Lieu : Théâtre en bois, 15 route de Manom
" J’ai tout écrit. Plus tard, si on se réunifie, ils pourront reprendre contact. En attendant, nous attendons de ce côté-ci, et eux de ce côté-là ."
Marqué par l’histoire mouvementée de sa propre famille - embarquée, ballottée, dans les secousses historiques de la seconde moitié du XXe siècle - Balázs Gera a vécu comme un choc les images des réunions familiales organisées, durant l’été 2000, en « Corées », à Séoul et à Pyongyang. Presque quarante ans après l’accord du 38e parallèle qui mettait fin à la guerre mais séparait le Nord et le Sud par une infranchissable zone démilitarisée, deux cents hommes et femmes ont pu revoir les leurs pendant quatre jours.
Dans cet événement, Balázs Gera a vu un exemple des plus flagrants et des plus criants de ce que peut engendrer l’Histoire dans l’histoire, c’est-à-dire dans la vie des hommes. Il y a vu le matériau d’une tragédie contemporaine.
Corées est le fruit d’un long et patient travail de recherche : témoignages de protagonistes de la réunion familiale ; documents officiels préparatoires ; écrits et déclarations d’hommes politiques, de journalistes, d’artistes, d’intellectuels ; documents filmés.
Le défi était alors d’importance, le but n’étant pas de réaliser une œuvre documentaire. Il convenait de donner aux matériaux recueillis, à la réflexion et aux sentiments qu’ils suscitent, une dimension artistique. Un travail que Balázs Gera a entrepris avec Philippe Gilbert, un vieux complice en écriture, et le vidéaste-réalisateur Dominique Thiel. Partir du réel et le traiter pour mieux y revenir sans doute, le regard enrichi par la médiation théâtrale.
L’œuvre se compose donc de quatre actes et de trois intermèdes. Chaque acte est centré, non pas autour d’un « personnage », mais de ce que Balázs Gera, désireux d’éviter la psychologisation, la réduction à une émotion première, appelle une « figure » ; ce sont d’ailleurs six comédiens, en une « parole chorale », qui focaliseront le récit particulier de cette figure. On rencontrera successivement une vieille dame, un soldat, une réfugiée, le président.
Quant aux intermèdes, ils consistent en la diffusion de séquences filmées montrant la zone démilitarisée à différentes étapes de son histoire, des séquences leitmotive, le 38e parallèle étant le symbole de la tragédie vécue par le peuple coréen. La musique, originale et interprétée en direct, sera tour à tour contrepoint lyrique ou lien narratif.
Leurs histoires, son histoire, nos histoires et l’Histoire.
Place de la liberté (Boulevard Foch) 57103 Thionville