela ne métonne pas que Gilles Blanchard ait précisément élu dans sa pièce, le texte de Lacan où celui-ci dit avoir appris de Marguerite que le savoir sinvente. Il se pourrait que les voies du théâtre disent mieux que lanalyse, mieux, cest à dire plus justement, au regard du dire lui-même de Marguerite.
Avec Marie Magdeleine Lessana, psychanalyste, auteur dun article sur Marguerite Anzieu
Ce spectacle ma soufflée, au sens où chaque instant il était plus grand que ce que je pouvais en saisir. Ce fut un événement de part en part, poétique et théâtral. .. La disparité, la dissymétrie des jeux respectifs de Gilles Blanchard et Isabelle Lafon est magnifique. Ce personnage masculin aux multiples statuts ponctuels, minimal, froid, allant de la plate neutralité à la cruauté sèche, fait valoir une femme qui prend une étoffe considérable, au cours de la pièce, elle prend un poids unique. Cest le tour de force dIsabelle Lafon avec ce texte. Sa capacité exceptionnelle dhabiter la langue, de lui donner des accents, joyeux, moqueurs, ironiques, brutaux, désespérés, poétiques, maternels, étranges, amoureux, fragiles, affolés, impitoyables. La force de respiration dun passage à lautre, les changements de tons, des coupures de langue et des gestes qui laccompagnent, font que le personnage dAimée émerge, unique, dans sa respiration
Avec Anne-Marie Vindras, psychanalyste, auteur douvrages sur le cas Ernst Wagner
La justesse de jeu dIsabelle Lafon a su memporter vers la chevauchée dAimée, de sa campagne natale à la grande ville. Lardeur et la sensibilité de son interprétation sont en accord avec la puissance poétique du texte et la mettent en valeur.
" Se laisser charmer par les mots, leur enchevêtrement, leur poésie Un désordre où viennent en contrepoint une mise en scène très juste, des décors et des éclairages excellents Isabelle Lafon, superbe, imprégnée dun rôle quelle tient à fleur de peau "
Ouest France
53, rue Notre Dame des Champs 75006 Paris