Si nos vies si bien réglées étaient un jour brusquement bouleversées... Si le désir de fuir était si fort que seule la fatalité pouvait nous retenir. Si les lois du monde que nous connaissions étaient chamboulées et que nous soyons forcés de réapprendre ce que l'on ne veut pas accepter. Si nos souvenirs devaient soudainement nous échapper sans que nous puissions les en empêcher... Si quelqu'un s'amusait seulement à tirer les fils de notre histoire comme on manipule une marionnette...
Entre eux deux est l'histoire de cet homme et de cette femme qui attendent désespérément entre deux mondes, entre deux rives, entre eux deux que le marionnettiste décide de leur sort. Ce huis clos infernal, dans lequel les hommes deviennent les instruments de la mort poussant de cette façon les passions jusqu’à leur paroxysme, est un hymne à la vie et à l’amour, mêlant au théâtre l’art de la marionnette et la danse.
Un théâtre de rêve – une histoire de la vie.
J’ai toujours été intriguée par la mort. Enfant, je m’imaginais que les personnes devenues trop âgées rajeunissaient d’un seul coup pour revenir à l’état de nourrisson. Lorsque l’on m’a expliqué ce qu’était vraiment la mort, elle m’a fait peur et j’ai compris que c’était un sentiment partagé par beaucoup. Mais pourquoi avoir peur d’une chose que l’on ignore complètement ? Aucun témoin n’est revenu de l’au-delà nous raconter ce que l’on y vit, on n’en a que des images et des récits nés de nos fantasmes.
Entre eux deux… est mon fantasme de la mort, ou plutôt du monde dans lequel on attend qu’elle vienne nous chercher, un monde similaire au nôtre mais où les morts ne peuvent évoluer : ils le voient mais ne lui appartiennent pas. C’est une manière de rendre la mort plus familière, plus banale, plus douce et moins effrayante. Pour cette raison, la mort est matérialisée. C’est un personnage à part entière. Elle est attirante, agréable, douce et loin des clichés terrifiants que l’on se fait d’elle. Jamais elle ne parlera. Elle ne s’exprimera qu’avec son corps. Invisible aux yeux des personnages, elle est pourtant toujours en scène à séduire, au-delà de cet homme et de cette femme, nous, êtres humains qui la contemplons. C’est le personnage principal, le maître de cérémonie, sans elle, l’intrigue n’avance pas. Elle est le marionnettiste qui tire les ficelles du jeu. Elle donne le pas aux deux autres protagoniste. C’est elle qui décide, qui commande. Elle ne désire que s’amuser et être aimée de ces humains qu’elle adore mais qui la repoussent sans arrêt. Ses sentiments sont bien réels et elle ne tue que par dépit. Peut-être parce qu’elle n’arrivera jamais à se mettre entre eux deux ?
Au-delà de cette peur pour la mort, Entre eux deux… dénonce l’horrible vérité qui est que nous vivons sans arrêt à ses côtés. Nombre de régions mondiales ne connaissent depuis des décennies que la guerre et la famine… Les gens y vivent avec la mort depuis leur naissance. Ils connaissent davantage la mort que la vie.
Aujourd’hui on découvre des maladies de plus en plus meurtrières et ravageuses. Aussi, plus qu’un hymne à la mort, Entre eux deux… est un hymne à la vie : il faut profiter de la chance d’être en vie avant que la mort ne nous tombe dessus. C’est la raison pour laquelle les deux personnages luttent pour rester en vie. Cette bataille se traduit par la volonté de vouloir garder leurs souvenirs. Ils s’accrochent à eux car c’est leur unique lien avec la vie. Lorsqu’ils se décideront à rompre avec leur vie passée et à couper le fil, ce ne sera que pour continuer à vivre sans ce qui fait de nous des êtres humains : la mémoire. La Mort sera leur mémoire. Elle la manipuleracomme bon lui semble.
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