Molière s’inspira de Plaute et Kleist de Molière pour cet Amphitryon venu de la Grèce ancienne, cette histoire d’un dieu pervers qui se fait identique à l’homme dont il veut séduire la femme. Ce « moi » dédoublé, jumeaux ou sosies, est l’un des plus vieux ressorts des effets comiques depuis que la comédie existe. Avec Kleist, il devient troublant, dérangeant jusqu’au vertige lorsqu’il s’agit de se questionner sur sa propre vérité.
Bernard Sobel, toujours au service des grands poètes de la scène, veut qu’on entende la fascinante langue de Kleist dans cette tragicomédie dont le grand écrivain Thomas Mann disait qu’elle était «la plus belle du monde»…
Texte français Ruth Orthmann, Eloi Recoing.
Sa mystique sereine, sa ferveur spirituelle sont incomparables. Si on la jouait comme elle le mérite, ce serait un divertissement, ce serait une fête pour la sensibilité et la raison qui y trouveraient également leur compte. Mais les représentations d'Amphitryon n'ont rien de commun avec les fêtes, si ce n'est la rareté : elles sont peu fréquentes et ce qui les entoure, c'est le train-train quotidien du théâtre. Un jeune régisseur sensé et sensible à la spiritualité la plus plastique devrait sentir et examiner à fond cette grande comédie unique en son genre, devrait prendre le temps et acquérir les moyens de la représenter comme il se doit avec des comédiens qui, aux dons physiques les plus agréables, uniraient la réceptivité la plus obéissante aux indications précises de son enthousiasme. Qu'on me tienne au courant : si une telle représentation se prépare, j'irai pour la voir. (...)
On se demanderait quelle âme ont donc ces poètes, quel feu est leur flamme froide et quelles relations éhontées et à demi inhumaines ils entretiennent avec la vie, le sentiment qu'ils recherchent, qu'ils saturent d'esprit, qu'ils approfondissent, élèvent, subliment avec tout leur art, tout leur zèle, pour tout de suite après - comme si rien ne leur importait, comme si pas un iota de ce qu'ils ont soigné avec un tel acharnement victorieux ne leur tenait réellement à coeur - faire à tout cela, à nous, et à cette sublime intuition, un pied de nez de satyre.
Thomas Mann, L'Amphitryon de Kleist in Les Maîtres, Grasset 1979
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