Jouliks

L’histoire
Note du metteur en scène
Extrait

• L’histoire

Il y a sept ans qu’ils ne sont pas venus, les vieux, dans cette maison, où vit leur fille Véra. Un fossé de sept ans à combler. Sept ans depuis la naissance de la Petite. Sept ans où Vera et Zak se sont dévastés d’un amour fou, d’un amour-flamme inévitable, d’un amour tourmenté et ardent. Un amour qu’ils ne peuvent pas comprendre, les vieux. Un amour dont la vieille Mé n’a jamais rêvé pour sa fille. Ils se regardent, et essaient de se reconnaître, comme des étrangers qui essaient de se reconnaître mais qui n’y arrivent pas. Et quand les mots sortent, on sent tout de suite venir la catastrophe. On sent les chemins qui ne se croisent plus. Et elle le sent aussi, la Petite, qui est témoin de leur dérive ; qui pose sur eux ce regard tendre, ce regard d’amour vrai qu’on souhaiterait capable de les protéger tous.

Marie-Christine Lê-Huu

C’est une histoire de famille, une visite maladroite, inopportune et chaotique. Jouliks raconte une passion dévorante et exclusive, une pièce de guerre sourde, sombre et lumineuse.

Haut de page

• Note du metteur en scène

J’ai découvert Jouliks en décembre 2002. Diane Miljours, directrice du Centre des auteurs dramatiques à Montréal, m’avait fait parvenir le manuscrit de Marie-Christine Lê-Huu. Jouliks n’avait jamais été jouée ni éditée (la pièce sera créée en mars 2005 en France et en avril de la même année au Québec).

Je lus le texte une première fois, puis une seconde, immédiatement après. Le lendemain, j’appelais Marie-Christine Lê-Huu afin de savoir si elle acceptait de me confier son texte. Sa réponse fut positive.

Quelques mois plus tard nous nous sommes rencontrés à Montréal. Nous avons parlé de tout, du théâtre, beaucoup de la vie, et très peu de la pièce. Je fus invité à une lecture où Marie-Christine tenait le rôle de La Petite. Elle était La Petite. En octobre je suis reparti en tournée, cette fois dans le Grand nord. Je ne connaissais que les deux métropoles Montréal et Québec.

Pendant le voyage, jamais Jouliks ne m’a quitté. La Petite, Véra, Zak, La Mé, Le Papé, Guillaume, je me suis imprégné d’eux avant de m’en séparer. Je les imaginais au milieu de nulle part entre ciel et terre. Maison de bois posée à même le sol sans délimitation, ni barrière, prête à l’envol à la première tempête et narguant l’hiver.

L’action de Jouliks se situe après l’hiver… C’est une histoire de famille, une visite maladroite, inopportune, et chaotique. Un huis clos en rase campagne, une maison sans toit, ouverte à tous les vents. Jouliks est une pièce du déséquilibre et de l’instabilité. Une pièce de guerre sourde, sombre et lumineuse. Une pièce de l’incompréhension et du désordre. Jouliks raconte une passion dévorante, exclusive. Le désir, l’abandon, la chair et la peau. La tendresse qui se consume. Un crime d’amour…

Gérald Chatelain, 19 mars 2004

Haut de page

• Extrait

La Petite
J’ai huit ans et je suis mozambique. Ma mère disait maigre mais moi j’aime mieux dire mozambique parce que c’est plus beau […]
Ils sont venus ici tout à l’heure. Ils étaient trois. Ma Mé, mon Papé, et puis le trois. Je dis le trois parce que je le connais pas. Jamais vu. Mais il est venu ici avec mon Papé et ma Mé çà a été le grand silence.

Ils sont venus ici avec une tête d’enterrement vu que c’est le cas. Je vous le dis parce que vous pouvez pas savoir mais c’est important, alors aussi bien le dire tout de suite. Ils étaient ici entrain de se chercher des mots pour me dire des choses qu’on sait jamais comment dire. Des choses graves comme « je t’aime » ou « je t’aime plus malgré nos huit années de vivre ensemble où je t’ai répété tous les jours qu’on était pour la vie mais qu’est-ce que tu veux on ne sait pas toujours comment la vie ça peut être long…

Haut de page