Deux septuagénaires sont assises, côte à côte. Ultimes vraies vieilles d’un monde où on ne mange plus ni gluten ni sucre et où rode une brigade sanitaire, elles exhibent les effets du temps sur leur corps sans collagène, ni bistouri, ni Botox.
Deux septuagénaires sont assises, côte à côte. Ultimes vraies vieilles d’un monde où on ne mange plus ni gluten ni sucre et où rode une brigade sanitaire, elles exhibent les effets du temps sur leur corps sans collagène, ni bistouri, ni Botox. Elles attendent…un passant, un client, un fils. Mais personne ne vient. Elles se battent pour garder leur place, préserver leur pré carré, mais finissent par s’unir, peut-être même par se lever, pour quitter ce monde aseptisé où elles en viendraient à avoir la nostalgie des blattes.
Suite à des interventions à destination des séniors, Marilyn Pape, metteuse en scène, a envie d’aborder la question du vieillissement. La lecture du texte La Nostalgie des blattes de Pierre Notte l’a conforté dans cette envie. Il réunit deux personnages, deux vieilles. Et deux vieilles au théâtre, c’est assez rare pour être souligné ! Ce texte à la fois drôle et touchant évoque, avec beaucoup d’humour, la question du « vieillir ».
Et c’est un éloge de la vieillesse débordant de sincérité auquel on assiste.
Vieillir, c’est accepter la transformation mais aussi la perte. Ici, les changements engendrés par le vieillissementsont énoncés sans pudeur. Ils sont valorisés et portés haut comme un trophée, une victoire sur le monde, décrits avec une certaine fierté, par nos deux personnages, qui nous en font un état des lieux des plus cocasses.
Quel sera notre futur proche dans un monde où tout disparaît ?
En parallèle, ces changements dus au vieillissement s’accompagnent d’autres changements, liés à l’évolution du monde, et en particulier au dérèglement climatique. Ils sont intrinsèquement liés. Nous sommes dans le futur. Un futur qui n’est peut-être pas si éloigné... La Nostalgie des blattes interroge sur la question du manque. Le manque de gluten, le manque de sucre, d’insectes (plus d’abeilles), etc... Mais également le manque d’humanité dans un monde où tout est aseptisé.
Quelle vie sociale quand on a franchi la barre fatidique du « vieil âge » ?
Nos deux « vieilles » ont choisi quant à elles de prolonger leur vie sociale, voire « professionnelle ». Elles ont choisi de s’exposer. Exposer leur vieille peau pour gagner leur vie et capitaliser. Le lieu peut s’apparenter à un musée ou ces deux femmessont installées chacune sur leur chaise et attendent une visite.... Une présence humaine. Elles se toisent, s’observent, se disputent… La méfiance laisse peu à peu place à une sororité tissée par l’âge, la solitude et la nostalgie d’un temps où on pouvait s’en griller une dernière, tranquilles. Elles finissent par s’allier dans ce monde où les relations semblent dénuées d’humanité. Elles se remémorent des instants de leur vie d’avant, lorsque l’une était danseuse et l’autre comédienne et chanteuse. Elles en livrent des extraits. Le Lac des cygnes dansé par la première et Dalida chanté par la seconde. Deux moments d’une belle authenticité. Elles vont même jusqu’à s’inventer des histoires. Une maladie d’Alzheimer ou un Parkinson. « Ça nous occupe » dit l’une d’entre elles.
Tout est bon pour jouer à exister... à faire semblant
Marilyn Pape et Eulalie Delpierre sont époustouflantes dans ce texte très beckettien, dans lequel elles attendent et passent le temps à la fois grâce à leur conversation et à leurs souvenirs artistiques car elles l’ont toutes les deux été (artistes). Le texte comme leur interprétation sont géniaux, il faut absolument aller les voir.
Pour 1 Notes
Marilyn Pape et Eulalie Delpierre sont époustouflantes dans ce texte très beckettien, dans lequel elles attendent et passent le temps à la fois grâce à leur conversation et à leurs souvenirs artistiques car elles l’ont toutes les deux été (artistes). Le texte comme leur interprétation sont géniaux, il faut absolument aller les voir.
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